un jury qui ne manque pas de mordant

un jury qui ne manque pas de mordant
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Comme chaque année, ils étaient sept à venir débattre dans les locaux du groupe Bayard, à Montrouge, afin de couronner un premier roman écrit par un auteur de plus de 50 ans. Pour la première fois, nous n’avions qu’un seul homme dans le jury. Il faut dire que, parmi la soixantaine de candidatures, seuls deux lecteurs se sont proposés. Ce qui est finalement assez représentatif des amateurs de romans dans la population française. Nathalie avait mis près de trois heures pour venir de Sens en voiture à cause des embouteillages. Catherine est arrivée de Saint-Malo, Annick de Dijon, Dominique de Lille, Étiennette de Saint-Étienne et Anne-Marie de Cergy-Pontoise. Seule Marie-José venait de Paris. Tout le monde était heureux d’être venu jusqu’ici pour parler des six livres qu’ils avaient lus.

Opinions tranchées, vote secret… Que s’est-il passé et qui a remporté le Prix des Lecteurs 2024

Chaque titre avait son défenseur et il était fascinant de voir qu’une même œuvre était capable de susciter à la fois l’enthousiasme et le rejet. Les phrases, dynamiques selon les uns, pouvaient paraître hachées aux autres, et la douceur d’une ambiance devenait synonyme d’ennui. Le seul représentant masculin s’est montré le plus fier en soutenant Vénus avec parapluie. Nathalie, qui a fait toute sa carrière dans la police, a également défendu le thriller Marques déposées (tout comme Annick, grande fan du genre) que CHIEN, qui se déroule dans la gendarmerie. Catherine, fan de la plume de Céline, aurait aimé couronner le cruel Évreuxalors que Le professeur d’anglais a été favorisée par Marie-José. Pour ce qui est de Bombay, il a fasciné de nombreux lecteurs. Si les avis ont été assez tranchés, la courtoisie est restée de mise tout au long des débats. Et les discussions ont permis de faire ressortir un des romans. Lors du scrutin secret, la majorité absolue des quatre voix s’est ainsi prononcée, sans grande surprise, dès le premier tour, en faveur de CHIEN de Clémentine Dabadie. Les membres du jury ont ensuite pu téléphoner à la gagnante pour la féliciter et lui poser leurs questions en direct. Un moment joyeux qui a clôturé cette expérience unique d’obtention d’un prix littéraire.

Le jury

Photo, par g. À droite. au 1er rang :

Nathalie Rubas, Dominique Dupont, Anne-Marie Girard, Marie-José Rogard. 2e rangée : Annick Desprey, Marie Auffret, directrice de la rédaction, Étiennette Cabridenc, Stéphanie Janicot, journaliste littéraire, Catherine Delisle, Anne Brinet, assistante de rédaction

Le Prix des Lecteurs de Notre Temps 2024 est décerné à Clémentine Dabadie pour « CHIEN »

Une jeune fille rêve d’intégrer le GIGN, la formation d’élite de la gendarmerie. Entrainée dans une histoire menaçante, elle va découvrir que son père, lui-même policier, menait des activités bien mystérieuses…

CHIEN, de Clémentine Dabadie, éd. Gallimard, 304 p., 20 €.

Pourquoi les jurés ont choisi « CHIEN », de Clémentine Dabadie

Nathalie Rubas, 58 ans, Sens

Nathalie Rubas, 58 ans, Sens

« J’ai adoré ce livre plein de rebondissements. On en apprend beaucoup sur le GIGN et ses missions particulières, tout en conservant un contexte familial et une intrigue bien ficelée. »

Anne-Marie Girard, 76 ans, Cergy

« À cause du titre, je m’attendais à une histoire de chien et cela ne m’a pas plu. Mais, finalement, CHIEN est l’acronyme de l’héroïne ! Courageuse et très actuelle, elle m’a fait ressentir beaucoup d’émotions.

Les autres romans en compétition

> « Marques », par Cécile Baudin

Fin du XIXe siècle : des jumeaux placés dans deux orphelinats différents sont assassinés à l’âge de 20 ans, dans deux lieux différents… Une famille lyonnaise, propriétaire de filatures, semble avoir des activités louches… L’enquête, menée par un inspecteur du travail déguisé en tant qu’homme, cela s’annonce difficile.

Marques déposées, de Cécile Baudin, éd. Presses de la Cité, 432p., 20,90 €.

Pourquoi Étiennette Cabridenc a aimé « Marques »

« L’intrigue fascinante nous ramène à l’époque de la révolution industrielle. Ce livre regorge d’informations sur les orphelinats et le travail des enfants à cette époque.

L’avis d’Étiennette Cabridenc, 64 ans, Saint-Étienne

« L’écriture, bien que riche de détails en tout genre, ne fatigue pas le lecteur car les descriptions des personnages, des paysages et des conditions de travail sont savamment entrecoupées de dialogues. »

> « Vénus au parapluie », de Thibaud Gaudry

Un petit coin de parapluie offert par un inconnu dans une file d’attente au cinéma, et le narrateur y voit un coin de paradis. Il fantasme : la revoir, y retourner et, qui sait, vivre une belle histoire… ou pas.

Vénus avec parapluie, de Thibaud Gaudry, éd. Buchet-Chastel, 176p., 18,50 €.

Le choix de Dominique Dupont, 79 ans, Lille

L’accumulation de métaphores originales, voire farfelues, pour évoquer les émotions du coup de foudre rend le livre aussi joyeux que vivant. Et les références à des films ou à des peintures donnent à l’amour une dimension d’œuvre d’art.

> « Le professeur d’anglais », de Mathieu Pieyre

Souvenirs d’un enseignant remarquable décédé prématurément du SIDA. Vibrant hommage d’un étudiant à ces passionnés qui transmettent la joie d’apprendre.

Le professeur d’anglais, par Mathieu Pieyre, éd. Arléa, 149p., 18 €.

L’avis de Marie-José Rogard, 69 ans, Paris

« La personnalité du professeur, subtile, est bien définie… Nous rêvons tous de le rencontrer. Et si ce roman regorge de citations, elles sont si bien choisies qu’on les attend avec plaisir.

> « Bombay », de Marie Saglio

Un Anglais d’origine indienne retourne dans son pays natal pour y installer une usine de traitement de déchets. Mais tant de pauvres vivent sur et hors des décharges… Comment imposer le projet ?

Bombay, de Marie Saglio, éd. Serge Safran, 416p., 21,90 €.

L’avis d’Annick Desprey, 75 ans, Dijon

« La double culture du personnage principal nous permet d’aborder toute la complexité de l’Inde actuelle. Le style est remarquable, tissé de phrases chocs. Nous découvrons le fossé entre fondamentalistes hindous et musulmans, ainsi que la monstruosité de la décharge.»

L’avis de Dominique Dupont

« Ce livre puissant nous plonge dans la pauvreté, la saleté, la violence. J’ai beaucoup appris sur les traditions, la religion et les castes indiennes.

> « Évreux », de Denis Dercourt

Un bébé, né d’une adolescente violée par un collaborateur pendant la guerre, devient un véritable salaud calculateur. Le lecteur suit, émerveillé, les tribulations de cet antihéros.

Évreux, par Denis Dercourt, éd. Denoël, 288p., 19 €.

L’avis de Catherine Delisle, 70 ans, Saint-Malo

Le destin de ce voyou sans foi ni loi est vertigineux. Au fil des pages, nous questionnons l’humanité, le mal, la violence et une possible rédemption. Grâce au style de l’auteur – phrases courtes, chapitres courts – nous nous retrouvons partie prenante de l’histoire. Je n’ai jamais rien lu de pareil, bravo !

 
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