A Brive, un secteur en alerte face à l’essor du marché du livre d’occasion

A Brive, un secteur en alerte face à l’essor du marché du livre d’occasion
A Brive, un secteur en alerte face à l’essor du marché du livre d’occasion

Après un panel de 2023 consacré à l’intelligence artificielle, on se dirige vers la seconde main. Le temps d’une matinée, sept représentants du marché du livre sont intervenus lors du 9e rencontres professionnelles à la Foire de Brive 2024 autour du phénomène grandissant des d’occasion : « La révolution de la seconde main : quels impacts pour la création et le marché du livre ? », tel était le thème de la table ronde animée samedi 9 novembre par Fabrice Piaultancien rédacteur en chef de Livres hebdomadairesqui a donné la parole à Régine Hatchondoprésident du Centre National du Livre (CNL), Rachel Cordierdirecteur de l’Agence culturelle de la Région Nouvelle-Aquitaine (ALCA), Renaud Lefebvredirecteur général du Syndicat national de l’édition (SNE), Geoffroy Pelletierdirecteur de Sofia, Nicolas Vielledirecteur opérationnel du groupe Gibert et Séverine Weissco-président du Conseil permanent des écrivains (CPE).

Retour au bureau de Sofia

« S’il ne fallait retenir qu’un seul numéro, c’est celui-là, » a ouvert Geoffroy Pelletier. Un livre acheté sur cinq est un livre d’occasion. » Pour lancer le débat, le directeur de Sofia a rappelé les résultats du rapport de la Société française des intérêts des auteurs écrits (réalisé avec le concours du ministère de la Culture) entièrement consacré à ce thème. Là où les biens d’occasion comblaient autrefois un vide sur le nouveau marché, notamment pour permettre aux acheteurs de se procurer des objets qui n’étaient plus sur le marché, ils sont désormais à égalité avec eux.

Voire encore progresser, à hauteur de 30 % ces dix dernières années, dans pratiquement tous les secteurs éditoriaux et catégories socio-démographiques. A la question posée au public : « Combien d’entre vous ont déjà acheté un livre d’occasion ? » La moitié de la salle lève la main. En effet, selon l’étude de Sofia, un acheteur de livres sur quatre achète également des livres d’occasion.

La littérature de genre est particulièrement touchée : un roman policier acheté sur deux est un livre d’occasion. Dans ce contexte, comment permettre aux auteurs de polars de se lancer sereinement ? » demandent les intervenants du débat.

L’opportunité cannibalise-t-elle les auteurs ?

« Les écrivains, qui se trouvent dans la plupart des cas dans une situation très précaire, ne reçoivent pas un centime de leurs achats d’occasion.insiste Séverine Weiss. Mais la seconde vie du livre ne signifie pas la mort de l’auteur. » Un problème soulevé dans une chronique signée Christophe Hardyauteur et président de la Société des Hommes de Lettres (SGDL) publié dans Livres hebdomadaires il y a quelques semaines. “Cette opportunité cannibalise le livre et ceux qui le font exister”, explique-t-il, soulignant la marge bénéficiaire réalisée par les plateformes de vente sur la facturation des prestations de livraison.

Les librairies régionales touchées

Même son de cloche à l’échelle régionale. ” Dans nos librairies, le temps est plutôt très gris », juge Rachel Cordier, malgré la richesse de la Nouvelle-Aquitaine, qui compte plus de 200 maisons indépendantes sur son territoire.

Les libraires sont également fragilisés par la reconfiguration du modèle de vente. La directrice d’Alca étaye ses propos d’une enquête par questionnaire réalisée par l’agence pour mesurer l’impact du marché de l’occasion sur les librairies. Plus de 65 % des personnes interrogées font état d’une baisse de leur trésorerie de plus de 8 % en moyenne entre mars et avril 2024. Pour Rachel Cordier, « ces chiffres traduisent également une baisse du panier moyen, marquée à l’échelle régionale car le pouvoir d’achat diminue » et ce, même si le profil des acheteurs s’est élargi à l’échelle nationale.

Pour autant, comme le soulignent les membres du panel, pas question de dresser un portrait incriminant, ni de déclarer la guerre aux revendeurs. ” Nous demandons que la question soit inscrite à l’ordre du jouraffirme Geoffrey Pelletier, et que les pouvoirs publics le prennent au sérieux. Mais nous devons tout faire ensemble, neuf et usagé, main dans la main. »

 
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