L’étrange cohabitation croate devrait donc perdurer. En réalité, si Zoran Milanovic était bien le leader du Parti social-démocrate (SDP), il se démarque désormais sur de nombreux points de son ancien parti, affichant une ligne très critique à l’égard de l’Union européenne et de l’OTAN. Le chef de l’Etat s’oppose également à la fourniture d’armes et de munitions à l’Ukraine, campée sur une ligne proche de celles des gouvernements hongrois ou slovaque.
Mais en Croatie, c’est le Parlement et le Premier ministre qui décident de la politique poursuivie, les pouvoirs du président étant très limités. Zoran Milanovic doit donc se contenter d’un ministère de la parole, fonction tribunitienne qu’il ne manque pas d’exercer, notamment à l’égard de son autre obsession, les migrants.
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La route des Balkans
La Croatie est en effet une étape majeure de la « route des Balkans » qui, depuis la Turquie et la Grèce, conduit les candidats à l’exil vers l’Europe occidentale. Ils arrivent en Croatie via la Serbie ou la Bosnie-Herzégovine et tentent de passer la frontière en Slovénie, pour ensuite rejoindre l’Autriche ou l’Italie. Les flux majeurs se concentrent dans les régions montagneuses et peu peuplées de Lika et Kordun : c’est le secteur où la Slovénie est la plus proche du saillant de Bihac, au nord-ouest de la Bosnie-Herzégovine.
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La Croatie a rejoint l’espace Schengen il y a deux ans, le 1er janvier 2023, même si sa police a fait l’objet de très vives critiques de la part des ONG mais aussi du Conseil de l’Europe pour ses pratiques violentes et sadiques de refoulement des exilés, violant souvent les conventions internationales et Réglementation européenne en matière d’asile et de migration. Ces pratiques n’ont guère évolué, mais les traversées vers la Croatie ont considérablement diminué en 2024, les routes migratoires connaissant une restructuration permanente : 26 534 entrées irrégulières ont été enregistrées durant les dix premiers mois de l’année par la police, soit trois fois moins que l’année précédente.
Des migrants à peine visibles
A peine 3,6% de ces migrants demandent l’asile en Croatie, 96,4% d’entre eux sont donc uniquement en transit vers un pays tiers, et ils sont largement « invisibles » lors de leur traversée du pays, contraints de se cacher pour éviter la police ou encore des résidents hostiles. . Le sociologue Izvor Rukavina de Zagreb souligne que «« La visibilité des migrants et leurs contacts avec la population locale continuent de diminuer, ce qui accroît encore leur dépendance à l’égard des réseaux criminels. »
Malgré cela, le président Milanovic, tout comme les candidats d’extrême droite ou celui présenté par le très catholique mouvement Most, réclame plus de « fermeté » envers les déracinés, avec une nouvelle obsession : les quelque 17 000 demandeurs d’asile que l’Allemagne veut leur envoyer. retour en Croatie, le premier pays de l’espace Schengen dans lequel ils sont entrés.
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Déménager en Bosnie ?
En 2023, 328 saisines ont été réalisées. En 2024, l’Office fédéral des migrations et des réfugiés avait déposé 16 704 demandes d’expulsion vers la Croatie, dont 401 avaient été exécutées fin novembre. La tendance devrait néanmoins se confirmer et s’intensifier dans les prochains mois. Face à cela, la Croatie, dont les centres collectifs ont des capacités d’accueil limitées, n’aurait qu’une seule possibilité : « relocaliser » les demandeurs d’asile vers les pays voisins, en l’occurrence la Bosnie-Herzégovine, un choix qui entre en résonance avec la volonté de la Commission européenne de créer « des points chauds » hors des frontières de l’Union, malgré l’échec du projet italien de « relocalisation » en Albanie.
Lors de la campagne pour le premier tour de cette présidentielle, seule la candidate de la gauche écologiste, Ivana Kekin, créditée de 7 à 10 % des intentions de vote, a refusé de s’engager sur la pente glissante de l’asile et de l’exil. .