La Crème de la Crème : Guy Martin au Grand Véfour : « Je cuisine avec mes souvenirs. »

Le Grand Véfour ? Plus qu’une table. Un mythe, un morceau de l’histoire de Paris mais aussi berceau du restaurant moderne et sans doute l’un des plus beaux décors de la capitale. Balzac, Napoléon, Cocteau, Colette ou Malraux ne sont que quelques-uns des personnages illustres qui se sont assis sous le plafond peint et sous l’éclat des sous-verres admirablement conservés. Des invités glorieux qui ont façonné la légende d’un lieu, sans oublier de leur rendre hommage à travers la plaque attribuée à chaque table. La tête chercheuse et le gardien espiègle de cet éternel vaisseau amiral ? Guy Martin, présent ici depuis 1991 et qui, sur les traces de Raymond Oliver, a élevé une nouvelle fois la maison au firmament de trois étoiles, avant de l’acquérir en 2011. Cela fait 3 ans que le maestro des lieux a opéré un changement audacieux, démocratisant avec brio ce monument gourmand, jouant avec les formules abordables, cuisine de marché décomplexée mais recherchée, l’hebdomadaire haut de gamme sans oublier de doter ce joyau de style Directoire d’une terrasse imprenable sous les arcades du Palais-Royal. Avec ou sans étoiles, son savoir-faire et son toucher restent là alors que les fournisseurs et l’excellence des produits n’ont guère changé d’un iota.

Guy Martin & l’oeuf au caviar © MR

Amoureux du terroir, du goût et des « vrais » produits ? Guy Martin y baigne depuis sa plus tendre enfance. Savoyard, originaire de Bourg-Saint-Maurice, ce petit-fils d’agriculteurs revendique clairement ses racines paysannes, lui qui allait cueillir les petits pois et parcourait allègrement le jardin familial et la ferme de choux, poireaux et cardons entretenue par ses grands-parents : ” “ Jusqu’à mes 18 ans, je ne savais pas ce qu’était la confiture non faite maison et je ne connaissais pas d’autre lait que le lait cru de vache. nous dit-il. Fin connaisseur de tous les terroirs, le chroniqueur d’Epicerie Fine – son émission sur TV5 Monde – n’a cessé de goûter, de rencontrer et de s’enraciner un peu partout pour découvrir les trésors gourmands et les artisans de nos terroirs. « Quand je cuisine un produit, je cuisine avec l’artisan, le poissonnier, l’éleveur et mes souvenirs. Ce sont toutes des histoires que j’aime raconter” nous dit-il, ajoutant « le produit est la base. Si c’est bon, nous ferons un excellent plat.

Guy Martin et Karin Nébot © MR

A la tête de ses partenaires favoris se trouve Kaviari, marque référence du caviar tricolore depuis quatre décennies. De son usine historique Arsenal à Paris à ses fermes d’élevage de Source sans oublier ses laboratoires de maturation, cela fait de nombreuses années que l’entreprise familiale dirigée par Karin Nebot n’a pas su trouver les faveurs du chef du Véfour, inconditionnel de longue date. caviar sauvage. Ce dernier déclare « C’est vraiment la chose la plus proche que j’ai trouvée de la nature et j’ai beaucoup cherché. Pour la petite histoire, tout a commencé presque par hasard suite à une série de trois dégustations à l’aveugle initiées par l’un des collaborateurs de Guy. Depuis, cette dernière n’a pas baissé les bras et a même signé plusieurs recettes du livre d’anthologie Caviar de Kaviari, ajoutant une vraie complicité au quotidien : « Nous mangeons régulièrement et ils nous bloquent un poisson entier” nous confie-t-il en s’empressant d’utiliser ses deux variétés préférées fraîchement livrées ce jour-là. Ainsi cette gelée de Transmontanus et cette quenelle d’osciètre” avec un gras parfait et une membrane incroyable » OMS viendra agrémenter ce bel œuf poché au centre coulant. Ajoutons qu’ayant plus d’un tour dans son sac, Kaviari lui offre également un “exceptionnel” Saumon fumé irlandais BIO, à déguster dans sa plus simple expression avec des blinis et de la crème fraiche.

Oeuf et caviar en gelée et quenelle © MR

Gelée d’oeuf, quenelle et caviar © MR

La relation du cuisinier avec le Marché de Rungis, qu’il n’hésite pas à qualifier de « l’un des plus beaux au monde et riche d’une incroyable diversité » a également commencé de manière inattendue. En , fraîchement dépêché au Château d’Escrimont près de Chartres par René Traversac, propriétaire de douze Relais & Châteaux et du Château d’Artigny où Guy avait officié jusqu’alors, il se voit confier la mission de s’occuper des achats en se rendant chez Paris en compagnie d’un acolyte flamand qui ne parle pas un mot de français. Après une série d’échecs, de détours et une sortie de piste lui donnant l’occasion d’admirer la Tour Eiffel, Guy et son compagnon arrivent enfin à bon port pour découvrir cet eldorado vibrant du bon goût. Il y fera ses premières rencontres, y restant fidèle depuis son arrivée chez Véfour et se confiant à nous » on fait d’excellents machons à Rungis, c’est un point de rencontre incontournable avec les fournisseurs et autres chefs « .

Dégustation Guy Martin © MR

Au MIN, sa quête de fraîcheur l’a amené à collaborer de longue date avec les Halles Trottemant, qui fournissent la quasi-totalité des fruits et légumes de la maison, sans oublier une large gamme d’herbes et d’aromates. Professionnalisme, sélection soignée, le chef vante volontiers la flexibilité et la réactivité de son maraîcher dans l’âme »Ils s’adaptent. Il y a plusieurs tournées de livraison, vous pouvez commander comme à la maison. Courges, betteraves, champignons, fenouils, alevins, poires conférence… la liste des trouvailles de Trottemant est longue alors qu’à l’orée du printemps, parmi les premières morilles des Vosges, carottes des sables, cardons, superbes asperges blanches des forêts de pins de du -Ouest ou encore de belles gariguettes, le chef se réjouit déjà de l’épanouissement des gourmandises de saison dans le panier de son partenaire spécialiste.

Foie gras, coings et grenade © BB

Foie gras, coings et grenade © BB

Des légumes aux produits nobles, le maestro du Véfour s’occupe de tout. En matière de foie gras, évidemment français, il s’adresse à la Compagnie du Bocage et à son président Laurent Delacotte, privilégiant uniquement les lobes charnus pesant entre 400 à 500g. Une exigence illustrée à travers cette composition colorée et charmante où les épais morceaux de foie gras de canard cuits en terrine épousent délicatement les coings, à la fois confits et déclinés en compote acidulée, sous une pluie de graines de grenade. Pour les truffes, c’est à la Maison Henras à Montauban que ça se passe. « Ils ont des produits exceptionnels. Toutes les truffes sont canifées » note-t-il, nous révélant que son calibre préféré se situe entre 50-80g pour « faire de belles tranches de melanosporum « . Enfin, Guy passionné ne cache pas son amour pour les coquilles Saint-Jacques d’Erquy, » fruit d’une pêche éthique et responsable » et qu’il glane directement aux enchères. En fin de saison, il associe avec brio des noix délicatement poêlées à une fine mousseline de céleri-rave, des croûtons et de subtiles notes vanillées.

Noix de Saint-Jacques poêlées, fine purée de céleri-rave, pointe de vanille © MR

Noix de Saint-Jacques poêlées, fine purée de céleri-rave, vanille © BB

Toujours au gré de la marée, alors que ce fier Savoyard ramène occasionnellement de son pays natal des ombles chevaliers et des écrevisses, c’est Transgourmet qui se charge d’approvisionner, au plus près des arrivées, les cuisines du Palais-Royal en rouge rouget, cabillaud, turbot ou, lorsque la saison le permet, oursins bretons ou méditerranéens coupés en velouté et accompagnés d’œufs de caille, de caviar et de jus de coque dans l’un des plats signatures de Maestro Martin. Côté volailles et viandes, trois spécialistes mettent leur grain de sel sur l’ardoise du Grand Véfour. Tout d’abord, l’orfèvre Miéral à Montrevel-en-Bresse dont les poules, canards, pigeonneaux et pintades alternent avec les belles volailles du Coq Saint-Honoré. Pourtant, de l’agneau de Lozère aux filets de veau, de porc ou de bœuf, c’est à la plus confidentielle Boucherie André de Boulogne-Billancourt que le magicien Martin s’adresse pour l’essentiel de la boucherie. . En témoigne ce séduisant couplet autour des joues de porc bien fondantes agrémentées d’un jus d’orange et de canneberge que l’on en profite pour arroser du vin du chef, à la fois suave et opulent en rouge, qui, outre l’ouverture de trois palais à Nardo, a dirigé vers le Sud et l’Italie et créé « son rêve de cuisiner » en acquisition d’un petit vignoble biologique de 3,7 ha dans les Pouilles.

Joues de porc, jus d'orange, canneberges © BB

Joues de porc, jus d’orange et canneberges © BB

En matière de fromages, le bon sang savoyard ne peut pas mentir, le gourmand Guy, qui possède des vaches en Savoie et se permet parfois le luxe de produire son propre Beaufort d’été, fait confiance à la Maison Quatrehomme qui lui réserve notamment un superbe Comté 36 mois tandis que le la crème et le beurre sont signés Beillevaire » seul grand acteur à continuer à produire du lait cru « . Cerise sur le gâteau : le ballet des desserts qui constituent ici un grand moment. Le magnifique éclair vanille, le palet de chocolat au lait avec sorbet mangue et fruit de la passion ou encore le millefeuille araignée tonka, caramel au beurre salé flanqué de son sorbet poire sont autant de délicieuses conclusions. Sans doute, avec son charme intact et son « gniac » trouvé, l’un des plus anciens restaurants de Paris est entre de bonnes mains.

Millefeuille tonka caramel au beurre salé, sorbet poire © BB.

Millefeuille tonka caramel au beurre salé, sorbet poire © BB.

Le Grand Véfour

17 rue de Beaujolais
Paris 1er
Tel. 01 42 96 56 27
Menus : 56 (déjeuner, formulaire.), 67 (déjeuner) €
Carte : 75-150 €
Fermeture hebdomadaire. : Lundi dimanche
Métro(s) à proximité : Palais Royal, Richelieu-Drouot
Site: www.grand-vefour.com

 
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