Elle existe depuis cent trente-cinq ans et ne présente aucune ride, la petite bibliothèque de La Rivière, située au nord-est de la commune de Vouillé, dans les Deux-Sèvres. Sa petite taille, 12 m2 en superficie, n’augure rien de bon pour sa préservation… Et pourtant, elle respire toujours la vie, cette « bibliothèque populaire », considérée comme la plus petite de France, et créée à cet effet.
L’idée de sa création remonte en effet à 1865, à l’initiative du maire de l’époque, Charles d’Assailly. Une lettre, datée du 9 décembre 1865, et adressée à tous ses concitoyens explique sa résolution : « Les bienfaits de l’éducation se répandent de plus en plus… Dans quelques années, ne pas savoir lire deviendra rare ; l’enfant qui aurait eu ce malheur serait montré du doigt. » Il a ensuite fait don d’une centaine de livres, distribués dans un premier temps dans les écoles locales.
Ernest Pérochon, lecteur passionné
Mais un autre bienfaiteur propose de créer un bâtiment. M. Prévost cède un terrain, entre le temple et l’école municipale protestante, pour la construction d’un monument érigé en 1889, destiné au regroupement des livres en un même endroit et qui se veut ouvert à tous. Il est lui-même chargé de construire la charpente et d’aménager l’intérieur pour supporter les travaux.
Ce n’est qu’en 1988 que la commune décide – pour un franc symbolique – d’acquérir ce trésor culturel, afin d’assurer la pérennité d’un édifice qui ne pouvait plus être correctement entretenu, faute de ressources financières, compte tenu du petit nombre de bâtiments. membres (entre dix et vingt cotisations).
La bibliothèque continue de s’agrandir et de s’équiper. Un catalogue avait d’abord remplacé les ouvrages recouverts de papier kraft impossibles à localiser, et désormais un logiciel permet d’accéder facilement à l’ensemble des 1 850 livres répertoriés. Et comme équipement, on ne peut échapper à l’idée d’évoquer une chaise qui trône dans cette enceinte, où siégeait l’enseignant et écrivain local Ernest Pérochon, lecteur assidu de ce temple culturel.
pratique
- La petite bibliothèque compte vingt-trois membres, un nombre stable depuis de nombreuses années.
- Il a toujours été ouvert depuis sa création, sans interruption. La seule exception était pendant Covid. Il est géré, au sein d’une association, par un groupe d’amateurs et passionnés de lecture. « Nos lecteurs nous sont fidèles et nous n’avons pas forcément envie de changer notre façon de fonctionner »précise Rose-Marie Thin, l’actuelle présidente. Le seul espoir est d’être un peu plus reconnu par la population locale. « Parfois, les promeneurs s’arrêtent quand la porte est ouverte »comme chaque premier dimanche de chaque mois, entre 14h et 17h
- Une quarantaine de livres sont achetés chaque année, grâce aux cotisations, 15 € par personne, et à la subvention municipale.
De belles surprises parmi les livres
Dans la petite bibliothèque de Vouillé, des petites pépites sont cachées sur les étagères ou dans les livres.
Parmi les rencontres ou objets insolites, le codicille du testament de Victor Hugo, scotché au dos de la couverture d’un ouvrage consacré aux extraits de Les punitionspublié par les éditeurs Hetzel et Quantain.
Ce codicille présentait quelques signes d’usure avec le temps ou du fait d’un quelconque prédateur. Néanmoins, cette découverte était étonnante, voire inquiétante.
Une enquête auprès d’un commissaire-priseur a résolu l’énigme : il s’agissait d’un fac-similé du véritable codicille.
Autre surprise, la visite d’un adhérent de la Bibliothèque nationale de France, en 2022. Agnès Sandras, alors conservatrice, chargée des collections d’histoire de France et du recensement des petites bibliothèques. Etonnement du visiteur du jour : l’allée d’ouvrages anciens, reliés en toile, dont les auteurs sont, pour la plupart, des écrivains de la littérature française. Autant de témoignages sur la richesse de cette bibliothèque.