70 ans après Diên Bien Phu, le Vietnam entame un nouveau dialogue avec la France

70 ans après Diên Bien Phu, le Vietnam entame un nouveau dialogue avec la France
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Retour sur l’invitation inédite et très politique d’un membre du gouvernement français aux commémorations de la plus célèbre bataille de la guerre d’Indochine.

À Viêt Namc’est l’équivalent de la prise de la Bastille : Dien Bien Ph.u, 7 mai 1954. Une victoire historique contre les occupants français, scellée grâce au nombre et à l’ingéniosité vietnamiens. On raconte encore l’histoire de ces canons d’artillerie vietnamiens, démontés pièce par pièce, transportés à pied ou à vélo à travers la jungle et remontés des centaines de kilomètres plus loin sur ordre du général. Vo Nguyen Giap, qui va noyer les soldats français sous un déluge de feu. Cette débâcle militaire contraint la France au retrait et très vite, en juillet 1954, les accords de Genève ratifient l’armistice et l’indépendance du Vietnam.

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Soixante-dix ans plus tard et pour la première fois, les autorités vietnamiennes prennent la décision d’inviter deux membres du gouvernement français aux commémorations de Diên Bien Phu : Sébastien Lecornu, ministre des Armées, et Patricia Mirallès, secrétaire d’État chargée des Anciens Combattants. François Mitterrand s’y est rendu en 1993, mais “en privé”, une manière polie d’admettre qu’il n’y avait pas été invité par le gouvernement vietnamien. Car jusqu’à cette semaine, le Vietnam n’avait jamais voulu offrir à la France une quelconque réconciliation sur le lieu culte de cette bataille encore célébrée tous les deux ans par un imposant défilé militaire.

Les relations diplomatiques ont été rétablies depuis 1973 et le climat s’est apaisé au point que Jacques Chirac et François Hollande se relaient pour effectuer des visites d’État au Vietnam au cours de leur mandat. Emmanuel Macron pourrait également emboîter le pas d’ici la fin de l’année. Mais ce n’est pas non plus le pot de l’amitié de tous les jours. Des questions très anciennes, comme le rapatriement des dépouilles des soldats français, ne sont toujours pas résolues, car le dialogue reste lent et poussif avec le régime communiste vietnamien, qui a la mémoire longue.

Et encore. Entre les lignes, on comprend que le Vietnam étudie depuis plusieurs années ses intérêts sur la scène internationale, notamment l’équilibre délicat des relations qu’il entretient tant avec Pékin qu’avec Washington. Et si la France pouvait servir de point d’appui ou de troisième voie ? Dans ce contexte, l’invitation à Diên Bien Phu revêt également une dimension politique, en cohérence avec la stratégie régionale du Vietnam, membre de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) depuis 1995.

Cette organisation, qui regroupe dix pays asiatiques, fait face aux assauts chinois en mer de Chine méridionale et s’inquiète vivement d’un affrontement sino-américain, susceptible de déstabiliser la région Asie-Pacifique. Cependant, la France a déjà signé deux partenariats stratégiques avec deux membres de l’ASEAN, l’Indonésie et les Philippines. Comme l’a dit de manière très diplomatique Sébastien Lecornu, le ministre français des Armées : « nous partageons avec le Vietnam une volonté d’équilibre et de stabilité dans la région Indo-Pacifique ». Il n’y a aucune raison de se précipiter et nous sommes encore très loin d’un tel niveau de rapprochement entre Hanoï et Paris. Mais à petits pas, nous nous dirigeons sans aucun doute vers un dialogue plus substantiel et à plus long terme entre les deux anciens ennemis.

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