Cela semble difficile à croire, mais il fut un temps où Marvel s’est opposé à l’utilisation du terme « super-vilain ». Cependant, comment décrire Thanos ou Doom, le futur grand méchant de la saga Multiverse, autrement qu’avec cette expression ? Dans les années 1980, ce débat opposait le rédacteur en chef et les auteurs de la Maison des Idées, avant que le mot ne soit finalement adopté…
Jim Shooter, un monteur acharné
De 1978 à 1987, pendant une décennie, Jim Shooter était le rédacteur en chef de Marvel Comics. On lui doit le crossover Guerres secrètespour lequel il a inventé le personnage de Beyonder. Très impliqué dans la direction artistique de la Maison des Idées, il supervise les Casse-cou par Franck Miller, le Thor par Walter Simonson et Les Quatre Fantastiques par John Byrne. Pas moyen pour lui de‘considérer les aventures de ses super-héros comme une simple « machine à sous » : l’auteur, dont les premiers pas dans cette industrie ont eu lieu alors qu’il n’avait que 14 ans, établit les règles de l’univers Marvel. Et l’un d’eux n’est autre que l’interdiction inattendue du mot « super-vilain » ! Dans une interview publiée en 2012 dans Ancien numéro #56, scénariste Steve Englehart (Avengers, Captain America, Dr Strange) se confie à ce sujet précepte bizarre mais cohérent de Jim Shooter.
Pas de « super-vilain » Marvel par souci de réalisme
Partagé sur Reddit par l’utilisateur rocketinspace, cet extrait d’interview révèle la doctrine en vigueur dans les années 80 chez Marvel, selon laquelle les « super-vilains » n’auraient jamais pu exister !
Anecdote amusante : Jim Shooter n’aimait pas que les écrivains utilisent le mot super-vilain dans leurs histoires, est-ce la règle éditoriale la plus étrange ? [Back Issue #56]
byu/rocketinspace dans les livres de bandes dessinées
Shooter et moi avions une relation intéressante. Shooter aimait avoir des règles. Quand je suis revenu, certaines de ces règles ne me paraissaient pas logiques, je lui en ai parlé et il m’a respecté. Il avait pour règle de ne pas utiliser le mot «super-vilain» parce que personne ne l’utilise dans la vraie vie. Mais dans l’univers Marvel, les gens dont la différence entre Doom et le gars qui a braqué un supermarché, [donc Shooter m’a permis d’utiliser le mot “super-vilain“. Je pense que Shooter voulait diriger l’univers Marvel que nous connaissions et aimions tous. Il voulait juste que les choses soient faites en temps et en heure. Lorsqu’ils ont engagé Tom DeFalco [comme rédacteur en chef]ils ont dit : «D’accord, nous changeons les règles« Il était clair qu’ils voulaient collecter de l’argent. Alors ils se sont dit : «Faisons beaucoup de premiers numéros, créons cinq magazines Thor et voyons ce qui colle« . D’une certaine manière, Shooter était le rempart contre cela.
Si le point de vue de Jim Shooter est intéressant, et reflète une volonté de maintenir un certain réalisme dans les bandes dessinées de super-héros, Le contre-argument de Steve Englehart est tout aussi pertinent. En effet, il est important de différencier un simple voleur de supérette, ou un braqueur de banque, d’unun génie maléfique mégalomane déterminé à conquérir la Terre (ou l’univers).
Bien sûr, dans la vraie vie, personne ne qualifierait un criminel de « super-vilain », mais il n’en demeure pas moins que dans les bandes dessinées, cela permet de qualifier un méchant Niveau XXL. Même dans le MCU, ce terme est approprié pour distinguer Justin Hammer, le concurrent direct de Tony Stark dans Homme de fer 2et Galactus le Dévoreur de mondes, l’un des méchants les plus terrifiants de Marvel. On ne peut pas vraiment dire que dans les deux cas, les problèmes sont les mêmes… Et ça, Jim Shooter a pu l’entendre, abandonner progressivement l’utilisation de ce termejusqu’à ce que ce dernier soit adopté dans le langage courant.
Et vous, qu’en pensez-vous ?