L’IA va bouleverser la gestion de l’hypertension

L’IA va bouleverser la gestion de l’hypertension
L’IA va bouleverser la gestion de l’hypertension

« Pouvez-vous analyser ces résultats d’examen et me donner votre analyse ? demande le cardiologue à son assistant médical sur ChatGPT. Je tiens à vous préciser que ce patient hypertendu est un homme de 72 ans. Il prend du périndopril 4 mg le matin et de l’amlodipine 5 mg le matin en traitement. Je vous copie les éléments complets de son dossier ». Les assistants conçus par l’intelligence artificielle pour aider les médecins, notamment les cardiologues, se multiplient partout. Ils n’ont pas pour vocation, pour l’instant en tout cas, d’être des alternatives à la consultation médicale, mais visent à être une aide aux médecins et aux patients.

Dr François Silholcardiologue (hôpital de la Timone à Marseille) lors 44èmes journées de la société française de l’hypertension artérielle qui viennent de se tenir à Paris, ont montré comment l’Intelligence Artificielle allait transformer tout le domaine de la prise en charge de l’hypertension artérielle.

La prise en charge traditionnelle de l’hypertension en et dans les pays développés est généralement un échec.

Intelligence artificielle : vers une nouvelle ère

L’intelligence artificielle est actuellement davantage une intelligence simulée. Cela implique d’alimenter les logiciels avec des centaines de milliers de données pour reproduire le raisonnement humain.

Mais bientôt cette intelligence simulée laissera place à une toute autre IA : l’intelligence générative (AGI) dont l’objectif est de générer le raisonnement humain, voire de le surpasser. Pour les grands acteurs de l’IA, le marché de la santé constitue une opportunité majeure et chaque entreprise souhaite devenir un acteur incontournable de ce secteur, notamment OPEN AI avec ChatGPT 4.0, Amazon avec Nova qui a déjà mis en place un système de distribution de médicaments personnalisés, Anthropic avec Claude 2, Microsoft avec LAMA 2, Google avec Gemini 2… Au-delà de ces entreprises privées, les grands États se disputent les investissements pour assurer leur indépendance stratégique.

L’hypertension : un problème majeur de santé publique

Quel rôle l’IA peut-elle jouer dans l’hypertension artérielle ?

« La prise en charge traditionnelle de l’hypertension en France et dans les pays développés est globalement un échec », a d’emblée souligné François Silhol. Sur 14 millions de patients hypertendus, seuls 7 millions sont dépistés et parmi eux, la moitié seulement atteint l’objectif de tension artérielle. Au total, plus de 10 millions de patients hypertendus ne sont pas en bonne santé ou ne savent même pas qu’ils sont malades. »

Une hypertension artérielle (hypertension) non traitée vous expose à des complications graves, notamment un risque accru de cardiopathie ischémique (multiplié par 2 à 3), d’insuffisance cardiaque (risque x2), d’accident vasculaire cérébral (x4) et d’anévrisme. C’est également un facteur de risque majeur de démence, augmentant son incidence de 60 %, liée aux micro-lésions cérébrales et aux troubles vasculaires.

« Trois écueils principaux doivent être levés si l’on veut mieux contrôler cette maladie : le dépistage, la mesure de la tension artérielle (incorrecte dans 60 % des cas) et enfin l’observance thérapeutique », précise François Silhol.. Les objectifs de tension artérielle sont basés sur des recommandations solides. Pour la plupart des patients, la pression artérielle systolique (PA) doit être comprise entre 120 et 130 millimètres de mercure et la pression artérielle diastolique doit être comprise entre 70 et 80 mm hg.

Comment l’intelligence artificielle peut-elle nous aider ?

Concernant le dépistage, un logiciel d’IA performant a été développé pour prédire le risque d’hypertension chez un individu donné, en tenant compte de son âge, de ses facteurs de risque et de ses antécédents familiaux. L’objectif est d’identifier et de cibler les patients qui devraient bénéficier d’une surveillance régulière de leur tension artérielle, avant même de devenir hypertendus. D’autres modèles de prédiction de l’hypertension sont également en cours de développement, notamment chez la femme enceinte.[1].

Aidé par un informaticien, j’ai développé un assistant HTA.

Un autre sujet est la mesure de la pression artérielle. « La mesure de la tension artérielle est souvent imparfaite, notamment en consultation avec le risque d’effet blouse blanche. Elle repose sur une technique oscillométrique avec des brassards gonflés au bras ou au poignet, poursuit le Dr Silhol. Mais les choses changent. » L’homologation vient d’être donnée à un nouveau dispositif suffisamment précis, sous forme de bracelet, qui utilise la technique de la photopléthysmographie. Autrement dit, il mesure la lumière réfléchie par la peau pour évaluer les variations des volumes sanguins. Grâce au deep learning, l’IA analyse les images provenant de son capteur et détermine la pression artérielle en fonction des ondes de pouls, ainsi que la fréquence cardiaque. L’avantage de ce bracelet est qu’il ne serre pas le bras, le patient ne ressent rien lors de la mesure de la tension artérielle. Cela peut prendre jusqu’à 800 mesures par jour. C’est aussi un moyen de prendre en continu la tension artérielle de manière très fiable. Bien entendu, la pertinence de ces dispositifs doit être validée par la SFHTA et les organismes de réglementation avant de pouvoir être utilisés en France.

Le troisième point à améliorer est l’observance thérapeutique qui dépend autant de la motivation du patient que de celle du médecin qui doit consacrer du temps à l’éducation thérapeutique. Mais les médecins disposent de moins en moins de ce temps : moins de praticiens, plus de patients, génèrent souvent des consultations plus courtes où le praticien se concentre sur l’essentiel. Grâce à l’intelligence artificielle, des assistants numériques ont été déployés.

«C’est ce que j’ai fait. Aidé par un informaticien, j’ai développé un assistant HTA. La première étape a été d’alimenter le logiciel avec toutes les publications les plus importantes concernant l’hypertension des dix dernières années, poursuit François Silhol. Nous avons ensuite programmé cet algorithme d’intelligence artificielle sur ChatGPT, pour qu’il soit éthique et centré sur les intérêts du patient et du médecin pour l’aider dans ses recherches. »

Le patient peut ainsi interroger l’assistant numérique qui est un clone numérique de son médecin. «J’ai une baisse de tension artérielle. Dois-je arrêter mon traitement ou le réduire ? Ou encore : « Je suis hypertendu et diabétique, mon médecin me prescrit une association de deux médicaments, voici les résultats de mes automesures, sont-ils bons ? » ? « . Le médecin peut également interroger l’assistant ETS sur de multiples sujets : « Quels sont les diagnostics possibles pour cet holter tensionnel ? Quel traitement pouvez-vous proposer à ce patient insuffisant rénal qui reste hypertendu ? Pouvez-vous expliquer clairement au patient pourquoi et comment respecter les règles sanitaires et alimentaires et l’importance de suivre un traitement médical ? »

Dans un avenir très proche, le patient pourra discuter avec un clone de son médecin, aussi longtemps qu’il le souhaite et immédiatement, de sujets souvent longs et répétitifs pour le médecin, notamment l’éducation thérapeutique.[2]

« Pour les médecins traitants, l’assistant HTA peut aider à identifier les premiers signes d’hypertension artérielle en analysant les données cliniques et les antécédents médicaux. Des algorithmes permettent de suivre l’évolution de la tension artérielle à partir des données collectées par les appareils de mesure à domicile, permettant ainsi d’ajuster le traitement en conséquence, explique François Silhol. L’assistant HTA peut recommander des adaptations du traitement en fonction des facteurs de risque individuels et des comorbidités. »

Pour le cardiologue, l’assistant hypertension est capable d’analyser documents, scanners, ECG, échographie cardiaque, et peut faire des recommandations pour la prise en charge des patients souffrant d’hypertension résistante.

Un cadre juridique est essentiel pour que l’IA reste une aide aux médecins et à leurs patients.

Enfin, en matière de recherche clinique, l’intelligence artificielle permet d’analyser de grandes quantités de données en un temps record pour orienter la recherche clinique vers de nouvelles stratégies thérapeutiques.

Un avenir prometteur, mais des enjeux éthiques majeurs

Des bouleversements majeurs vont modifier la pratique de la médecine à court et moyen terme. Actuellement l’IA, pour les médecins qui s’y intéressent, est une aide, mais demain quand elle entrera dans sa phase AGI (intelligence générative), elle pourrait peut-être la remplacer. Dès lors, d’autres questions essentiellement éthiques vont se poser, notamment celle de la responsabilité médicale. Si un patient prend un traitement recommandé par l’IA et présente une intolérance ou un effet secondaire qui sera responsable ? Le médecin servira-t-il uniquement à valider les conclusions de l’IA ? A l’inverse, un médecin n’utilisant pas l’IA sera-t-il pénalisé par son assurance responsabilité médicale ? « On voit bien qu’au-delà de l’émergence de ce nouvel acteur, un cadre juridique est indispensable pour que l’IA reste une aide pour le médecin et ses patients », conclut le Dr François Silhol, « mais une aide maîtrisée pour que le les intérêts du patient et sa relation de confiance avec son médecin sont préservés. »

Liens d’intérêt : Aucun.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Calendrier vaccinal 2025 : mobilisation renforcée contre les méningocoques
NEXT Le ministre de la Santé s’attend à un pic épidémique de grippe « d’ici dix jours » : Actualités