Les amours charnelles – mais chastes – du frère Marie-Victorin

Les amours charnelles – mais chastes – du frère Marie-Victorin
Les amours charnelles – mais chastes – du frère Marie-Victorin

« N’appartenons-nous pas à ceux qui possèdent nos secrets ? suggère l’écrivain, qui fut l’étudiant, puis le secrétaire et enfin le confident du célèbre frère à qui Montréal doit son Jardin botanique.

Malgré toutes les métaphores à connotation sexuelle, « il y a quelque chose de très pur et de presque noble dans la relation entre le frère Marie-Victorin et Marcelle » Gauvreau, constate Alexandre Goyette, fasciné.

« C’est quelque chose de puissant », cette histoire d’amour platonique tissée d’adoration et de secrets épistolaires, de foi scientifique et de confiance mutuelles, et construite dans le « respect total » de l’autre.

« L’amour, ce sont des relations qui prennent du temps à se construire. [Or], aujourd’hui on ne prend plus le temps, on précipite tout. Tout va trop vite, nous ne sommes pas patients et nous avons tendance à… jeter l’éponge.

— Alexandre Goyette

«Je pense aussi qu’il y a, de la part de Lyne [Charlebois, la réalisatrice] en réponse à son film Bordeline», portrait d’une jeune femme réfugiée dans l’alcool et le sexe.

Une image tirée du film de Lyne Charlebois Dis-moi pourquoi les choses sont si bellesimmergé dans les années 30 et 40, au contact du frère Marie-Victorin (joué par Alexandre Goyette) et de Marcelle Gauvreau (Mylène Mackay). (Marlène Gélineau Payette/Les films Opale)

Aux yeux de sa partenaire de jeu, Mylène MacKay – qui incarne les personnages de Marcelle (dans les années 1930) et de l’actrice Roxanne (au présent) – le film « traite de l’Amour » avec un A majuscule, qui commence par soi-même. l’amour, suggère-t-elle.

Dis-moi pourquoi ces choses sont si belles témoigne avec éloquence d’une « intimité » intensément épanouie, explique-t-elle. Il dresse le portrait nuancé d’une intimité – presque mystique – partagée entre deux êtres complices qui cherchaient à dépasser les basses pulsions temporelles et charnelles.

Ceci, sans jamais cesser d’approfondir – sur le plan intellectuel – les questions du fonctionnement du corps et des chemins du plaisir, bref la physiologie de la pulsion amoureuse.

Dans le miroir inversé de ce couple, il y a Roxanne, une amante déchue et déçue. L’actrice n’a accepté d’endosser le rôle de Marcelle que pour se rapprocher d’Antoine, qui l’avait rejetée. Elle ne se reconnaît dans aucune des « complaisances » qui la laissent de marbre.

Mais c’est en apprivoisant Marcelle, en embrassant sa chaste adoration pour Marie-Victorin autant que son amour des plantes, des mots, des enfants et de Dieu, que Roxanne commencera à percevoir des dimensions et des mystères insoupçonnés de l’amour.

Ignorance du sexe, incompréhension des sexes

Le couple des trentenaires et des quadragénaires est confronté à une incompréhension de l’autre et à une méconnaissance des choses liées au sexe, qu’elles soient physiologiques ou psychologiques, constate Alexandre Gouyette.

Au présent, cette incompréhension de l’altérité prend une autre forme. « Mon personnage est rongé par la peur de souffrir, [entre autre car il porte en lui de vieux démons], alors que Roxanne aimerait simplement céder à cette passion. Antoine est convaincu qu’il va la décevoir et la blesser, ce qu’il ne veut pas, car il la respecte.

Ce respect de la femme est l’un des rares traits communs qu’ont en commun Antoine et Marie-Victorin, difficilement plus opposés, note au passage l’acteur.

Le film fait un parallèle entre les années 30, à l’époque de Marie-Victorin, et aujourd’hui, grâce aux comédiens qui jouent deux rôles, un à chaque époque. (Marlène Gélineau Payette/Les films Opale)

Les deux récits – la relation historique et l’idylle contemporaine – s’éclairent et s’enrichissent au fil de l’apposition qui les met en valeur. “C’est l’opposition des deux époques qui crée la réflexion sur l’amour”, à travers le point de vue du réalisateur, souligne Mylène Mackay.

” Conrad [le prénom figurant sur le baptistère du frère Marie-Victorin] et Marcelle aura connu l’amour sans sexe, alors que nous [Antoine et Roxanne] nous avons vécu le sexe sans amour », résume l’actrice, paraphrasant ici une réplique du film.

Le film, suggère-t-elle, évoque implicitement le fait que nous avons perdu quelque chose de « précieux » en adoptant collectivement la technologie et ses outils de communication qui, s’ils facilitent la rapidité d’exécution, réduisent le temps de réflexion que nous nous imposions, en le passé, ne semble avoir favorisé ni l’éloquence, ni l’acuité de la vision, ni la profondeur analytique.

L’intimité comme renforcement de l’amour

Tout ce que les deux esprits scientifiques ont pu « s’écrire à propos de la sexualité nous montre jusqu’où ils sont allés, dans le partage de leur intimité individuelle, et dans la construction d’une véritable intimité » de couple, soutient Mylène Mackay.

Mylène Mackay (Jocelyn Riendeau/Archives Le Soleil)

« Aujourd’hui, on ne prend plus ce temps » et les relations sexuelles sont devenues un but en soi. Certes, les échanges de fluides se font plus librement et de manière beaucoup plus décomplexée qu’en 1930, mais ce n’est pas en multipliant les partenaires dans les ébats qu’on retrouvera cette intimité, postule-t-elle, observant qu’au contraire, on a un « tendance à nous détacher de nos sentiments ».

« Je connais beaucoup de gens qui me disent qu’ils ont l’impression d’être nés à la mauvaise époque. Beaucoup de mes amis [célibataires] ressentir cette perte de repères, cette perte de lien avec les autres, même si nous sommes tous proches les uns des autres, apparemment.

“Alors que nous sommes tous censés être connectés, nous sommes tout le contraire”, reconnaît Mylène Mackay, qui “a quitté les réseaux sociaux il y a un an et demi, deux ans” – et qui dit filer le parfait depuis. amour.

Marcelle et Marie-Victorin « n’ont peut-être jamais consommé physiquement cet amour, mais [dans l’absolu] ils ont « fait l’amour » d’une manière qui, pour moi, est encore plus forte, plus concrète » qu’une union charnelle.

« J’espère que le film vous donnera envie de ralentir, d’être en contemplation. [De modifier son] chercher à mieux regarder la beauté, à laisser le temps s’installer un peu en nous », ajoute Mylène Mackay.

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Dis-moi pourquoi ces choses sont si belles sort en salles le 21 juin.

 
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