Si les relations humaines sont souvent complexes, chez les moustiques, la séduction vient d’un simple battement d’ailes. Les mâles Aedes aegyptiDe redoutables vecteurs de maladies comme la dengue et le zika, détectent les femelles en écoutant leur bourdonnement caractéristique, dû au battement rapide de leurs ailes.
Cependant, une étude récente de l’Université de Californie à Santa Barbara publiée dans PNAS révèle qu’un moustique sourd perd tout intérêt pour l’accouplement. Cette découverte pourrait ouvrir la voie à de nouvelles méthodes de lutte contre ces insectes.
Surdité : un simple gène modifié et la libido disparaît
Pour étudier le rôle de l’audition dans le comportement des moustiques, l’équipe du professeur Craig Montell a utilisé la technologie CRISPR pour supprimer un seul gène, trpVa, chez les mâles Aedes aegyptiles rendant ainsi totalement sourds.
Ce gène contrôle un canal sensoriel présent dans leur organe de Johnston, situé à la base des antennes, essentiel pour détecter les vibrations des battements d’ailes des femelles. Le résultat est surprenant : privés de leur capacité auditive, ces mâles ne montraient aucun signe d’intérêt envers les femelles.
“Vous pouvez les laisser ensemble pendant des jours, ils ne s’accoupleront pas.”commente Craig Montell.
Quand le son fait toute la différence
Normalement, parmi Aedes aegyptil’accouplement se déroule comme un ballet sonore. Les femelles battent des ailes à une fréquence de 500 Hz, déclenchant une réponse chez les mâles, qui modulent leur propre bourdonnement à 800 Hz pour les attirer.
Cette rencontre aérienne ne dure que quelques secondes, avant que chaque partenaire reprenne sa route. Mais sans cette « musique » spécifique, les mâles ne s’intéressent plus aux femelles.
Les expériences de Montell et son équipe montrent que le son joue un rôle essentiel, bien plus qu’un simple détail, pour susciter le désir chez ces insectes. Lorsqu’ils diffusaient artificiellement le bruit des ailes des femelles, les mâles entendants réagissaient immédiatement, tandis que les mâles sourds restaient impassibles.
Curieusement, cette perte auditive avait peu d’effet sur les femelles, qui restaient néanmoins disposées à s’accoupler.
Un moyen de limiter les épidémies ?
Chaque année, les maladies transmises par les moustiques infectent des centaines de millions de personnes. Une façon de freiner leur prolifération repose sur la technique de l’insecte stérile (SIT), où des mâles stériles sont relâchés en grand nombre pour s’accoupler avec des femelles, empêchant ainsi la reproduction.
Cependant, cette méthode ne fonctionne que si les mâles stériles parviennent à séduire les femelles, ce qui constitue souvent un défi pour les mâles sauvages.
L’étude du gène trpVa ouvre des perspectives intéressantes. En assourdissant certains hommes ou en modifiant leur comportement auditif, il pourrait être possible de les rendre plus compétitifs et d’augmenter l’efficacité de l’ITS. Selon Craig Montell, cibler la biologie du son chez les moustiques pourrait contribuer à limiter leur reproduction et, à terme, leur rôle dans la transmission des maladies.