Charlevoix n’aura pas de véloroute le P’tit train du Nord de si tôt

(Québec) Le propriétaire du chemin de fer qui relie Québec à Charlevoix le long de paysages d’une beauté à couper le souffle est clair : il n’est pas question de démanteler le chemin de fer pour créer une piste cyclable.

Ce que vous devez savoir

  • En 1996, le premier train touristique de Charlevoix, Le Tortillard, cesse ses opérations faute de rentabilité.
  • En 2009, le Groupe Le Massif acquiert le chemin de fer et lance le Train de Charlevoix deux ans plus tard.
  • L’automne dernier, après une nouvelle crise de financement, l’opérateur a demandé 350 000 $ aux municipalités locales et à Tourisme Charlevoix, ce qui a été refusé.
  • Le 20 décembre, l’opérateur a annoncé la fin des activités du train, rendant incertain l’avenir du chemin de fer.

L’idée de créer une sorte de P’tit train du Nord entre Québec et La Malbaie circule depuis les dernières semaines. À la mi-décembre, les administrateurs du Réseau Charlevoix annonçaient la fin du train touristique, en opération depuis 13 ans.

PHOTO YVES TREMBLAY, LES YEUX DU CIEL, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE

La ville de La Malbaie

Le projet, dirigé par Daniel Gauthier, propriétaire du Massif, n’a pas été rentable. Les élus locaux ont refusé d’accorder d’autres financements publics. L’opérateur ferroviaire a annoncé le 20 décembre qu’il cessait ses activités et licenciait ses 55 salariés.

Que faire du chemin de fer de 148 km désormais sans trains ? Les citoyens et le journal Le Charlevoisien a évoqué l’idée d’en faire une piste cyclable, à l’image de nombreuses qui ont été installées à travers le pays sur d’anciennes emprises ferroviaires.

Ce sentier parcourrait des dizaines de kilomètres à flanc de montagne le long de la rivière dans des paysages uniques et permettrait aux marcheurs, coureurs, cyclistes et skieurs d’éviter la route 138.1. Mais il vaudrait mieux oublier cette idée immédiatement, selon le propriétaire du chemin de fer.

Le chemin de fer [est] en très bon état, toujours entretenu. Penser que nous allons démolir les voies et créer une piste cyclable est impensable.

David Blair, président du Chemin de fer de Charlevoix

Le Chemin de fer de Charlevoix est propriétaire du chemin de fer depuis son achat par Daniel Gauthier en 2009. Pas plus tard qu’en mars dernier, Québec accordait 4,2 millions pour l’entretien du rail et l’exploitation du train touristique.

David Blair, avocat spécialisé en droit ferroviaire, dit espérer toujours qu’un accord permettra le retour du train touristique, dès l’été prochain.

PHOTO PRISE DU SITE WEB DE LA COALITION AVENIR QUÉBEC

David Blair, à gauche, en compagnie de la ministre des Transports Geneviève Guilbault, lors d’une annonce d’investissement en mars dernier.

Mais qu’il revienne ou non, pour lui, il est essentiel de conserver une vocation ferroviaire. Selon lui, il serait insensé de « déchirer » les rails au moment même où Québec investit des millions pour réparer les chemins de fer de la Gaspésie ou de la Beauce.

«Demain matin, nous pourrions théoriquement exploiter un train de banlieue de la Côte-de-Beaupré jusqu’à la gare Palais, à Québec. L’infrastructure est là, les trains sont là. Nous y travaillons», a déclaré le président du Chemin de fer Charlevoix. « Il y a un grand complexe résidentiel dans la région de Sainte-Anne-de-Beaupré », ajoute-t-il. Et avec le projet de tramway au Québec, c’est comme une évidence. »

A golden opportunity, according to Vélo Québec

Pour l’organisme Vélo Québec, l’idée d’installer un parc linéaire dans l’emprise ferroviaire doit être analysée par le gouvernement.

« Dans les secondes qui ont suivi l’annonce de l’arrêt du train, nous avons vu l’opportunité dans notre esprit. C’est vraiment une opportunité incroyable. Des pistes cyclables de ce type, avec ces paysages, il n’y en a pas beaucoup dans le monde», note le PDG de Vélo Québec, Jean-François Rhéault.

Le chemin de fer de Charlevoix circule au Québec dans un secteur industriel, puis emprunte la route 138 avant de bifurquer vers le fleuve de Beaupré à La Malbaie.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Jean-François Rhéault, CEO of Vélo Québec

C’est certain qu’un train est un outil de développement durable, mais si le chemin de fer n’était plus utilisé, je pense qu’il faudrait réfléchir sérieusement à un parc linéaire.

Jean-François Rhéault, CEO of Vélo Québec

Vélo Québec cite notamment le cas du P’tit train du Nord, dans les Laurentides. Cette ancienne voie ferrée reçoit près de 2 millions de visiteurs (marcheurs, coureurs, cyclistes, skieurs de fond et motoneigistes) par an.

Les MRC du secteur ne sont pas propriétaires de l’emprise ferroviaire, mais la louent au ministère des Transports. Théoriquement donc, un retour du ferroviaire ne serait pas impossible si un projet essentiel voyait le jour.

PHOTO HUGO-SEBASTIEN AUBERT, LA PRESSE ARCHIVES

Le P’tit train du Nord est un sentier multifonctionnel de 230 km dans les Laurentides.

Les Charlevoisiens réalisent déjà un projet de piste cyclable sur une portion du rail, entre Baie-Saint-Paul et Saint-Joseph-de-la-Rive. Le projet du Sentier de la Rive cohabiterait avec le ferroviaire. «Il y a une volonté de redonner la rivière aux gens de Charlevoix», constate Claude Belley, président du Groupe Sentier de la Rive.

Que pense-t-il de l’idée d’un parc linéaire de La Malbaie à Québec sur la voie ferrée ? Le sujet est délicat. M. Belley sait que plusieurs intervenants travaillent fort pour redonner vie au train touristique.

«Mais on comprend qu’on se retrouverait avec une infrastructure extraordinaire, de la Chute Montmorency à La Malbaie», précise M. Belley.

Cela deviendrait un produit exceptionnel, plus facile à réaliser qu’avec un train. Cohabiter avec le train coûte cher, il y a des infrastructures à construire pour passer par-dessus le rail à certains endroits, car le mur est trop proche.

Claude Belley, president of the Sentier de la Rive Group

M. Belley et son équipe parcourent le monde pour voir si les voies ferrées ont déjà été recouvertes d’une voie amovible. Cette solution serait moins définitive qu’une suppression pure et simple du rail. “Mais au fond, on attend, on ne peut rien faire d’autre”, a-t-il déclaré. Nous sommes prudents. »

À Québec, au cabinet de la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, on indique qu’«il est encore trop tôt pour décider de l’avenir des choses».

« Des rencontres auront lieu dans les prochains jours entre les parties prenantes pour déterminer les prochaines étapes. Rappelons que contrairement à d’autres projets d’aménagement cyclable qui emprunteraient une emprise ferroviaire abandonnée, celui de Charlevoix reliant Québec via la Côte-de-Beaupré est viable et opérationnel et répond aux normes fédérales en matière de transport de marchandises. ajoute la firme.

1. À noter qu’un projet de Route verte est en développement pour Charlevoix. La piste cyclable passerait à l’intérieur des terres entre Baie-Saint-Paul et La Malbaie, notamment sur des tronçons de la 138.

 
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