En 1922, lorsque le public découvre la figure monstrueuse et inquiétante du Comte Orlock – alias Nosferatu – dans le film de Murnau, il n’y a aucun doute : le vampire est une créature maléfique à tous points de vue. C’est long clousclous crochu, ses oreilles pointues, son grand yeuxyeux sombre et sa silhouette imposante qui lui donne des allures de spectre… Impossible de ressentir autre chose que la peur à sa vue.
Plus tard, en 1931, Bela Lugosi propose au cinéma une interprétation historique de Dracula dans le film éponyme de Tod Browning. Avec son accent hongrois et son allure de dandy séduisant, il transforme le simple monstre en un manipulateur aguerri. Le comte vampire est toujours un antagoniste, mais il est charismatique, élégant et reçoit même des lettres d’admirateurs qui rêvent d’être vampires.
Au fil des années, les vampires de la culture populaire sont devenus moins manichéens. Dans les années 90, Dracula par Francis Ford Coppola et Entretien avec un vampire de Neil Jordan présentent des vampires victimes de leur nature, accablés par une malédiction qui les ronge. Le tout sous les traits de Brad Pitt ou de Gary Oldman, loin de la figure effrayante de Nosferatu. Cette évolution nous amène à Edward Cullen, le gendre vampire idéal de la saga Crépuscule. Pourtant, l’origine du mythe ne prédisait pas un tel retournement de situation.
Brahmarakshasa, nukekubi et vampire
Loin du manoir transylvanien de Dracula, des variantes du vampire familier peuplent le folklore de nombreux pays. Au Japon, le nukekubi sont des monstres à apparence humaine qui vivent intégrés dans la société, mais la nuit, leurs têtes se détachent de leur corps puis volent librement à la recherche de victimes à mordre. En Inde, dans la religion hindoue, lorsqu’un brahmane – un maître spirituel – commet des erreurs, il se transforme en démondémon Brahmarakshasa après sa mort et est condamné à se nourrir de sang et de chair humaine. La malédiction est un trait commun à d’autres de ces créatures folkloriques, comme le Mangeons Des Mésopotamiens, fantômes d’humains enterrés dans de mauvaises conditions qui auraient le pouvoir de sucer la vie des plus faibles, des enfants notamment. Mais notre vampire aux allures de Dracula vient peut-être d’une malédiction bien plus banale.
Le Fils du Dragon et la maladie des vampires
Écrire DraculaBram Stoker se plonge dans le folklore d’Europe de l’Est et mène des recherches quasi académiques. Il emprunte alors le nom de son personnage à Vlad III l’« Empaleur », un commandant militaire sanguinaire qui vécut au Moyen Âge sur le territoire de l’actuelle Roumanie. Son autre surnom ? Drăculea, « le fils du dragon », a hérité de son père, Vlad II dit « Dracul », le dragon.
Mais, malgré son goût prononcé pour la torture et les exécutions sommaires, c’est tout ce que Stoker emprunte à Vlad III pour créer le terrible comte. D’autres caractéristiques classiques des vampires, comme une alimentation sanglante ou une aversion pour le soleil, sont également héritées de l’histoire de la noblesse d’Europe de l’Est, mais cette fois de l’histoire médicale.
En effet, les hautes sphères de l’époque étaient souvent atteintes de porphyrie, une maladie du sang héréditaire qui provoque symptômessymptômes étonnante comme une sensibilité au soleil et au soufre contenu dans letouttout ou une récession des gencives qui donnait aux dents une apparence de crocs. Les médecins recommandaient même aux patients de boire du sang pour compenser leur déficit. globules rougesglobules rouges ! Bref, tout est là. Étonnamment, la porphyrie a été reconnue comme une maladie en 1911, huit ans avant la publication de Dracula. La médecine imite-t-elle parfois la fiction ?