« Nous exigeons justice pour les patients dont la vie a été gravement affectée »

« Nous exigeons justice pour les patients dont la vie a été gravement affectée »
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l’essentiel
Le scandale sanitaire de la pilule antihormonale Androcur au coeur d’un procès entre les victimes et l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).

Emmanuelle Huet-Mignaton est présidente de l’association AMAVEA chargée d’aider les victimes d’Androcur. Commercialisée en 1980 par le laboratoire allemand Bayer, cette pilule a longtemps été présentée comme le remède miracle aux problèmes hormonaux multifonctions. Acné, chute de cheveux, hirsutisme, endométriose… Elle sait tout faire. Y compris augmenter les risques de méningiome.

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En 2019, vous avez créé l’association AMAVEA (Association Méningiomes dus à l’Acétate de Cyprotérone, aide aux victimes et prise en compte d’autres molécules). Qu’est-ce qui vous a décidé à agir ?

En 2015, on m’a diagnostiqué cinq méningiomes. Je prenais Androcur depuis 12 ans pour l’endométriose. C’est mon gynécologue qui me l’a prescrit. Il ne m’a jamais parlé des risques. Lorsque je lui ai demandé des comptes, il s’est justifié en disant que les cas étaient très rares. Donc il savait. Grâce à des recherches, j’ai découvert que l’alerte sur Androcur avait été lancée en 2004. L’État français, l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) et le Laboratoire Bayer ont reçu cette année-là des déclarations de pharmacovigilance du corps médical sur le risque de méningiome. À partir de là, j’avais besoin de comprendre : comment se fait-il qu’un tel enjeu de santé publique ait mis autant de temps à émerger dans le débat public ?

Le 7 mars 2024, votre association, représentée par le cabinet Dante, a déposé deux requêtes auprès du tribunal administratif de Montreuil contre l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) dans l’affaire Androcur. Qu’espérez-vous du procès ?

La procédure judiciaire est avant tout un moyen d’obtenir justice pour les patients dont la vie a été gravement impactée par Androcur. Dégradation de la santé, perte d’emploi, isolement, dépression… Le vrai scandale pour moi, c’est ce constat : les médecins ne se sentent pas responsables d’informer leurs patients et a fortiori les patients. Il y a une véritable infantilisation des femmes par le corps médical !

Faut-il s’attendre à ce qu’Androcur soit retiré du marché ?

Si Androcur est retiré du marché, une autre pilule miracle prendra sa place. Le danger vient de toute la classe des progestatifs à laquelle il appartient. Androcur a lui-même remplacé la pilule Diane 35 ! Interdit en 2013 par l’ANSM en raison de risques thromboemboliques, il était prescrit contre l’acné et l’hirsutisme. Plutôt que de prôner une interdiction, nous travaillons avec l’ANSM pour réduire le risque. Depuis 2018, les recommandations de l’ANSM interdisent la prescription d’Androcur pour les indications hors AMM (AMM) telles que l’acné, la séborrhée et l’hirsutisme modéré. Seul un hirsutisme sévère nuisant gravement à la vie sociale motive sa prescription.

Votre association compte désormais 1000 membres. Depuis sa création en 2019, combien de victimes vous ont contacté ?

Plus de 5 000 personnes ayant développé un méningiome après avoir pris Androcur nous ont contactés en cinq ans. Nous recevons chaque jour des demandes de contact. Certains présentent d’autres problèmes : troubles cardiaques ou veineux, présence de tumeurs intracrâniennes différentes d’un méningiome… Il faut mettre fin à ce cycle infernal.

 
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