Au lendemain des réquisitions réclamant l’inéligibilité de Marine Le Pen, le Rassemblement national continue d’attaquer frontalement la justice, des critiques reprises par l’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin accusé d’alimenter le discours « antisystème » de l’extrême droite.
« Soutenez Marine ! Défendre la démocratie » : le parti de la Flamme n’a pas hésité à lancer jeudi une pétition sur le réseau social pour éliminer la voix de la véritable opposition » et « contourner le processus démocratique ».
Sans préciser que selon la loi, le délit de détournement de fonds publics s’accompagne automatiquement d’une peine d’inéligibilité pour un élu.
Fronde tu RN
Au procès des assistants parlementaires, le parquet, jugeant Marine Le Pen au « centre » d’un « système organisé » visant à faire du Parlement européen la « vache à lait » du RN, a prononcé mercredi de sévères réquisitions à son encontre : cinq ans de prison dont trois avec sursis, 300 000 euros d’amende et cinq ans d’inéligibilité avec exécution provisoire – c’est-à-dire avec application immédiate même en cas d’appel – ce qui pourrait l’exclure de la course à la présidentielle si les juges suivent procureurs.
Reprenant les accents trumpistes, le député Jean-Philippe Tanguy (RN) a dénoncé des « réquisitions quasi fanatiques », le vice-président du parti Sébastien Chenu accusant le parquet d’être « au service d’une mission politique ».
Darmanin choqué…
Hormis l’extrême droite, la plupart des dirigeants de droite et du centre sont restés discrets dans leurs réactions et n’ont guère pris le chemin du RN, à l’exception notable de l’ancien ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin qui juge « profondément choquant que Marine Le Pen est jugé inéligible et ne peut donc pas se présenter avant le vote des Français.
“Si le tribunal juge qu’elle doit être condamnée, elle ne peut l’être électoralement, sans l’expression du peuple”, a-t-il déclaré mercredi entre les “élites” et l’immense majorité de nos concitoyens.
Cette position est mal perçue dans le camp gouvernemental. Le ministre de la Justice Didier Migaud, tout en refusant de commenter un cas individuel, a rappelé que « les magistrats sont indépendants » et « jugent en fonction de la loi votée par le législateur ».
…et des chocs en retour
Gérald Darmanin “n’aurait pas dû dire ça”, a déclaré plus directement le président (LR) des Hauts-de-France Xavier Bertrand qui est pourtant un de ses proches. “Ou il va au bout de sa réflexion et soumet un projet de loi pour éliminer l’inéligibilité”, a-t-il déclaré. “Mais en attendant, la loi existe, elle s’applique à tout le monde et personne n’est au-dessus des lois.”
A gauche, cette “violation du principe de séparation des pouvoirs” a été critiquée par le patron du PS Olivier Faure comme un “gros clin d’oeil gênant de la part de quelqu’un qui feint de plaindre celle dont il rêve de reconquérir l’électorat”.
“Ils ont un candidat de remplacement”
Certains élus d’Horizons, comme le maire de Nice Christian Estrosi, ont de leur côté soutenu Darmanin en appelant le Parlement « à se saisir de l’automaticité des peines d’inéligibilité », « un principe dangereux » selon eux, même si la droite et l’extrême droite ne manque pas de revendiquer cette automaticité pour la délinquance ordinaire.
“Arrêtons avec le déni de démocratie, à faire comme si le RN n’était pas capable de présenter un candidat : ils ont un candidat alternatif, il s’appelle Bardella, il n’attend que ça”, a déclaré Xavier Bertrand.
(AFP)
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