cinquante ans d’une saga transatlantique

cinquante ans d’une saga transatlantique
cinquante ans d’une saga transatlantique

L’idée d’associer une entreprise d’État française à un motoriste privé américain pour conquérir le marché des avions moyen-courriers peut paraître saugrenue. Elle germe pourtant dans la tête de René Ravaud, PDG de la Société nationale pour l’étude et la construction des moteurs d’aviation, ou Snecma, au début des années 1970. Cinquante ans plus tard et avec plus de 45 000 CFM56 et Leap vendus, l’idée s’est transformée en succès sous le nom de CFM International. Une saga que Safran (qui a succédé à Snecma) et son partenaire américain General Electric (GE) fêteront le 5 juin.

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“C’est important de regarder ce qui s’est passé pendant ces cinquante années, c’est une belle histoire”, souligne Olivier Andriès, directeur général du groupe Safran. Il explique que Snecma se concentrait alors sur les moteurs militaires, mais que « René Ravaud a eu une idée lumineuse ; il s’est dit qu’il y avait une place à prendre dans le secteur civil avec un moteur apportant un gain de consommation de carburant de plus de 20% par rapport au moteur américain de référence. Une vision menée avec le soutien du président Georges Pompidou, convaincu que la France devait être présente dans le domaine des moteurs pour s’imposer comme une grande nation aéronautique.

75% du marché mondial

Ne pouvant s’appuyer sur le motoriste britannique Rolls-Royce, en faillite, ni sur le géant américain Pratt & Whitney – réticent à voir sa position dominante remise en cause – Snecma s’est tourné vers GE. « René Ravaud a rencontré son homologue Gerhard Neumann et, comme toujours dans ces histoires de partenariat, c’est une alchimie entre les hommes. » poursuit Olivier Andriès, qui explique néanmoins que le lancement en 1974 de la joint-venture CFM a nécessité un accord entre Georges Pompidou et le président américain Richard Nixon, en raison de l’utilisation de technologies issues du monde militaire.

L’histoire n’était pas bonne tout de suite, GE étant même sur le point de jeter l’éponge. « Il a fallu attendre sept ou huit ans avant d’avoir un premier client » avoue Olivier Andriès. Les contrats suivent rapidement, avec l’armée américaine puis Boeing pour le premier remotorisation du 737 et, plus tard, Airbus pour l’A320. Dès son arrivée, CFM conquiert 75 % du marché mondial avec son CFM56.

« L’histoire se répète »

Une performance réitérée avec le lancement d’un moteur de nouvelle génération en 2008, le Leap, offrant une réduction de consommation (et donc d’émissions de CO2) de 15 % supplémentaires. Nouvelle réaction en chaîne : le moteur est choisi par le constructeur chinois Comac pour son C919, puis par Airbus pour le remotorisation de l’A320, et Boeing, contraint de réagir avec son 737 MAX. « Là encore, nous avons pris 75 % de part de marché. L’histoire se répète », se félicite Olivier Andriès.

Et il espère que cela se répétera encore avec The Rise. Ce programme de démonstration s’appuie sur un ventilateur (hélice située à l’avant du moteur qui propulse l’air vers l’arrière, qui assure l’essentiel de la poussée) en plein air. Une avancée technologique qui devrait donner naissance à un moteur 20 % plus efficace – mais qui complique la réduction du bruit. Pour y parvenir, CFM doit encore convaincre Airbus et Boeing, voire Comac, de prendre le risque de l’adopter pour leurs futurs avions d’ici 2035.

Au-delà de ces succès, Olivier Andriès insiste sur la pérennité de ce partenariat transatlantique : « Habituellement, les coentreprises 50-50 ne durent pas. Évidemment, c’est plus facile lorsque l’on est sur la voie du succès. Mais cela tient aussi à un mode de fonctionnement ultra simple. » Après une négociation au début du programme pour répartir équitablement la charge de travail en fonction des coûts estimés, ceux-ci ne sont plus jamais évoqués et les revenus sont partagés avec une stricte égalité. “C’est finalement très exigeant, car il faut que chacun soit à la hauteur” conclut le patron de Safran.

 
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