Recruté par François Nourissier, cet ancien journaliste avait été pendant 20 ans, de 1998 à 2018, le pilier de l’organisation du prestigieux prix littéraire. Elle est décédée à l’âge de 80 ans.
C’est l’avocat à la Cour, Vincent Tolédano qui nous annonce la triste nouvelle. Marie Dabadie est décédée la nuit de Noël à l’âge de 80 ans. Comme il le souligne, c’était « l’infatigable secrétaire de l’Académie Goncourt, qu’elle a servi avec passion », de 1988 à 2018. François Nourissier, alors président du prestigieux prix, la recrute. Marie Dabadie était également déléguée des Ecrivains de la Marine.
Pour son entrée à l’Académie Goncourt où elle était la seule salariée, on se souvient comment tout a commencé. Feu François Nourissier, qui régnait en maître sur les prix littéraires, posait la question à Marie Dabadie, alors journaliste au chômage : « On ne va pas tourner autour du pot : voulez-vous tenir la maison ? » Étonnée, elle répondit : « Mais quelle cabane ? – L’académie Goncourt ! » celui qui était le « le pape » de l’édition.
Lire aussiMarie Dabadie, dans l’ombre du Goncourt
C’est ainsi que cette élégante femme qui avait officié à Vêtements pour femmes au quotidien, la bible de la haute couture, se retrouve embarquée dans l’aventure Goncourt. C’était en 1998. Pendant vingt ans, Marie Dabadie fut la seule employée de cette prestigieuse institution née en 1903. Son titre de secrétaire cachait des fonctions multiples, variées et essentielles. Il faudrait dire « administrateur », car, en fait, elle a fait beaucoup : le secrétariat, la communication, le décompte des votes – très important -, la gestion des nombreux déplacements, et même la garde du corps le jour de la désignation de l’heureux gagnant – elle C’est elle que l’on voyait chaque année, au milieu de la foule hystérique, tenter de guider le gagnant jusqu’au premier étage du restaurant Drouant. Aujourd’hui, Françoise Rossinot pratique l’exercice difficile avec la même délicatesse et la même fermeté. Vous avez besoin des deux.
Un rôle primordial
Marie Dabadie a été incontournable durant ce trimestre qui débute par la première sélection des prix littéraires les plus convoités jusqu’à sa proclamation début novembre. C’est son apogée d’activité, même si le travail de secrétariat demande des efforts toute l’année. Elle vivait au cœur du quartier historique des maisons d’édition. Dans son salon, partout où l’on regardait, il y avait des romans et des romans. De la rentrée littéraire bien sûr, certains en plusieurs exemplaires. Elle a tout reçu, comme les jurés.
Elle a assisté à toutes les délibérations, et a été la première à lire les rapports des jurés – une centaine entre fin juin et fin août. Elle avait noué des liens forts avec la présidente de l’époque, Edmonde Charles-Roux, puis avec Bernard Pivot.
Lire aussiPrix Goncourt : Jean-Baptiste Andrea, l’optimiste récompensé
On n’imagine pas à quel point son rôle était essentiel, tout comme celui de Françoise Rossinot. Il faut dire, pour ceux qui ne connaissent pas la cuisine interne des prix, que, malgré la forte notoriété de ces lauriers et leur immense enjeu économique, le jury n’est composé que de bénévoles, et nous communiquons du mieux que nous pouvons.
L’expérience de cette femme, mère des deux fils qu’elle a eu avec Jean-Loup Dabadie, a été un atout pour les Goncourt, dont la mission ne s’arrête pas à la seule rentrée. Ils se retrouvent toute l’année, chaque premier mardi du mois à Drouant pour le Goncourt du premier roman, présenté en mars, qui prend de plus en plus d’importance, également pour le Goncourt de biographie, de nouvelles, de poésie. Le prix est désormais exporté.
Un pas vers la réalisation
Son expérience de journaliste l’a certainement aidé. Après l’expérience vêtements pour femmes, Marie Dabadie a créé l’édition américaine deRésumé architectural, spécialisé dans l’art et le design (dans ce mensuel, un écrivain décrivait sa maison idéale). Elle co-dirige ensuite une société de production avec Danièle Delorme pour « garder une trace des artistes », a-t-elle souligné. Elle s’est également essayée à la réalisation et, par exemple, a donné des conseils sur un documentaire sur les coulisses de la libération de Mandela. Un parcours aux activités extraordinairement multiples.
Fille de Pierre-Étienne Guyot, premier président du Paris Saint-Germain, elle préfère le cyclisme, le rugby et le piano, qu’elle pratique assidûment. Et elle avait été infidèle à Goncourt. Elle a dirigé de main de maître l’association des Ecrivains Marins, créée par Jean-François Deniau, son ex-compagnon. Elle avait été nommée, un titre dont elle était fière : « capitaine de frégate de la réserve citoyenne « .
Bio-Express
1964 : Responsable du bureau parisien du quotidien de mode Vêtements pour femmes au quotidien (WWD).
1981 : Codirige la société de production Témoins avec Danièle Delorme.
1987 : Lance l’édition française du magazine américain Résumé architectural (ANNONCE).
1998 : Devient secrétaire de l’Académie Goncourt.
2007 : Délégué à l’association Les Écrivains de marine.
Related News :