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Alice Dekker raconte l’histoire des Lugt avec « The Collection »

Alice Dekker raconte l’histoire des Lugt avec « La collection »

L’auteur écrit un roman sur des personnes réelles sans permettre de distinguer la vérité de la fiction. D’où un inconfort malgré les qualités d’écriture.

Publié aujourd’hui à 20h30

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Le 12 octobre (c’est pour bientôt !), la Fondation Custodia inaugurera à Paris dans l’ancien Hôtel de Lévis-Mirepoix son exposition sur les dessins italiens du Musée Boijmans Van Beuningen de Rotterdam. Ce sera sûrement magnifique. La maison fait toujours bien les choses. Parallèlement, « La collection » d’Alice Dekker sort chez Arléa, qui est un bon éditeur. C’est le roman de ce coin des Pays-Bas situé à quelques mètres de l’Assemblée nationale. Autrement dit, la vie passionnée de Frits et Jacoba Lugt, pour qui tout se résumait à l’art et à la beauté. Couple proche, elle décède en 1969 et lui en 1970. Ils créent la Fondation en 1947, dès leur arrivée en . Leur énorme fortune et les œuvres qu’ils avaient accumulées y étaient passées. Des centaines de peintures hollandaises, des milliers de dessins et des dizaines de milliers de gravures.

Un travail qui continue

Longtemps resté confidentiel, le lieu connaît aujourd’hui un véritable développement public. C’est un musée privé qui achète et expose. Les Lugt n’avaient pas momifié l’institution en interdisant toute modification, voire tout enrichissement. Leur travail d’historien se poursuit ailleurs. Frits Lugt, qui commença à hanter le Rijksmuseum d’Amsterdam à dix ans et fit ses premiers inventaires peu après, parraine ainsi du Ciel la mise à jour du dictionnaire des marques de collection apposées hier et aujourd’hui sur les œuvres graphiques. Un ouvrage que les spécialistes appellent « le Lugt » comme ils diraient « la Bible ». Tout semble donc bien se passer chez Custodia, dirigé depuis l’année dernière par le Flamand Stijn Alsteens, que l’on a connu auparavant chez Christie’s.

Alice Dekker entend cependant évoquer l’aspect sombre des Lugt dans « The Collection ». Il nous montre deux individus contraints dans leurs certitudes, mettant au dessus de tout la postérité d’un tout patiemment uni. Ces derniers ont dévoré leur vie. Le couple avait cependant cinq enfants, dont ils prenaient peu soin et à qui ils donnaient très peu d’amour et de chaleur. Quand on est fusionnel, il n’y a déjà plus de place pour les autres. Alors pensez à ce que ce serait s’il y avait encore la fameuse collection entre eux et vous ! Les Lugt avaient cependant un fils physiquement handicapé et une fille souffrant de graves problèmes psychologiques. Cela ne les a pas empêchés de pousser ce gamin encombrant partout où ils le pouvaient. Un descendant dont ils finiront par déshériter au profit de la Fondation Queen. Aucun de ses membres ne semblait digne d’un tel ensemble, qui ne devait être ni démembré ni prêté à aucun prix.

Est-ce vrai ? Est-ce faux ? La chose se présente comme une fiction. Alice Dekker l’avait déjà fait pour nous avec sa Louise de Vilmorin intitulée « Les Choses Douces » en 2022. Elle a également fait parler le peintre Chardin dans « La petite table de laque rouge » en 2012. Le peintre est décédé au XVIIIe siècle. Louise est bien connue grâce à ses biographes. Il n’y avait rien de vraiment grave là-dedans. En s’appropriant la vie des Lugt, sans relier leur apparente froideur à la rigoureuse foi mennonite, l’auteur provoque néanmoins un malaise. Comment distinguer nos inventions de la vérité, dans la mesure où celle-ci existe ? Alice Dekker donne bien comme référence la biographie officielle des Lugt, publiée en anglais par JF Heijbrock en 2010. Mais c’est un ouvrage difficile à trouver. Une annexe aurait bien fait ici dans… le tableau.

Construction artificielle

Sinon, c’est une lecture vivante, bien écrite et agréable. Elle repose cependant sur un curieux artifice. Le narrateur est le fils infirme, décédé à 17 ans. Il reste sur Terre jusqu’aux pages 60 environ, puis observe son peuple de l’au-delà. Nous avons eu une narration plus simple. Le portrait de famille finit par être biaisé. Pourtant, dès le début, ce n’était pas flatteur.

Pratique

« La collection » d’Alice Dekker, Editions Arléa, Collection 1ᵉʳ/mille, 165 pages.

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Né en 1948, Etienne Dumont étudié à Genève qui lui furent de peu d’utilité. Latin, grec, droit. Avocat raté, il se tourne vers le journalisme. Le plus souvent dans les sections culturelles, il travaille de mars 1974 à mai 2013 à la Tribune de Genève, commençant par parler de cinéma. Viennent ensuite les beaux-arts et les livres. A part ça, comme vous pouvez le constater, rien à signaler.Plus d’informations

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