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Le pellet, danger pour les forêts françaises, selon un rapport

Par Johann Sonneck


Vérifié par
Aurien de Maupeou

Rédacteur en chef de l’actualité énergétique

Publié le


28/10/2024

lecture min.

En incitant les exploitants forestiers à utiliser des branches laissées sur place, et en empiétant sur le bois d’œuvre, le bois énergie (c’est à dire les pellets) représente une menace pour la forêt française, selon le rapport du collectif » Pour un réveil écologique « . Cependant, les granulés de bois sont l’énergie la moins taxée, la plus locale, l’une des moins émettrices de carbone et souvent la moins chère. On tire encore sur l’ambulance ?

Le pellet, une énergie favorisant la transition écologique et la neutralité carbone, vraiment ?

Plus de 200 000. C’est le nombre de poêles à granulés qui est vendu chaque année en . Un chiffre qui montre le regain d’intérêt pour le bois énergie, une solution simple, locale et décarbonée. Aujourd’hui, plus de 2 millions de foyers français se chauffent aux pellets à la maison.

Les principales raisons de ce succès ? Premièrement, le prix et économies que permet cette Source d’énergie. Une tonne de pellets de bois se vend autour de 350 €, soit 7 centimes le kWh. 30% moins cher que le gaz, 3 fois moins cher que l’électricité (voir ordres de grandeur). C’est dimension écologique et le respect de l’environnement entre également en ligne de compte. En effet, les directives européennes RED II/RED III sur les énergies renouvelables précisent que la combustion du bois est neutre en carbone. Seules ses activités de transformation et de distribution émettent du CO2.

Mais le jugement deassociation ” Pour un réveil écologique » envers le bois-énergie est dur. Créé fin 2018, c’est un collectif œuvrant en faveur d’une transition socio-écologique. En octobre 2024, elle publie un rapport sur le bois énergie (BE), conclusion d’une année de travail et d’entretiens avec de multiples acteurs de la filière (experts forestiers, industriels, pouvoirs publics, etc.). Les auteurs affirment que le développement du bois-énergie empiète sur l’industrie du bois (papier, carton, panneaux isolants) et du bois d’œuvre (construction). Et ce, même si le bois industriel et le bois d’œuvre ont une meilleure empreinte carbone que le bois énergie.

Donc, bois, première biomasse mobilisée en France à des fins énergétiques »ne serait pas si vertueux sur le plan écologique. Et ce, qu’il soit brûlé sous forme de bûches, de copeaux ou de pellets. Pour les auteurs, son utilisation dans industrie du bois (BI)ou la production de produits transformés, est préférable. La raison :

  • si bois énergie et chaudières à biomasse émettre du CO2 ;
  • l’utilisation du bois en BI, pour construire un panneau de bois isolant par exemple, ne présente pas ce défaut. Le carbone stocké dans le panneau y reste et n’a pas d’impact négatif sur l’atmosphère.

Au niveau écologique, « le débouché BI sera strictement meilleur d’un point de vue carbone par rapport à BE », notent les auteurs.

« La bonne santé de nos forêts » menacé par la course aux pellets, dénonce le rapport

Les filières bois-énergie et industrie du bois se nourrissent coupures appelées éclaircissement ou amélioration. Ils doivent permettre à d’autres arbres de pousser pour finalement produire bois de sciage (BO)destinés aux usages « nobles » du bois. Historiquement, le bois énergie n’est qu’un complément à la BI. Or, dans certaines régions, la part du secteur énergétique est déjà bien plus élevée que l’industriecomme :

  • in Hauts-de-France;
  • in the west (Normandy, Brittany, Pays de la Loire);
  • en Île-de-France ;
  • en PACA (Provence-Alpes-Côte d’Azur).

Un élément explique cela selon le rapport : le fait que la BE bénéficie de 50% de toutes les subventions publiques accordées au secteur du bois. Un soutien que ses auteurs jugent disproportionné. Cependant, la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) a déjà prévu un augmentation d’environ 100 % de la biomasse en 2050 par rapport à 2015dont 60% en copeaux forestiers. Ainsi, le nombre de logements chauffés au bois devrait passer de 7 millions aujourd’hui à 10 millions d’ici 2035.

Une évolution qui n’est pas sans poser des questions sur l’avenir des forêts françaises. En fait, le croissance de la demande de pellets et de BEpour remplacer les chaudières à gaz ou au fioul, a un impact majeur. Celui deaugmenter les coupes d’éclaircie ou d’amélioration réalisées spécifiquement à cet effet, et non pour promouvoir le bois d’œuvre.

Autre problème : lors des abattages, les propriétaires laissent traditionnellement une partie du bois en forêt. Entre feuilles, écorces et fines branches, les troncs restés sur place se décomposent et fournissent de nombreux minéraux particulièrement bénéfique pour les sols ». Tout ce matériel permet donc de « nourrir le sol », selon le témoignage d’un expert interrogé par les auteurs du rapport. Sans compter que ceci processus de décomposition est un pilier fondamental qui soutient le biodiversité forestièreavec 10 000 espèces d’organismes qui y résident :

  • champignons;
  • les coléoptères ;
  • insectes;
  • mousse…

De plus en plus valorisé financièrement, le bois énergie concerne désormais souvent même la couronne, ce qui réduit le volume de branches laissées sur place après la coupe, et donc la fertilité des espaces forestiers. Ce mouvement met ainsi en danger « la stabilité de la bonne santé de nos forêts », estime un autre expert cité. C’est pourquoi, pour le reportage, le bois utilisé comme BE” doivent être considérés comme des produits commercialisés de manière connexe « . En d’autres termes, il ne doit surtout pas devenir l’objectif principal des peuplements aménagés » dans la forêt.

Les projets de méga-usines de granulés se heurtent à l’opposition des militants et des associations

Autre problème qui pèse sur la forêt en raison de l’essor de la production de bois-énergie : l’augmentation du poids des machines utilisées. Son utilisation :

  • « induit le compactage des sols agricoles et forestiers ;
  • ce qui dégrade leur fonctionnement biologique à long terme et […] leur fertilité ».

Quoi de mieux pour l’environnement forestier ? L’utilisation de machines plus légères. Cependant, ceux-ci sont synonymes de rendements inférieurs et de coûts d’exploitation plus élevés, ce qui explique le recours toujours plus important à des machines lourdes.

Avec la dynamique actuelle, que restera-t-il de nos forêts et de leurs riches écosystèmes à l’avenir ? En Creuse, le porteur d’un projet de méga-scierie prévoit de prendre 180 000 hectares supplémentaires de bois, dont 80 % seront des forêts de feuillus. D’autres pistes d’exploitation forestière pour le secteur BE et BI sont à l’étude ou en phase de développement, dans les Pyrénées ou le sud-ouest notamment. Bruno Doucet, de l’association Canopée, observe que « état de santé [de la ressource forestière] se détériore rapidement ».

En Corrèze, c’est le projet d’agrandissement d’une méga-usine de granulés de bois ce qui suscite une forte opposition. Une récente manifestation a même rassemblé 2 500 personnes. ” Des milliers d’hectares seront exploités chaque année et donc des écosystèmes détruits. », précise Thibault Évin, son porte-parole. A ses yeux, « ces mégaprojets sont des machines à déforester ».

De leur côté, les défenseurs des méga-usines affirment que les pellets proviennent :

  • 95% de résidus de scieries et sciures de bois ;
  • et seulement 5% de l’exploitation forestière.

Cependant, il reste vrai que les volumes de BE commercialisés ont été multipliés par 2 en 10 ans. Selon Reporterre, ils représentent désormais 68% du bois récoltétandis que la part du bois continue de fondre. Ainsi, le directeur de Canopée, Sylvain Angerand, craint avec tous ces projets « pression insoutenable sur les forêts ».

Peur également partagée par le collectif » Pour un réveil écologique » qui met en garde contre risques :

  • d’un rareté du bois mort dans la forêt;
  • d'” un incitation à prendre une plus grande quantité de bois que nécessaire verser […] satisfaire la demande »
  • de augmentations de prix en cas de pénurie dans certaines régions éloignées. Durant l’hiver 2022-23, le prix des pellets de bois a dépassé les 500 € la tonne.

C’est pourquoi la dernière partie du rapport est consacrée à un série de propositions sur pellets et pour sauvegarder les forêts françaises.

  • Les principales propositions de « Pour un réveil écologique » :
  • Supprimer les subventions aux chaudières à bois de l’ADEME pour créer un nouveau fonds soutenant les usages du bois dans son ensemble ;
  • Soumettre àavis consultatif obligatoire des experts forestiers régionaux pour toute nouvelle installation consommer des copeaux forestiers;
  • Aider les investissements et la production de panneaux de bois et d’isolants, nécessaires à la rénovation énergétique des logements à réaliser ;
  • Taxer davantage le commerce en ligneconsommer beaucoup d’emballages en carton et de pâte à papier à base de bois, afin de préserver les ressources forestières ;
  • Encourager l’aide à l’investissement pour la mécanisation des engins légers et améliorer la formation forestière. Le but : renforcer la résilience des forêts et protéger leurs fonctionnalités écologiques.

Nous attendons donc des pouvoirs publics qu’ils clarifient la politique nationale en matière de bois énergie, afin de donner de la visibilité au secteur. Il est également important que les particuliers qui investissent des sommes considérables s’équipent d’une chaudière ou d’un poêle, convaincus d’agir pour le bien de l’environnement !

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