« Ces merveilleuses voitures électriques chinoises qui vont tuer notre industrie »

« Ces merveilleuses voitures électriques chinoises qui vont tuer notre industrie »
« Ces merveilleuses voitures électriques chinoises qui vont tuer notre industrie »

FIGAROVOX/TRIBUNE – Il est grand temps de réagir à l’offensive massive menée par l’industrie chinoise, comme l’ont fait les Etats-Unis en doublant leurs droits de douane, estime le journaliste. Selon elle, l’avenir de notre industrie automobile est en jeu.

Christine Clerc est journaliste. Dernier livre publié : dimanche le diable (Editions de l’Observatoire, 2021).


J’ai d’abord cru qu’il s’agissait de publicité payante : dès le début du JT de 13 heures sur 2, à plusieurs reprises durant la semaine du salon mondial de l’automobile d’octobre, de longues séquences nous montraient des acheteurs ravis de leurs futures voitures chinoises, si variées en leurs couleurs, si bien équipés… et surtout, si attractifs avec leurs prix imbattables ! Mais non : il s’agissait bien, sur ce soi-disant « service public », d’une « information », sciemment dirigée pour nous faire acheter du chinois… et ce, sans que cela coûte un sou de publicité aux constructeurs du bout du monde, de dont on ne sait toujours pas dans quelles conditions ils font travailler des hommes, des femmes et des enfants dans des usines géantes qu’aucun journaliste occidental n’a la possibilité de rencontrer ni même de voir de loin… Alors que notre industrie nationale traverse de grandes difficultés pour s’adapter au nouveau monde électrique , les ventes du groupe Stellantis (Citroën, Peugeot, Fiat…) ayant chuté de 279 000 au troisième trimestre de cette année sur un total de 1 148 000, comment expliquer une telle publicité ?

Les États-Unis ont su résister à cette offensive massive en doublant leurs droits de douane. L’augmentation des ventes chinoises en France (plus de 36 000 voitures électriques l’an dernier) pourrait-elle être le résultat de compromis européens ou d’un engagement « vert » aveugle ? Il était temps, grand temps de réagir, comme l’ont fait, il y a quelques jours sur LCP, les invités d’Emile Malet dans son émission « Ces idées qui gouvernent le monde » Luc Chatel (ancien ministre Sarkozy), Christian Saint-Etienne (professeur à le Conservatoire National des et Métiers) et Vincent Saliman (président de BMW France). Il est temps de nous révéler que, si les Chinois ont vu 80% du marché européen s’ouvrir, les Européens n’ont accès qu’à… 2% des commandes publiques en Chine ! Il est temps de rappeler que l’industrie automobile française, qui employait plus de 3 millions de salariés en 1999, n’en emploie plus que la moitié aujourd’hui.

Nous dirons, comme nous le disions déjà à ces « passéistes » qui s’alarmaient il y a un demi-siècle du déclin de notre industrie textile, qu’il s’agit de modernisation : bien d’autres perspectives ne s’ouvrent pas. Ils n’appartiennent pas à un pays inventif comme la France ?

Christine Clerc

Nous dirons, comme nous l’avons déjà dit à ces « démodés » qui s’alarmaient il y a un demi-siècle du déclin de notre industrie textile, qu’il s’agit de modernisation : bien d’autres perspectives ne s’ouvrent pas – elles n’appartiennent pas à un pays inventif comme la France ? Je me souviens des images de la première visite d’État de la reine Elizabeth II d’Angleterre et de sa tournée triomphale, sous la houlette du grand patron Jean Prouvost, dans les ruelles de la Lainière de Roubaix, où elle fut accueillie par près de 7 000 ouvriers émus, posant dans devant leurs impressionnants métiers à tisser, croisant les mains sur leurs chemisiers à manches courtes. Quelques années plus tard, la ville aux mille cheminées d’usine va connaître une transformation impressionnante. On dirait que c’est tant mieux pour le climat et la santé, même si le futur premier ministre socialiste Pierre Mauroy, si attaché à son Nord industriel, s’alarmait déjà et si ce changement brutal allait entraîner des milliers de drames humains. . Je me souviens des premières vagues de licenciements en 1977 et de mes visites à Roubaix – en 1998, alors qu’il n’y avait plus que 15 000 ouvriers, puis en 1999, où il n’en restait plus que 210 travaillant pour des photos dans une sorte de vitrine… avant la liquidation définitive. en 2000.

Quelques années plus tôt, j’avais accompagné le député RPR, maire d’Épinal, Philippe Séguin, dans les Vosges, avant qu’il publie le rapport de la Commission parlementaire du textile le 24 mars 1981. Je le revois, tour à tour riant et accablé de colère ou chagrin, dans la cantine d’une usine dont on ne savait pas encore qu’elle allait bientôt fermer. Son rapport soulignerait «l’insuffisance de la régulation du commerce international »remettrait en question »de multiples accords favorables aux trois pays spécialisés – Hong Kong, Taiwan et la Corée du Sud représentant 61 % des exportations de vêtements. – et insisterait sur le fait que 25 000 salariés avaient été perdus début 1981, juste avant l’élection de François Mitterrand. Il fallait, a insisté le futur président de l’Assemblée nationale, « refuser les fatalités liées à une division internationale du travail »« . C’était il y a 41 ans. Combien d’années encore pour que notre chaîne de télévision publique, uniquement préoccupée par le danger Le Pen et le danger Trump, tire la sonnette d’alarme contre la Chine ?

 
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