Rebel Ridge de Jeremy Saulnier (Netflix)

Rebel Ridge de Jeremy Saulnier (Netflix)
Rebel Ridge de Jeremy Saulnier (Netflix)

Crête rebelle commence par l’arrestation violente d’un homme noir par deux policiers blancs : violemment percuté par un véhicule de service alors qu’il se rendait au tribunal local, Terry Richmond (Aaron Pierre) est appréhendé pour une raison fallacieuse et on le voit confisquer les 30 000 $ qui lui étaient confiés. le porter. Problème : cette somme doit être déposée au plus vite pour payer la caution de son cousin, à la veille d’un dangereux transfert vers une prison fédérale. Humilié par une police et une justice corrompues, Terry décide d’obtenir lui-même une compensation en allant récupérer son dû. Si les premières minutes du film semblent s’inscrire dans le contexte et les retombées de Black Live Matters (et, plus largement, du racisme systématique dont font preuve les forces de police américaines), le reste du film s’interdit toute référence ou clin d’œil explicite au politique. nouvelles. Par la simplicité archétypale du scénario et le caractère abstrait de la topographie, qui fait de la ville de Shelby Springs, où se déroule l’histoire, une sorte de prison à ciel ouvert, Saulnier dépeint les fractures d’une société où le désir d’une le retour à l’ordre semble désormais inconciliable avec un impératif de justice sociale.

En dressant ce portrait pessimiste d’une Amérique cynique et individualiste, Crête rebelle dialogue avec les films de S. Craig Zahler, notamment Bagarre dans la cellule 99 et Traîné sur le béton – avec qui il partage également l’un des acteurs secondaires, Don Johnson, qui joue ici le rôle de Sandy Burnne, la chef véreuse de la police locale. Plus attaché à restituer le point de vue de son héros sur le monde qui l’entoure, Saulnier se distingue néanmoins du style ultraviolent de Zahler par une certaine retenue dans l’économie de ses scènes d’action, peu spectaculaires avant le dernier quart du film. Dès la première séquence, lorsque Terry est appréhendé par la police, un lent travelling en avant resserre le cadrage sur la silhouette du soldat, allongé au sol, au moment où il tend les bras de manière à en effleurer les bords. Ce plan révèle une logique d’enfermement qui ne cessera d’être déclinée par la mise en scène durant les 45 premières minutes, comme un rappel incessant de ce traumatisme inaugural. Surcadrages, zooms, décors exigus et perspectives bloquées : Saulnier fait ici preuve d’une certaine inventivité dans la représentation d’un espace entièrement carcéral, illustrant l’idée que Terry est « acculé » par la police.

Preuve par l’image

En faisant du cadre un outil d’oppression, Saulnier développe implicitement un discours réflexif sur le rôle des images, qui se confirme par la place centrale occupée, dans la seconde partie, par les enregistrements des images. caméras de tableau de bord de la police. Vidéo lancée automatiquement lors d’une interpellation, elles constituent la preuve des malversations policières commises dans la région, à tel point que Terry cherche à les récupérer pour révéler les infractions commises contre lui. Aidé dans sa quête par Summer McBride (AnnaSophia Robb), une avocate au courant des malversations policières, le film se reconfigure en thriller paranoïaque : contraint par Burnne de quitter Shelby Springs après la mort de son cousin en prison, Terry part en cavale alors que enquêter sur l’ampleur de la corruption dans la région. Condamné au statut de paria, le personnage finit par hanter les coins reculés de la ville (les abords du tribunal, une cachette sous un pont, l’arrière-salle d’un restaurant chinois). Cette dimension insaisissable fait justement l’objet d’un face-à-face entre Terry et la police, où Saulnier fait de cette lutte des images l’enjeu secret de la quête de l’ex-militaire. Lors de l’affrontement final, le personnage utilise des fumigènes pour transformer le parking en un véritable champ de bataille dont les repères s’estompent ; profitant de cette interférence, il atteint un véhicule situé juste en face de Burnne et commença à enregistrer un caméra de tableau de bordretournant contre la police les outils qui lui permettaient jusqu’alors d’imposer « sa » mise en scène.

Si le film fait donc preuve d’une bonne cohérence, on peut néanmoins regretter qu’il se révèle diversement investi selon les séquences, notamment lorsqu’il ne met pas en scène l’opposition frontale entre Terry et la police. A l’aise dans le registre de l’action et du thriller, Saulnier s’appuie sur une grammaire plus attendue lors des longues séquences d’échanges avec Summer et de l’enquête qui occupe la deuxième partie du récit. Limitées à une série de plans inversés fonctionnels, ces scènes de discussion constituent la partie la moins convaincante du film, même si elles servent aussi d’écrin à l’interprétation inspirée d’Aaron Pierre. Son jeu retenu, inattendu dans le contexte d’un acteurest cohérent avec le manque d’éclat de la mise en scène. Crête rebelle renoue en ce sens avec un certain idéal de la série B : un mélange de rigueur et de modestie niché au cœur de la grande machine du divertissement industriel.

 
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