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plongée dans l’atelier de Daniel Pennac

Les gens qui n’ont pas lu un seul livre de la saga Malaussène se font de plus en plus rares. Et pour cause, La Fée Carabine a Le petit marchand de prosece cycle de romans est l’un des plus appréciés en librairie. En 2023, l’auteur publie le huitième et dernier tome de cette série, la clôturant par quelques révélations fracassantes.

« Les Malaussènes sont nés au début des années 1980 dans la cave des Éditions Gallimard, sous le couvert de la « Série noire », alors dirigée par Robert Soulat et Christian Mounier. » Daniel Pennac

Comment alors ne pas vouloir revenir à ce qui a commencé en 1985 avec Au bonheur des ogres ? Dans Mon assassinDaniel Pennac revient sur un personnage clé de l’œuvre, Pépère. Il nous raconte son enfance, créant ainsi des ponts entre le lecteur et lui, mais pas seulement. Chaque personnage (ou presque) est évoqué dans une forme de tourbillon inspirant. Un tourbillon qui n’est pas sans faire écho à la réalité. Et c’est peut-être aussi de cela dont nous parlons ici.

Ecrire les Malaussènes

Parce que oui, Mon assassin est aussi un livre sur l’écrivain Pennac. Celui des Malaussènes, mais aussi celui qui pense, qui perçoit le monde à travers son prisme. Très vite, il nous emmène avec lui dans ce que l’on pourrait appeler son atelier, ses coulisses, et nous dévoile quelques éléments sur ce qui fait selon lui son travail. C’est peut-être la chose la plus intéressante de ce roman, pour ceux qui ne connaissent pas encore la saga Malaussène. C’est peut-être aussi ce qui fait de ce livre un livre à tiroirs.

En effet, de page en page, on apprend qui se cache derrière chaque grand nom des huit livres. On découvre ainsi des personnes en chair et en os, de Robert Soulat à l’éditrice jeunesse Isabelle, en passant par JML (que l’on imagine facilement être Jean-Marie Laclavetine, éditeur chez Gallimard, et qui est devenu celui de Daniel Pennac). Tous ont participé, à leur manière, à la fiction de Pennac. Chacun a participé à faire de ce cycle romanesque une métaphore permanente.

« Est-ce qu’on incarne l’ami que l’on se fait dans un personnage de roman ou est-ce qu’on le désincarne ? Je vais y réfléchir. » Daniel Pennac

C’est précisément ce qui amène l’auteur à réfléchir, avec nous, sur cette nébuleuse conception du personnage. Cette dernière est sans doute liée à l’imaginaire qui, parfois, capte mieux la réalité. Les personnages prennent la page, ils incarnent ensemble l’histoire, plus vrais que nature. Et la vie en devient presque décevante. Ou du moins, pas assez grand.

Fiction contre vie

Dans cette optique, les souvenirs se mêlent à la réflexion. Parfois, lorsqu’il s’agit d’expliquer la Source d’une idée, Daniel Pennac lui-même tâtonne, il hésite, il se demande si, finalement, ce ne serait pas ceci ou plutôt cela. Il est submergé par la fiction, et on adore ça.

N’est-il pas lui-même satisfait de ces limites ? Essentiellement, Mon assassin pose presque plus de questions qu’elle n’éclaire une saga difficile à croire que Pennac détesterait. Et finalement, cette approche de la diégétique n’est pas si unique, mais elle a le mérite de toucher une œuvre populaire. C’est probablement ce qui rend ce cas intéressant ici.

« Je soupçonne une autre origine littéraire à la fureur meurtrière de Pépère. Encore un souvenir d’enfance. Et lire. » Daniel Pennac

L’histoire littéraire a déjà expérimenté l’art de brouiller les frontières entre le tâtonnement de l’écrivain et la narration que le lecteur peut concrètement « lire » (pensons à Si par une nuit d’hiver un voyageur d’Italo Calvino, où le processus de création littéraire intervient directement dans le récit). Et ici, Daniel Pennac se pose une nouvelle fois comme un écrivain-lecteur, celui qui redécouvre, qui tente de découvrir ce qui l’a amené à tisser une toile aussi serrée. Mais le mystère a du bon, parfois.

Et si le livre est rempli de phrases éloquentes sur l’inspiration, l’écriture, quant à elle, reste ce qui fait reconnaître son auteur : expressive, orale, parfois joyeuse, pourquoi pas plaintive. Bref, du pur Pennac. Et au fond, on ne pouvait pas rêver mieux.

Mon assassinde Daniel Pennac, Gallimard, 160 pages, 18 €, en librairie le 3 octobre.

 
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