(Avignon) Sortir de la « tornade » déclenchée par le retentissant procès des viols en série en France sur les relations hommes-femmes et recentrer sur chaque cas : les premières plaidoiries des avocats soulignent la difficulté qui attend la défense des coaccusés de Dominique Pelicot .
Philippe SIUBERSKI
Agence France-Presse
Lire « Procès pour viol à Mazan : le défi de défendre l’indéfendable »
La « tâche est difficile », car il est « difficile de s’opposer à la pression de l’opinion publique ». “Nous sommes au milieu d’une situation où nos clients se font cracher dessus”, a déclaré Mme.e Raje Yassine-Dbiza, avocat d’un de ces 50 hommes de tous horizons, âgés de 26 à 74 ans, contre lesquels le parquet a requis 4 à 18 ans de prison.
Car si Dominique Pelicot, contre qui la peine maximale de 20 ans de réclusion a été requise, a reconnu avoir drogué son ex-femme Gisèle à son insu pendant une décennie pour la violer et la faire violer, inconsciente, par des dizaines d’hommes recrutés sur le Sur Internet, ses coaccusés ont pour la plupart assuré avoir été amenés à penser qu’ils participaient au jeu d’un couple libertin.
Une défense balayée par le parquet et qui a suscité de nombreuses critiques et manifestations, jusque devant le tribunal d’Avignon (sud) où est jugée cette affaire hors norme depuis début septembre.
“C’est avant tout le procès de l’accusé, ce n’est ni celui de la victime, ni celui du patriarcat et encore moins celui de la soumission chimique”, a plaidé M.e Yassine-Dbiza, espérant « enlever quelques années de liberté » à son client, Andy R., contre qui le parquet a requis 11 ans de prison.
“Juste à peine”
M.e Fanny Pierre, qui défend Quentin H., un gardien de prison de 34 ans, venu autrefois aux Pélicots à Mazan (Vaucluse), a décrit le « conditionnement » qu’aurait exercé Dominique Pelicot sous la forme d’un « jeu de piste ». » ayant conduit son client du parking du village à la chambre conjugale, le piégeant et retardant sa « prise de conscience ».
“Il ne conteste pas, il aurait dû partir, mais il devrait être condamné à une peine juste”, a estimé l’avocat, jugeant excessives les 11 ans de prison réclamés une nouvelle fois par le parquet.
« Ce procès nous dépasse. Je suis emporté par la tornade Pélicot», avait déjà déclaré mercredi le président Patrick Gontard. Dans un autre contexte, “le parquet n’aurait jamais requis 17 ans de prison” contre Jean-Pierre M., accusé d’avoir endormi et violé sa propre épouse avec la complicité de Dominique Pelicot, a-t-il déclaré. estimé.
“Ne nous donnons pas le rôle de réformateurs de la société française”, a-t-il déclaré devant le tribunal correctionnel, tandis que le parquet espérait que le verdict, attendu fin décembre, constituerait “un message d’espoir”. .
« Vous direz aux femmes de ce pays qu’il n’y a pas de sort à subir, et aux hommes de ce pays pas de destin à agir. Vous nous guiderez dans l’éducation de nos fils», a insisté Laure Chabaud, l’une des deux représentantes du ministère public.
« Maître absolu qui contemple son œuvre »
“Ce verdict, quel qu’il soit, pourrait ne pas suffire” pour “arrêter un monde où la violence contre les femmes est endémique”, a répondu Mme.e Olivier Lantelme, accusant le parquet d’avoir « raté ce dossier pénal » en exigeant des sanctions trop uniformes et bien trop élevées.
L’avocat, qui défend Patrick A., un sexagénaire qui affirme être allé à Mazan uniquement pour une relation homosexuelle, a dénoncé un « machiavélique » Dominique Pelicot qui « siège en maître absolu et contemple son œuvre depuis le banc des accusés ».
« A moins que cela ne donne bonne conscience à une société très malade, [son client Patrick A.] mérite d’être libéré”, non pas avec 10 ans de prison comme le demande le parquet, mais avec une peine “à un chiffre” pour qu’il ne retourne pas en prison après 15 mois de détention provisoire qui l’ont déjà mis à rude épreuve, a plaidé M.e Lantelme.
« Que ceux qui rêvent depuis 20 ans partent vivre près de Moscou, en Iran ou en Corée du Nord. Respectez ce que nous sommes, des humanistes”, a lancé l’avocate, dans un palais de justice devant lequel des militantes féministes ont hissé une banderole “20 ans pour tout le monde”.
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