Avec « Un locataire si discret », la jeune Française signe un premier thriller palpitant. Un best-seller écrit directement… en anglais !
Les Français ne sont pas surpris que des auteurs étrangers, de Milan Kundera à Andreï Makine, adoptent le langage de Molière. Mais personne n’aurait pu imaginer qu’un Nogent-sur-Marne ayant grandi en région parisienne parviendrait à franchir les frontières criminelles américaines. En écrivant, qui plus est, dans la langue de Shakespeare. « J’aime la langue anglaise, même si on en a souvent une vision utilitaire quand on l’apprend à l’école : c’est celle du business, de l’emploi… Je trouve qu’elle a une belle musicalité, un rythme sympa, on peut s’amuser avec », explique Clémence Michallon, de passage à Paris. Journaliste culturelle pour plusieurs médias indépendants outre-Atlantique, la jeune femme de 33 ans baigne depuis l’enfance dans le monde anglo-saxon. Son père, avocat, l’initie très tôt aux subtilités de cet outil qu’il juge essentiel pour son avenir et celui de sa sœur.
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En famille, la petite Clémence parcourt les Etats-Unis pendant les vacances et lit ses premiers romans en version originale à l’âge de 10 ans. Un double master en journalisme, puis un voyage d’études à l’université de Columbia conclu par un heureux mariage avec un bel Américain, et voilà notre transfuge prêt pour l’exploit romantique, dix ans après son arrivée à New York : 170 000 exemplaires vendus pour son thriller, dans déjà 30 pays…
Encore fallait-il une bonne histoire. Ici, celle de May Mitchell, une adolescente kidnappée par un tueur en série. Détenue d’abord dans une cabane, pressentant à tout instant sa possible mort, celle que le prédateur a rebaptisée Rachel joue chaque jour depuis cinq ans pour sa survie, dans l’antre même de son ravisseur. Car ce dernier, devenu veuf, a dû déménager et la garde désormais au secret chez lui, où vit Cecilia, sa fille adolescente. Une orpheline qui se demande pourquoi son père a eu la folle idée d’accueillir cette étrange femme. Au même moment, dans cette ville de la vallée de l’Hudson, Emily, une barmaid amoureuse, tombe sous le charme du célibataire au comportement insoupçonné. « C’était passionnant de réunir ce chœur de voix féminines, poursuit Clémence Michallon. Cela m’a permis de montrer toutes les facettes du tueur sans lui donner la parole. Chacun possède des informations sur lui-même auxquelles les autres n’ont pas accès. »
Un livre écrit pendant le confinement
Son livre, écrit pendant la pandémie de Covid-19, alors qu’elle était coincée dans la maison de campagne de sa belle-famille, s’inspire d’un documentaire sur le tueur psychopathe Ted Bundy. Ou, plus précisément, sur le livre témoignage de son épouse, la première à avoir douté de son mari après la diffusion de son sketch. Mais ses avertissements n’ont pas été pris au sérieux, car M. Bundy ressemblait à un citoyen comme les autres. “Souvent, lorsqu’un homme est accusé de viol ou de meurtre, sa première excuse est : “Mais j’ai une femme, j’ai une fille !” Mais cela n’empêche en rien ces actes atroces. Je ne crois pas au monstre. Ces grands criminels sont avant tout des gens ordinaires. »
L’auteur, en revanche, ne risque pas d’être victime de l’anonymat. D’autant qu’Anthony E. Zuiker, le créateur des “Experts”, va prochainement adapter son livre en série. Pas question pour autant pour la nouvelle citoyenne américaine de se reposer sur ses lauriers. Au lieu de cela, elle termine un thriller se déroulant dans un hôtel isolé de l’Utah. Une histoire où l’on verra des soupçons empoisonner les relations entre une sœur et un frère ayant grandi dans une secte. Nul doute qu’une nouvelle fois, Clémence Michallon saura faire vibrer tout le monde.