Un voisin si puissant | Quand les ouragans détruisent… la vérité !

Parce que tout ce qui se passe au sud de la frontière finit par avoir des répercussions ici


Publié à 1h19

Mis à jour à 6h00

« Je crois que le gouvernement pourrait modifier la trajectoire des ouragans pour sauver les citoyens ; d’autres le font, mais ils ne veulent pas le faire. Il doit y avoir une raison, peut-être parce qu’il y aura bientôt des élections. »

C’est Mila Blash qui dit des choses aussi scandaleuses. Une Floridienne rencontrée à Venice Beach par le journaliste de La presse Marie-Eve Morasse après le passage de l’ouragan Milton.

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PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE ARCHIVES

Des débris jonchent Venice Beach après l’ouragan Milton en Floride.

Je souligne que mon collègue n’a pas eu à chercher très longtemps pour trouver un adepte de cette théorie du complot, colportée notamment par la politicienne républicaine Marjorie Taylor Greene.

«Quand nous sommes arrivés sur la plage, la première personne à qui j’ai parlé, c’était elle», m’a raconté Marie-Ève.

Ce n’est pas tout.

Quelques instants plus tard, au même endroit, un homme lui dit qu’il était convaincu que « d’autres pays » avaient orienté Milton vers la Floride.

C’est fou, mais pas si surprenant. Les théoriciens du complot parlent souvent d’un nouvel ordre mondial qui menacerait la souveraineté des nations.

Je me demande si ces Floridiens pensent que ce sont les hommes-lézards qui contrôlent la machine à créer des ouragans…

Ne riez pas !

Il y a une dizaine d’années, des sondages révélaient que 4 % des Américains pensaient que la politique américaine était contrôlée par des reptiliens.

Le même sondage nous apprend également que 13 % des Américains décrivent Barack Obama comme « l’Antéchrist ».

Dans le même temps, 11 % des Américains pensaient que leur gouvernement était responsable des attentats du 11 septembre 2001.

Est-ce que cela vous décourage ? Attendez de lire la suite…

L’attrait des Américains pour les théories du complot et autres fausses croyances n’est donc pas nouveau.

En fait, elle est pratiquement inscrite dans l’ADN du peuple américain, selon le journaliste Kurt Andersen, qui a publié un essai à ce sujet un an après l’élection de Donald Trump, intitulé Pays fantastique.

« L’expérience américaine, incarnation originale de la grande idée des Lumières sur la liberté intellectuelle – chaque individu étant libre de croire ce qu’il veut – s’est métastasée de manière incontrôlable. Depuis le début, notre ultra-individualisme a été associé à des rêves épiques, parfois à des fantasmes épiques – chaque Américain étant l’un des élus de Dieu construisant une utopie sur mesure, chacun de nous étant libre de se réinventer par son imagination et sa volonté. En Amérique, les parties les plus passionnantes de l’idée des Lumières ont submergé les parties les plus sobres, rationnelles et empiriques », écrit-il.

Le ver était donc dans la pomme.

Et les dernières décennies ont fourni à ce ver les conditions gagnantes pour qu’il puisse dévorer ce fruit jusqu’au cœur.

L’apparition d’Internet et le développement des réseaux sociaux ont donné aux mensonges, caprices et autres fabrications une portée jamais vue auparavant dans l’histoire de l’humanité. Et ils ont accéléré sa diffusion.

Et puis… Donald Trump est entré en politique !

Et comme le joueur de flûte qui attire les enfants avec sa musique dans le conte des frères Grimm, le milliardaire devenu homme politique a ensorcelé certains républicains, qui ont sauté à pieds joints dans la réalité alternative qu’il a créée.

Quelles que soient les conséquences que peut avoir ce divorce avec la réalité.

Il est tentant d’imaginer, quand on entend parler de cette bataille entre mensonges et vérité ainsi que de l’ampleur de la désinformation et des théories du complot, qu’il ne s’agit que de débats théoriques dont « personne ne se soucie ». ça bat dans les bus», si vous me permettez d’emprunter cette expression à François Legault.

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PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE ARCHIVES

Les rues de Tampa ont été inondées par le passage de l’ouragan Milton.

Mais la situation aux Etats-Unis après le passage des ouragans Hélène et Milton nous prouve le contraire.

Non seulement les sinistrés refusent l’aide gouvernementale, mais certains menacent les employés fédéraux déployés sur le terrain (ceux de l’Agence fédérale de gestion des urgences, FEMA).

Ces menaces « ont entravé les opérations de secours » en Caroline du Nord, Washington Post. Car certains responsables de ces opérations ont dû être évacués des zones où ils travaillaient.

Et ces menaces ont été alimentées par des mensonges sur le rôle du gouvernement américain.

Ces derniers, selon Donald Trump, feraient « tout leur possible pour ne pas aider les habitants des régions républicaines ». Le candidat républicain a également prétendu à tort que l’administration fédérale « volait » l’argent des sinistrés pour l’offrir aux « immigrants illégaux ».

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PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE ARCHIVES

Les opérations de secours ont été compliquées dans certaines régions, notamment en Caroline du Nord, en raison de menaces proférées contre des agents fédéraux.

Je le cite parce qu’il est le chef de cet orchestre qui sonne faux. Il est cependant loin d’être le seul à se comporter en charlatan dans ce plus récent épisode de la folie de l’empire américain.

« Ce qui semble nouveau après les ouragans de ce mois-ci, c’est que ceux qui mentent n’essaient même pas de cacher d’où viennent leurs conneries. De même, ceux qui partagent les mensonges sont heureux d’admettre qu’ils ne se soucient pas de savoir si ce qu’ils disent est réel ou non », écrivait récemment le journaliste Charlie Warzel dans L’Atlantique.

Cette attitude a également été celle du candidat républicain à la vice-présidence, JD Vance, pressé de s’interroger en septembre sur le fait qu’il n’y a aucune preuve que des migrants haïtiens aient mangé des animaux domestiques dans l’Ohio.

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PHOTO CHRIS SEWARD, PRESSE ASSOCIÉE

Le candidat républicain à la vice-présidence, JD Vance, s’est rendu mercredi en Caroline du Nord pour un événement de campagne.

“Si je dois créer des histoires pour attirer l’attention des médias américains sur les souffrances du peuple américain, c’est ce que je vais faire”, a-t-il répondu.

Tout cela démontre que la situation politique et sociale de nos voisins, déjà préoccupante, se détériore encore davantage.

Le titre de l’article de Charlie Warzel résume bien l’état de la situation : « Je ne sais plus comment expliquer à quel point c’est grave. »

Encore faut-il espérer, à l’heure où les élections se profilent ici aussi, que cette folie ne soit pas trop contagieuse…

1. Lire le reportage de Marie-Ève ​​Morasse

2. Lire le texte de Charlie Warzel (en anglais ; abonnement requis)

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