Malgré ses premières craintes, une fois qu’il a fait ses preuves, la machine à succès s’est mise en route et ne s’est jamais arrêtée. Elle persiste à tout faire comme avantmais rien ne peut être fait : elle sera reconnue partout où elle voyagera. Son esprit curieux et malicieux a voulu inverser la tendance. Si elle ne peut observer sans être observée à son tour, autant piéger les seules personnes qui lui tournent le dos. Elle les capture de dos, à leur insu, comme pour les remercier de lui avoir accordé un moment de répit.
La couverture hypermédiatique a joué un grand rôle dans cette perte d’anonymat. Une mosaïque monumentale recense les innombrables rencontres et entretiens qu’elle a menés dans le passé pour promouvoir son travail. Une façon pour elle d’archiver la mémoire des moments où tout a basculé.
Pour démontrer cette dissonance avec sa notoriété, lettres et dessins d’admirateurs côtoient des autoportraits filmés. Son visage, photographié avec spontanéité, décrit la dissonance entre ce que les fans perçoivent d’elle et ce qu’elle souhaite nous montrer, une autre part de son intimité. Objets insolites, pétitions folles ; elle intègre le tout dans ce nouveau rituel de contemplation du narcisse auquel elle décide de ne jamais s’habituer.
L’artiste prend encore plus de distance et envisage une mise en scène réfléchie et parfaitement étudiée. Elle documente la construction d’un mannequin, qu’elle aime positionner selon ses envies et ses humeurs.
L’usage de l’appareil photo était incontournable, insigne protecteur mais aussi moyen d’expression essentiel. L’écriture s’est avérée être une bouée de sauvetage. Matérialiser et compiler toutes ces réflexions intimes lui est venu naturellement. Avec Superficiel, l’artiste et les Éditions Fisheye nous invitent à pénétrer le véritable regard (redécouvert) d’Audrey Tautou.
Superfacial, by Audrey Tautou. 232 pages. Fisheye Editions. 38€