Victime d’une reprise de logement effectuée de mauvaise foi, une locataire de 85 ans qui vivait dans son logement depuis 30 ans a obtenu 25 816 $ en dommages. Comment cela s’explique-t-il juridiquement ?
En droit, la notion de bonne foi est essentielle. C’est même un principe clé du Code civil du Québec selon lequel aucun droit ne peut être exercé pour nuire à autrui.
Cette histoire de reprise du logement a été jugée le 24 septembre et le jugement est définitif. Une locataire de 85 ans au moment des faits habitait sa résidence de Longueuil depuis 30 ans.
Selon le Tribunal administratif du logement (TAL), son propriétaire n’était pas de bonne foi avant, pendant et après la reprise de son appartement. Ce dernier a déclaré vouloir le reprendre pour héberger sa mère, ce qui n’a pas été le cas.
Lorsque la dame a signé son avis de fin de bail, cet élément était connu du propriétaire. Finalement, la mère du propriétaire qui devait occuper le logement a préféré rejoindre sa fille au Nouveau-Brunswick. L’ancien locataire n’a pas été informé de ce changement de situation. Ce n’est qu’en revenant sur les lieux, le lendemain de son déménagement, qu’elle a remarqué qu’il y avait une affiche mentionnant que le logement qu’elle venait de quitter était enfin à louer.
Le propriétaire avait en effet loué ce logement à 1 000 $ par mois pour mai et juin 2023 avant de signer un nouveau bail annuel à 1 150 $ par mois. Ceci sans compléter la clause G du bail et sans informer le nouveau locataire que le loyer précédent était de 580 $ par mois. Pour le tribunal, tout cela démontrait son manque de bonne foi.
Reprendre l’hébergement en respectant les règles
La loi autorise les propriétaires à reprendre un logement sous certaines conditions. Une reprise de logement est autorisée notamment lorsqu’un propriétaire souhaite y habiter lui-même, héberger ses enfants ou ses parents, héberger tout autre parent ou membres de sa famille par alliance dont il est le principal soutien. Un propriétaire ne peut reprendre le logement pour d’autres raisons, à moins qu’il n’accepte avec le locataire de mettre fin à son bail.
Certaines particularités s’appliquent notamment en raison de l’âge des locataires, ou encore de leurs revenus. Dans certains cas particuliers, un propriétaire peut reprendre le logement habité par une personne âgée, par exemple s’il est lui-même âgé de 65 ans ou plus.
D’un point de vue juridique, la reprise de logement est différente de l’expulsion. L’expulsion peut être possible lorsqu’un propriétaire souhaite réaliser un projet d’envergure, comme certains travaux, mais sous certaines conditions.
Dommages importants
Dans cette affaire, la locataire avait droit à 25 816 $ de dommages, soit 15 816 $ qui correspond à la différence de loyer payé si elle était restée dans l’appartement, 5 000 $ de dommages moraux et enfin 5 000 $ de dommages. punitif.
Des dommages-intérêts dits « punitifs » sont accordés pour punir une personne qui a commis un acte de mauvaise foi afin de l’empêcher de récidiver. Cette somme ne doit cependant pas dépasser ce qui est suffisant pour assurer leur fonction préventive. Quant au préjudice dit « moral », le tribunal a estimé que la locataire souffrait de stress suite à cette demande de reprise de son logement. Ce stress était dû à l’urgence du relogement alors qu’elle avait un rythme de vie, des habitudes et des relations dans le quartier depuis plusieurs années.
Selon le juge, « le droit du locataire au maintien dans les lieux fait partie de l’essence même du bail d’habitation. En reprenant possession, le propriétaire se prévaut légitimement de ce droit et c’est pourquoi il est exigé que le propriétaire-propriétaire démontre qu’il entend réellement reprendre possession aux fins indiquées dans son avis et qu’il ne s’agit pas d’un prétexte pour obtenir d’autres se termine.
A l’inverse, les locataires évincés devront démontrer au tribunal que la reprise de leur logement a été effectuée « dans un autre but, c’est-à-dire de mauvaise foi, et ce, en vertu de preuves précises, sérieuses et concordantes ».
Et le tribunal de conclure : « La seule façon de mettre fin à ce type de transaction préjudiciable aux locataires est que le tribunal envoie un message clair et sans équivoque que cela ne peut pas se faire. Pour ce faire, il faut faire le jeu de ceux qui s’enrichissent de ce type d’arrangement qui n’est pas conforme au Code civil du Québec et qui porte grandement préjudice à ceux qui en sont victimes.»
Texte informatif – La loi change ! Les informations juridiques contenues dans ce texte sont valables au 30 novembre 2024. Ce texte est informatif, il ne s’agit pas d’un avis juridique. Éducaloi est un organisme à but non lucratif dont la mission est de vulgariser le droit et de développer les compétences juridiques de la population québécoise.
La loi change ! Les informations juridiques contenues dans ce texte sont valables au 27 septembre 2024. Ce texte est informatif, il ne s’agit pas d’un avis juridique. Éducaloi est un organisme à but non lucratif dont la mission est de vulgariser le droit et de développer les compétences juridiques de la population québécoise.
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