C’est, selon Jeremy Laurence, porte-parole du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, « l’une des attaques les plus meurtrières à Gaza depuis près de trois mois ». Mardi 29 octobre, une frappe israélienne a rasé un bâtiment où se réfugiaient des dizaines de Palestiniens, à Beit Lahia. Alors que le bâtiment abritait la famille élargie d’Abou Nasser, selon les publications de proches et de témoins interrogés par la presse, le nombre de morts approcherait, selon différents décomptes, la centaine de victimes, dont un quart d’enfants. . Ce qui en ferait même l’un des pires résultats, pour une seule frappe, en un an de bombardements dans l’enclave.
En réaction à cette frappe, le porte-parole du Département d’État américain, Matthew Miller, a déclaré que les États-Unis « profondément préoccupé par les pertes en vies humaines causées par cet incident. C’est un incident horrible, avec des conséquences horribles. Je ne peux pas parler du nombre total de morts, mais on rapporte que deux douzaines d’enfants ont été tués dans cet incident. Il ne fait aucun doute qu’un certain nombre d’entre eux sont des enfants qui fuient les effets de cette guerre depuis plus d’un an. Nous avons contacté le gouvernement israélien pour lui demander ce qui s’est passé ici. »
Images authentifiées
Mercredi après-midi, la France, faisant état d’un bilan de 100 morts, « a fermement condamné la frappe israélienne », tout comme celles sur les hôpitaux du Nord, de concert avec le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, qui avait auparavant déploré que « Les principes de proportionnalité et de protection des civils continuent d’être violemment bafoués. » Et d’ajouter : « Nous n’arrêterons pas de condamner ces actions et d’exiger des comptes. »
Il n’existe aucune vidéo des premiers instants de la frappe, ni de l’arrivée des secours, dont l’action est limitée dans cette zone assiégée depuis près d’un mois par l’armée israélienne. Mais de nombreuses images authentifiées, notamment par le collectif Geoconfirmed, montrent des corps extraits des décombres. D’autres sont encore coincés entre des morceaux d’édifices imposants, comme cette silhouette dont on voit la tête écrasée entre deux murs, ou ce pied noirci qui dépasse des morceaux de béton. Les restes de ce qui était un enfant sont rassemblés sur une couverture dans le bâtiment voisin. Un peu plus loin dans la rue, des dizaines de corps sont alignés les uns à côté des autres dans des linceuls. VérifierActualités en compte au moins une vingtaine.
Un bilan difficile à établir
Un témoin, interrogé par Al Jazeera, a rapporté que l’explosion a eu lieu pendant la nuit mais que les survivants ont continué à évacuer les corps à l’aube : « Les gens tentent de sauver les blessés, mais il n’y a ni hôpital ni soins adéquats. » A 8h30 (heure française), mardi, peu après les premières mentions de la frappe apparues vers 6 heures du matin, la défense civile palestinienne de Gaza a fait état d’un bilan de 55 morts, citant « des dizaines de blessés toujours sous les décombres ». Quelques heures plus tard, vers midi, le ministère de la Santé de Gaza, contrôlé par le Hamas, donnait le nombre de 93 morts et disparus, tandis qu’Al Jazeera, citant des sources médicales, faisait état de 109 morts. Toujours selon la chaîne qatarie, aucune machine n’était disponible pour extraire d’hypothétiques survivants sous les décombres. Entre 100 et 200 personnes se trouvaient dans le bâtiment avant les tirs israéliens.
Peu après la fusillade, comme c’est l’habitude à Gaza après des frappes meurtrières, une liste de martyrs a commencé à être diffusée sur les chaînes de l’enclave. On retrouve dans cette revue partielle et informelle 36 noms, tous issus de la famille Abu Nasser. VérifierActualités a retrouvé de nombreuses publications d’hommages posthumes, partagés par des proches de la défunte, comme celle-ci, où l’internaute rapporte le décès de deux de ses frères, trois de ses sœurs, douze neveux et nièces ainsi qu’un de ses beaux-frères. .
Tsahal ne parle que de blessés
Dans un communiqué diffusé le lendemain, 30 octobre en fin d’après-midi, l’armée israélienne a réagi. Selon le lieutenant-colonel Nadav Shoshani, après la mort de quatre soldats israéliens, tués dans l’explosion d’un engin explosif à Beit Lahia, une «observateur», ou encore un combattant chargé de surveiller une cible pour un autre tireur ou de déclencher un piège, aurait été repéré sur un toit. “Représentant une menace pour nos forces, il a été frappé”, poursuit le porte-parole, contestant les appréciations des autorités gazaouites et parlant uniquement des blessés : « Selon certaines informations, plusieurs civils auraient été blessés suite à cette frappe. Selon une première enquête, les chiffres présentés ne correspondent pas aux informations détenues par l’armée israélienne.
L’armée israélienne, comme lors de tout incident de ce type, n’a communiqué aucune estimation du nombre de victimes. « Certains des noms publiés dans les médias sont ceux de terroristes affiliés aux organisations terroristes du Jihad islamique et du Hamas. » Des informations qui VérifierActualités n’est pas en mesure de vérifier. « Plusieurs images partagées par les médias ont déjà été publiées et ne concernent pas cette grève. » affirme en outre le porte-parole. Sans préciser de quelles images il s’agissait. Toutes les images mentionnées en début d’article, vérifiées par VérifierActualitésconcerne la grève de mardi. Le soldat souligne enfin que Tsahal avait « a appelé les civils de la région à quitter la zone de combat », tout le Nord selon l’armée israélienne, « pour aller vers des zones plus sûres ».
«Série d’incidents meurtriers»
Malgré cet ordre “évacuation” lancé le 6 octobre 2024 aux Palestiniens du nord de l’enclave et des opérations que certaines chancelleries et instances internationales qualifient de possibles « déplacements forcés de populations », 100 000 personnes se trouvent toujours dans la région, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (Ocha).
Même si cette frappe, en raison de l’ampleur du bilan rapporté par les autorités gazaouites, a suscité de nombreuses réactions, elle est loin d’être isolée. Depuis le début du siège du nord de Gaza, mené par l’armée israélienne depuis près d’un mois, les opérations terrestres se sont doublées de bombardements particulièrement violents sur toute la zone, y compris sur les hôpitaux et les écoles. . Il y a dix jours, une grève dans le même quartier avait déjà fait des dizaines de morts. Le ministère de la Santé, contrôlé par le Hamas, a fait état de 87 morts ou disparus, un bilan que l’armée israélienne a également qualifié de “exagéré” et ne correspondant pas à ses propres chiffres (non communiqués).
Dans son rapport hebdomadaire du 29 octobre, Ocha recense sept «incidents faisant de nombreuses victimes», soit « des événements faisant de nombreuses victimes » à Gaza en une semaine, dont quatre au Nord, sans compter celui détaillé dans cet article. Dans sa précédente publication, elle dénombrait trois incidents de ce type entre le 17 et le 19 octobre. Une répétition de frappes meurtrières rappelée par le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, Tor Wennesland, déclarant : «Cette horrible grève [israélienne] s’ajoute à une récente série d’incidents meurtriers faisant de nombreuses victimes, parallèlement à une campagne de déplacements massifs, qui soulève de sérieuses inquiétudes quant aux violations du droit international humanitaire.