Démarrer sans plus attendre l’EPR de Flamanville, un triple défi pour EDF – .

Démarrer sans plus attendre l’EPR de Flamanville, un triple défi pour EDF – .
Démarrer sans plus attendre l’EPR de Flamanville, un triple défi pour EDF – .

Enfin ! Avec douze ans de retard et quatre fois le prix initial, soit 13,2 milliards d’euros, EDF a achevé la construction de l’EPR de Flamanville (Manche), appelé en interne Flam 3. Le 7 mai, après plus de 600 contrôles, l’Autorité de sûreté nucléaire a autorisé sa mise en service. Cette autorisation permet de charger le combustible dans la cuve du réacteur et de réaliser des essais de démarrage avant la mise en service du réacteur. Elle n’est pas suffisante. Deux autres autorisations de l’ASN seront nécessaires lorsque le réacteur atteindra 25 % de sa puissance, puis 80 %, pour que l’EPR puisse fonctionner, comme le prévoit EDF, à l’hiver 2024-2025.

La mise en service commerciale n’interviendrait pas avant 2027. Le réacteur doit être arrêté en 2026 pour une vérification et le remplacement du couvercle de la cuve, qui présente des anomalies de fabrication. D’ici là, des étapes importantes doivent être franchies. Après la fin du chargement du combustible à la mi-mai, doivent suivre la première divergence du réacteur, prévue pour la première quinzaine de juillet, et le raccordement au réseau prévu cet été.

Pour EDF, la mise en service de Flam 3 est stratégique à plus d’un titre. Initialement conçu par Framatome et Siemens dans le cadre d’un partenariat franco-allemand, l’EPR (Evolutionary Power Reactor) est un réacteur de génération III d’une puissance de 1 600 mégawatts (MWe) qui tire les leçons de la catastrophe de Tchernobyl en avril 1986. Trois tranches ont déjà été mises en service, dont deux en Chine, à Taishan, en partenariat avec EDF, et une en Finlande, à Olkiluoto, par Areva.

Flam 3 est le premier qu’EDF construit seul. C’est aussi le premier réacteur que l’exploitant français a construit en 20 ans. Accidents, mauvaise gestion du projet, malfaçons, anomalies de fabrication, soudures pas au bon niveau de qualité, la construction de Flamanville 3 a été le révélateur de la perte de compétences d’EDF et de la quasi-totalité de la filière nucléaire dans la construction de nouveaux réacteurs et de leurs composants.

Montrer que les leçons ont été apprises

A l’image d’Hinkley Point C au Royaume-Uni, où EDF construit deux EPR, Flam 3 a aussi révélé qu’en l’état, l’EPR n’était pas adapté à une construction en série de 14 voire 20 tranches, pour renouveler le parc historique qui ne peut être totalement prolongé au-delà de 60 ans. Et qu’il fallait en simplifier la conception. C’est donc l’EPR 2, standardisé et avec une enceinte réacteur en béton en une seule couche et non deux comme dans l’EPR, qui sera construit en France.

Les chantiers désastreux de l’EPR ont surtout rappelé à EDF qu’il fallait boucler les plans avant de construire, et non après ! Ces enseignements, exposés dans un rapport sans concession commandé par le précédent PDG, Jean-Bernard Lévy, à l’ancien PDG de PSA Jean-Martin Floz en 2019, ont déclenché un programme Excell pour regagner confiance dans la filière nucléaire. Il est mené à bien. Mais EDF doit désormais réussir, dans les délais, à démarrer Flamanville 3. L’enjeu est triple.

Atteindre 400 TWh par an

EDF a d’abord besoin de l’électricité produite par Flamanville 3 pendant sa phase de démarrage, soit environ 14 TWh, pour atteindre ses objectifs de production de 315-345 TWh pour 2024 et 335-365 TWh pour 2025 et 2026, alors que le parc historique est soumis à des arrêts prolongés dans le cadre des visites décennales et de la fin de l’épisode de corrosion sous contrainte.

Le respect des délais, qui conduiraient à une utilisation de la pleine capacité de Flam 3 dès 2027, est aussi l’un des éléments clés pour permettre à EDF d’atteindre 400 TWh de production en 2030, comme demandé par le gouvernement, et notamment pour compenser la fermeture de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin). Pour rappel, celle-ci était initialement liée à la mise en service de Flam 3. Mais comme EDF n’a tenu aucun de ses calendriers, Emmanuel Macron a finalement dû acter, en 2021, la fermeture de la centrale en 2020, dans laquelle EDF avait arrêté d’investir pour son extension.

Assurer un avenir exportable pour les EPR

EDF devra ensuite démontrer par un démarrage réussi qu’il a su tirer parti du retour d’expérience des EPR de Taishan et d’Olkiluoto, qui ont notamment rencontré des problèmes de conception des combustibles pour le premier et du générateur de vapeur pour le second. Ces problèmes ont conduit à plus d’un an d’arrêt de l’un des réacteurs chinois, et à un nouveau retard de près de deux ans dans la mise en service de l’EPR finlandais.

Un démarrage réussi de Flamanville 3 par EDF serait enfin le signe que l’opérateur est prêt à exporter ses EPR et à aider les opérateurs à les construire et à les mettre en service. EDF propose de construire six EPR en Inde, jusqu’à quatre en République tchèque dans la version 1200 MW, quatre à six EPR en Pologne et est sur les rangs notamment en Slovénie et en Serbie. Autant de personnes à convaincre.


Calendrier de mise en service

7 mai : autorisation de mise en service par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).

Du 8 au 15 mai : chargement en cuve des 241 assemblages combustibles fournis par Framatome, constitués de 265 crayons, gaines en alliage de zirconium dans lesquelles sont disposées les pastilles d’uranium.

Avant le 15 juillet : fermeture de la cuve du réacteur, mise en service des différents systèmes, essais complémentaires, montée en pression et en température du circuit primaire, et première divergence du réacteur (première réaction nucléaire).

Eté 2024 : A 25% nucléaire, l’unité de production sera raccordée au réseau électrique français et livrera ses premiers électrons après autorisation de l’ASN.

Automne 2024 : Poursuite de la montée progressive vers 100% nucléaire, avec autorisation de l’ASN à 80%, pour atteindre la pleine puissance avant la fin de l’année, en vue d’une disponibilité pour l’hiver 2024-2025.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Grâce à l’IA, le géant Google a vu ses émissions de carbone augmenter de 48 % en cinq ans – .
NEXT BMW va copier Hyundai pour ses voitures de sport électriques – .