« C’est difficile d’être considérée comme une menteuse pendant tant d’années », deux femmes racontent leur combat contre l’endométriose

« C’est difficile d’être considérée comme une menteuse pendant tant d’années », deux femmes racontent leur combat contre l’endométriose
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Deux femmes, deux histoires mais des similitudes frappantes sur la difficulté d’être écouté. Même si Marlène Sarda a les cernes joyeuses de la jeune maman, elle a fait du chemin. A 43 ans, elle est désormais maman du petit Adrien, âgé de 2 ans et demi. Un enfant presque miraculeux, fruit d’une incroyable ténacité, face à des obstacles faits de douleur et d’incompréhension. Un parcours du combattant qui a débuté à 34 ans, à la suite d’une opération d’urgence visant à retirer trois kystes de ses ovaires. L’intervention devait durer deux heures et demie, elle en durera six. « À mon réveil, le médecin m’a dit qu’en l’ouvrant, il avait découvert de l’endométriose partout et qu’il n’avait pas d’autre choix que de m’enlever les ovaires. » Voici Marlène Sarda sous ménopause artificielle. Elle n’aura jamais d’enfants. Malgré le choc de la nouvelle, le soulagement prévaut. « À l’époque, je voulais surtout appeler ma famille, mon gynécologue, mon médecin pour leur dire. Il est difficile de passer pour un menteur pendant tant d’années. » La fin de vingt ans d’errance médicale. Le départ d’une nouvelle course de haies.

Rendre visible cette maladie invisible, c’est tout le sens des interventions des Libournaises Marlène Sarda et Virginie Meynard en ce jeudi 28 mars, Journée mondiale de l’endométriose. « Il faut former, il faut informer », proclament-ils. Car il existe autant de formes de la maladie qu’il y a de femmes. » Si des règles douloureuses et abondantes doivent vous alerter, des douleurs lors des selles, des rapports sexuels ou des problèmes digestifs sont également des signes.

Un fonctionnement sans culpabilité

« Prends un Doliprane, ça va disparaître », « l’endométriose est la dernière maladie à la mode »… C’est avec ce genre de phrases que les deux Libournaises ont dû composer. «Quand j’avais 14 ans, avec des règles douloureuses, des vomissements ou des évanouissements, on disait que je cherchais de l’attention parce que mes parents étaient en train de divorcer», raconte Marlène Sarda. Chez Virginie Meynard, son gynécologue évoque « sûrement » les ovaires polykystiques, le seul remède étant la prise de la pilule dès 15 ans. Après une grossesse à 25 ans, elle a tenté de passer au stérilet. « C’était l’enfer. Les mêmes douleurs que l’accouchement et une fatigue permanente. » Vers 30 ans, les scandales autour des pilules 3e et 4e Les générations l’incitent encore à en parler à son gynécologue. La réponse reste inchangée : prenez la pilule. Rebelote vers 38/40 ans. Nouvelle tentative, nouvelle douleur.

“Je finis par me dire, je ne suis pas fou, ce n’est pas dans ma tête, parce qu’on en vient à douter”

En attendant, Virginie Meynard apprend que sa sœur est atteinte d’endométriose. Elle a fini par aborder le sujet de ses douleurs avec son médecin généraliste, et non avec son gynécologue. « Elle m’a dit ‘on va faire tout ce qu’il faut, en commençant par une IRM pelvienne’. » Les résultats suggèrent quelque chose. Ils sont envoyés à l’Institut multidisciplinaire franco-européen d’endométriose (Ifem-Endo), basé à la clinique Tivoli de Bordeaux. Trois semaines plus tard, un rendez-vous était pris. Et il y a une reconnaissance. Le docteur Thomas Dennis commence d’abord une opération pour se débarrasser de sa culpabilité. « Il me dit qu’avoir mal, ce n’est pas normal. Il m’explique tout. Je finis par me dire, je ne suis pas fou, ce n’est pas dans ma tête, parce qu’on finit par douter. » Elle continuera à prendre la pilule pendant un an. Jusqu’au jour où cela ne suffit plus. « Comme j’étais déjà mère, ils m’ont proposé de m’enlever l’utérus. » L’intervention a eu lieu le 23 novembre 2023, suivie de séances de physiothérapie pour réapprendre à uriner et déféquer. « Quatre mois plus tard, je ne crie pas encore victoire, mais 80 % de mes problèmes ont disparu. »

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8 questions sur l’endométriose

L’endométriose est caractérisée par une migration de cellules de l’endomètre (la muqueuse utérine) vers d’autres organes de l’abdomen où elles provoquent une réaction inflammatoire et des lésions. Ces cellules, « qui présentent les mêmes caractéristiques que celles de la muqueuse utérine (l’endomètre) se comportent comme elles sous l’influence des hormones ovariennes », explique l’Inserm. Ainsi, à chaque cycle, les lésions prolifèrent, saignent et laissent des cicatrices.

Maladie inflammatoire

L’endométriose est une maladie inflammatoire. « Cela vient des règles. Lorsque la fécondation n’a pas lieu, l’endomètre se désintègre et est évacué. Chez les personnes atteintes, il n’évacue pas et migre. Elle se propage partout, s’accroche, se déplace vers la vessie, le rectum, les poumons… Et cela entraîne une inflammation », décrit Marlène Sarda, devenue représentante Endofrance Nouvelle-Aquitaine. Au quotidien, tout devient compliqué. Pas seulement dans la vie conjugale. « Les collègues de travail ne comprennent pas nos absences, la famille encore moins, surtout quand les médecins disent qu’il n’y a rien de grave. On finit même par se poser des questions sur nos propres ressentis. »

Marlène Sarda a failli subir une hystérectomie. « Avant de me décider, je me suis rendu à une réunion d’Endofrance où on m’a conseillé de ne rien faire. » Elle est finalement contactée par le Dr Horace Ronan, alors basé à Grenoble. Ce spécialiste propose de l’opérer sans lui retirer l’utérus. Une opération de six heures au cours de laquelle un morceau d’intestin, une partie du vagin et du rectum sont coupés, une sonde est installée dans son rein et ses poumons sont appliqués. Nous sommes en 2014. « J’avais vraiment de l’endométriose partout. C’était lourd, mais ça m’a sauvé la vie. Surtout moralement car cela m’a redonné l’espoir d’être mère et de ne plus avoir mal. » Après trois FIV infructueuses arrêtées en France à cause de sa maladie, elle entend parler du don d’ovules. Exilée en Espagne et 12 000 euros plus tard, elle a donné naissance, après trois tentatives, à un beau bébé de 3,6 kg le 3 décembre 2021. « Les douleurs sont vite revenues mais j’ai attendu qu’Adrien grandisse. » L’opération désormais très attendue est prévue pour avril 2024.

Plus d’informations sur le site www.endofrance.org

Prime de prévention

« Selon que la maladie est détectée à 14 ou 35 ans, le parcours médical ne sera pas du tout le même. » Marlène Sarda et Virginie Meynard militent pour la prévention, notamment dans les lycées. « Nous rencontrons des jeunes adolescentes qui nous expliquent que leur mère ne veut pas les emmener chez le gynécologue parce qu’elle ne veut pas qu’ils prennent la pilule. D’où l’importance de former des infirmières scolaires. » Il y a aussi trop peu de radiologues formés à la détection de cette maladie. « Sur la liste fournie par Tivoli, il n’y en a que cinq en Gironde. » Même si l’endométriose bénéficie aujourd’hui d’une plus grande reconnaissance, le diagnostic prend encore beaucoup de temps. En moyenne, sept ans selon Endofrance.

 
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