La Poste met fin à une offre vitale pour la culture française

La Poste met fin à une offre vitale pour la culture française
La Poste met fin à une offre vitale pour la culture française

ActuaLitté l’a découvert en novembre dernier : 22 ans que cette solution tarifaire était en place, favorisant les envois internationaux des particuliers, des entreprises ou des associations. Et ce, pour promouvoir le «influence de la culture française« . Sauf que ce service est trop lourd selon La Poste – qui n’a cependant pas fourni d’évaluation – et s’arrêtera donc d’ici cinq mois.

A la rentrée 2018, La Poste avait déjà procédé à une réévaluation des tarifs : le ministre de la Culture de l’époque, Franck Riester, relativisait en estimant qu’ils «demeure[aient] très abordable« . Certes, mais néanmoins : la hausse a été évidente et comme le disait Bercy en 2017, «le maintien des offres commerciales avantageuses disponibles pour l’envoi de nécessite des efforts financiers partagés».

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Plusieurs opérateurs logistiques nous indiquent également que La Poste commence tout juste à informer ses clients – certains parlant d’arrêter avec effet immédiat. Le site annonce cependant une procédure en deux temps : janvier pour l’arrêt des sacs, juillet pour la mise à mort. Certains nous expliquent également s’être inquiétés d’importants retours de colis ces dernières semaines, sans recevoir de précisions.

Silence, on tourne (une page)

Prenant acte de cette rupture dans la politique tarifaire, la journaliste et auteure Judith Lossman tente à son tour de mobiliser en lançant une pétition – la troisième en date sur ce sujet.

Dans une lettre adressée à Rachida Dati, elle dénonce l’obscurité totale : «Personne, même en haut lieu au sein de La Poste, n’est en mesure de m’expliquer la disparition de ce tarif. L’hypothèse qui revient est que cette décision appartient à votre ministère et on « parle » d’une suppression de subvention qui obligerait La Poste à actualiser ses tarifs. Je suis prêt à vous entendre à ce sujet. »

Et d’ajouter : «A l’heure où l’on nous vend en grande pompe une francophonie à la moindre occasion, le plus simple serait que vous preniez immédiatement la décision d’annuler la suppression de ce tarif qui touche de nombreuses familles et de nombreuses PME culturelles. . et les auteurs plus que nécessaire. »

Sa voix s’ajoute ainsi à celles qui, comme la Fédération des éditions indépendantes, l’association L’Autre livre ou encore le libraire Philippe Mesnard, qui fut le premier à monter un appel collectif. La Poste a démissionné ? C’est toute la question qui interroge aujourd’hui l’interprofession… quelque peu impuissante.

«Pour un livre de 600 g (environ 400 pages et quelle que soit sa valeur en euros), le prix pour l’expédier est passé de 1,74 € (jusqu’au 31 décembre 2024) à 5,65 euros entre le 1er janvier 2025 et le 30 juin 2025 et atteindra … 37,30 euros soit 600 % de majoration à partir du 1er juillet 2025, date de la suppression de ce tarif», indique Judith Lossman dans le texte de sa pétition.

Cependant, un recul impliquerait une volonté politique forte : cette offre Livres et Brochures émanait en fait du groupe La Poste, et ne répondait pas à «aucune obligation légale au titre du service postal universel», a répondu rue de Valois, contactée à plusieurs reprises. Conclusion : “L’objectif du Groupe est de maintenir un service économique tout en poursuivant l’effort de réduction du déficit généré par cette offre qu’il soutient pleinement.»

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Autrement dit, à moins de faire pression sur l’entreprise, La Poste n’est obligée de rien… La pétition est disponible à cette adresse.

Sénateurs et députés sur le pont

Les parlementaires ont également contacté la rue de Valois : Jean-Raymond Hugonet (Essonne — Les Républicains) a déploré, 15 jours après notre article, une zone d’ombre : «Si l’État n’a pas voix au chapitre dans les prises de décision, il est regrettable de voir la compétitivité des acteurs français de l’édition décliner à l’international, alors qu’elle est déjà affectée sur ce point par la concurrence des plateformes en ligne.. »

Un mois plus tard, Jérôme Darras (Pas-de-Calais – SER) enfonçait le clou : «Cette décision risque d’avoir des conséquences importantes pour les libraires et éditeurs indépendants. Cela entraînera des surcoûts importants, alors que les grandes plateformes de vente en ligne proposent à leurs clients des livraisons gratuites ou à très bas prix.. »

Leurs coreligionnaires du Palais Bourbon ne sont pas en reste : Richard Ramos (Loiret —Les Démocrates) insiste auprès de Rachida Dati : «L’arrêt de ce système est un coup dur pour les éditeurs, notamment pour l’édition indépendante, car cela entraînera des coûts supplémentaires.».

Clémentine Autain (Seine–Saint-Denis —Ecologist and Social), David Guerin (Seine-Maritime —Horizons & Indépendants) and Hendrik Davi (Bouches-du-Rhône —Ecologist and Social) for their part challenge the Ministry of the Economy: “Une fois de plus, La Poste n’a plus les moyens d’assurer sa mission de service public, faute de compensation de la part de l’État.», souligne le premier.

Les deux autres pointent les risques : «Cette décision est d’autant plus incompréhensible quand on sait que les plateformes en ligne comme Amazon contournent les frais de port obligatoires, via des points relais et proposent des prix difficilement comparables.” À suivre…

Crédits photo : Clayton Parker, CC BY SA 2.0

Par Nicolas Gary
Contact : [email protected]

 
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