Hydro-Québec aborde l’hiver avec des réservoirs à leur plus bas niveau depuis une décennie, résultat d’une deuxième année consécutive de faibles précipitations dans le nord du Québec.
La quantité d’énergie stockée dans les grands réservoirs d’Hydro-Québec est de 97 térawattheures. En 20 ans, ce n’est que la troisième fois que le niveau de l’eau descend en dessous de 100 térawattheures au début de la saison froide alors que la demande en électricité ne cesse d’augmenter.
Ce n’est pas une situation très confortable, estime Jean-François Blain, analyste énergétique indépendant. « Lors d’un hiver très froid, le Québec peut puiser de 60 à 70 térawattheures dans ses réserves », explique-t-il. Un niveau de remplissage d’au moins 115 à 120 térawattheures est souhaitable avant le début de la saison de chauffage », estime-t-il.
Dans ses 28 réservoirs, Hydro-Québec peut stocker 175 térawattheures, l’équivalent de toute l’électricité consommée au Québec pendant une année.
L’analyste se demande si la Régie de l’énergie, qui doit s’assurer qu’Hydro-Québec maintient des approvisionnements suffisants pour répondre aux besoins en électricité des Québécois, a un portrait précis des stocks d’énergie et surtout de la façon dont ils sont gérés.
« La surveillance administrative des réserves énergétiques d’Hydro-Québec exercée par la Régie est-elle suffisante et appropriée ? Je suis d’avis que ce n’est pas le cas et qu’il faudrait le resserrer», affirme Jean-François Blain, qui souligne que la gestion des réservoirs revêt une importance d’autant plus grande que les dates de livraison des deux contrats de ventes fermes conclus avec Boston et New York sont se rapprocher.
Les deux contrats prévoient la livraison d’un total de 20 térawattheures par an pendant 20 ans, à partir de 2025 et 2026.
De son côté, Hydro-Québec a réduit drastiquement ses exportations et assure qu’elle sera en mesure de répondre aux besoins en électricité de ses clients cet hiver dans un scénario de températures hivernales normales.
La situation est essentiellement la même cette année que l’année dernière à la même période, indique Maxime Nadeau, directeur du contrôle des systèmes énergétiques à Hydro-Québec.
“On est à peu près dans les mêmes valeurs que l’année dernière, peut-être un peu moins de demande attendue pour le prochain pic”, explique-t-il lors d’un entretien avec La presse.
Le réseau d’Hydro-Québec suffit à cette tâche en hiver, sauf lors des périodes de grand froid où des importations en provenance des réseaux voisins sont nécessaires.
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, le faible niveau d’eau dans les 28 réservoirs d’Hydro-Québec ne rend pas les pointes hivernales plus compliquées, selon le directeur d’Hydro-Québec.
Il fait l’analogie avec une voiture. « Le pic, c’est la vitesse maximale que l’on doit atteindre. Il faut un certain niveau d’essence dans le réservoir, mais ce n’est vraiment pas le principal enjeu», explique Maxime Nadeau.
« Ce qui compte, c’est que tous les équipements et toutes les composantes de notre réseau soient disponibles », poursuit-il. Comme si c’était une voiture, pour être sûr que nous puissions atteindre notre vitesse maximale. Nous devons être en mesure de répondre à la demande maximale d’électricité à laquelle nous devrons faire face au cours de l’hiver prochain. »
« Chaque année, nous avons un petit nombre d’équipements qui ne sont pas disponibles en pointe et c’est sur cela que nous travaillons toute l’année pour assurer une disponibilité maximale des équipements en hiver », explique Maxime Nadeau. Cette année, nous avons fait beaucoup de travail dans ce sens et nous ne prévoyons pas de temps d’arrêt important. »
Un autre hiver serré
L’entreprise publique se prépare toujours à un deuxième hiver consécutif au cours duquel son réseau sera fortement sollicité. Depuis fin 2023, les exportations ont été drastiquement réduites et des achats ont été effectués auprès des réseaux voisins pour permettre le remplissage des réservoirs.
«On a moins exporté et on a importé plus», confirme Maxime Nadeau.
L’année dernière, la mise en service d’une nouvelle ligne de transport entre la Côte-Nord et le Saguenay juste avant l’hiver a donné une certaine marge de manœuvre à Hydro-Québec.
L’hiver a été anormalement doux l’année dernière, tandis que le premier trimestre 2024, soit les mois de janvier, février et mars, a été le plus chaud des dix dernières années.
Cette année, la société d’État peut compter sur 600 mégawatts supplémentaires mis à sa disposition par l’Ontario dans le cadre d’un accord d’échange d’énergie saisonnier.
Dans son rapport saisonnier à la North American Electric Reliability Corporation, l’organisme américain qui assure la fiabilité des réseaux électriques en Amérique du Nord, Hydro-Québec fait état d’une capacité suffisante pour répondre aux besoins de pointe hivernaux.
Ces besoins sont estimés cette année à un peu plus de 40 000 mégawatts, alors que l’entreprise étatique peut compter sur un peu plus de 41 000 mégawatts.
En cas de froid extrême prolongé ou de panne d’équipement, diverses mesures sont déployées pour réduire la demande et augmenter l’offre. Les programmes de tarification variable comme Hilo, Flex ou Winter Credit aident à réduire les besoins pendant les périodes de pointe. Toujours sur une base volontaire, les entreprises peuvent également réduire leur consommation d’énergie pour soulager le réseau électrique. Les achats d’électricité sur les marchés voisins, à des prix généralement très élevés, font également partie des moyens déployés année après année lors des périodes de forte demande.
Ces périodes surviennent en hiver, entre le 1est décembre et 1est mars, et 80 % de l’énergie disponible est utilisée pour le chauffage.
Des pics selon les années
Pic 2025 : 40 512 mégawatts (prévision)
Pic 2024 : 36 346 mégawatts (19 janvier)
Pic 2023 : 43 123 mégawatts (3 février)
Source : Hydro-Québec
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