un livre sur la naissance du mouvement féministe à Toulouse

un livre sur la naissance du mouvement féministe à Toulouse
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l’essentiel
L’universitaire toulousaine Justine Zeller, docteur en histoire contemporaine, publie dans la collection « That Year », un ouvrage sur la création de la Maison des femmes à Toulouse en 1976 et sur la dynamique du Mouvement de Libération des Femmes (MLF) dans la Ville Rose. . Entretien.

Quelle histoire raconte la création de la Maison des femmes à Toulouse ?

La Maison des Femmes qui ouvre ses portes le 9 octobre 1976, rue des Couteliers, fut un lieu très important du Mouvement de libération des femmes (MLF), mouvement féministe autonome et non mixte apparu à l’échelle nationale et locale en 1970. Elle émergea dans un contexte où des maisons ou centres de femmes s’ouvrent dans tout le pays, voire dans plusieurs Etats européens et dans une période où le MLF de Toulouse se diversifie au niveau théorique et pratique. Ainsi, même si sa création est passée relativement inaperçue localement, le lieu reste difficile d’accès et des désaccords surgissent entre militantes, il est connu des féministes et marque un tournant dans le mouvement local, national, voire international.

« Une maison festive et sécuritaire »

Quelle place occupait-il au quotidien ?

La Maison des Femmes est un lieu festif et sécurisant, un « cocon dans un monde d’agression et de violence » comme l’expliquent certaines militantes. C’est un lieu de vie quotidienne puisque ses militants discutent, débattent, mangent, dansent, bricolent et jardinent ensemble. Ils y ont par exemple fondé un groupe « campagne, montagne, marche ». C’est aussi un espace de réflexion et de lutte autour de « la sexualité, la politique », « le viol, la violence », etc. Dans la lignée des théories différentialistes, les militants réfléchissent à la question « Qu’est-ce qu’une femme ? » et porte un intérêt particulier pour le cinéma et la vidéo. Ils analysent des films ou vidéos réalisés par et pour des hommes et mettent en avant ceux réalisés par et pour des femmes. Certaines d’entre elles fondent, en 1977, le Ciné-club de la Maison des femmes de Toulouse, ciné-club qui perdure jusqu’en 1993. L’écriture est aussi un moyen d’expression privilégié. Les militants ont par exemple leur propre magazine, La Lune Rousse, dans lequel chacun s’exprime individuellement ou collectivement sans aucune censure.

Un haut lieu du mouvement lesbien

En 1976, Toulouse était-elle à l’avant-garde du Mouvement de libération des femmes ?

Les groupes féministes toulousains étaient et sont toujours très actifs au niveau local, national et international. Très tôt, les militants du MLF ont défendu l’importance et les spécificités de leur mouvement, à l’image de Marie- Brive, l’une de ses grandes figures, qui déclarait en 1992 que Toulouse était [encore] figure d’un lieu privilégié d’un mouvement de femmes indépendant, multiple, diversifié, qui, au prix d’enjeux sévères, continue de vivre… avec deux cafétérias, un établissement pour femmes en difficulté, l’APIAF, un ciné-club et des rencontres culturelles et politiques … À partir des années 1990, la ville est également devenue un foyer du mouvement lesbien. Il existe néanmoins une survisibilité du mouvement parisien : même si les travaux sur les mouvements régionaux se sont multipliés ces dernières années, les travaux restent plus nombreux et ses militants sont parfois médiatisés.

Comment expliquer la disparition de la Maison des femmes, il y a déjà 25 ans ?

Deux causes principales expliquent la fermeture de la Maison des Femmes de la rue des Couteliers en 1982. C’est une période durant laquelle François Mitterrand est élu président de la République, qui marque l’épuisement des utopies révolutionnaires et l’institutionnalisation croissante du féminisme. D’une part, comme d’autres groupements, maisons ou centres de femmes durant la période, le lieu enregistre une baisse de fréquentation au début des années 1980. Certains militants hétérosexuels s’en sont désengagés en réaction à « l’homocentrisme » devenu hégémonique ou parce que cet espace n’est pas toujours ou plus en adéquation avec le mode de vie des militants souhaitant s’y investir parce qu’ils ont des enfants ou un travail à temps plein. . D’autres espaces, moins politisés et plus ouverts au reste de la société civile, comme les librairies, les ciné-clubs, les cafés, les bars ou les restaurants, apparaissent et deviennent plus attractifs pour les féministes, notamment pour les plus jeunes. générations. En revanche, la fermeture du lieu est soudaine et forcée. En effet, par arrêté municipal, le bâtiment a été déclaré insalubre et doit être démoli. L’association tente néanmoins de poursuivre ses activités. Les militantes resserrent les rangs avec d’autres groupes féministes toulousains et développent un réseau féministe régional. Ils ont également trouvé de nouveaux locaux situés rue Riquet. Mais leurs activités deviennent de moins en moins nombreuses et le lieu ferme définitivement ses portes en 1985. L’association perdure encore jusqu’en 1993, date à laquelle le Ciné-club de la Maison des femmes de Toulouse ferme définitivement ses portes.

Des « vagues » féministes

Qu’est-ce qui a changé dans le militantisme féministe ?

Pour parler de l’histoire du féminisme, on utilise souvent le terme de « vagues féministes ». Ils sont quatre. Le MLF est un mouvement central de la deuxième vague féministe des années 1970 et 1980 et il existe des similitudes et des différences notables avec les mouvements et associations des troisième et quatrième vagues. Certaines revendications subsistent encore aujourd’hui puisque, comme l’annonçait Simone de Beauvoir dans Le Deuxième sexe en 1949, « les droits des femmes ne sont jamais acquis », ainsi que certains répertoires d’action comme les manifestations ou la tenue de groupes de discussion. Par exemple. Cependant, les revendications, les actions et les modes de fonctionnement des groupes ou associations se sont également diversifiés et enrichis avec par exemple la diffusion des féminismes dans l’espace numérique ou le renforcement des féminismes inclusifs et intersectionnels.

« 1976, Aux sources du MLF, l’ouverture de la Maison des Femmes », éditions Midi Pyrénéennes

 
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