Doubler la taxe sur le 3e pilier : aucune chance au Parlement

Il faut remettre de l’ordre dans les finances fédérales : la ministre des Finances Karin Keller-Sutter.Image : clé de voûte

La Confédération envisage de supprimer les avantages fiscaux des deuxième et troisième piliers, titraient dimanche les journaux. Faut-il fermer notre pilier 3a ? Nous vous donnerons une mise à jour.

Quiconque vit trois milliards de francs au-dessus de ses moyens doit soit générer des revenus massifs, soit épargner. Le Conseil fédéral a donc décidé de lutter contre son déficit annuel avec un gigantesque plan d’économies. Soixante mesures différentes devraient permettre d’économiser environ quatre milliards de francs. Seules deux mesures visent à augmenter les recettes. L’un d’eux est particulièrement controversé.

« Keller-Sutter s’en prend à la classe moyenne et aux gros salariés »

Le journal du dimanche

Le Journal du dimanche explique que le Conseil fédéral veut «supprimer les avantages fiscaux du troisième pilier et des caisses de pension». Mais seulement pour la classe moyenne et les revenus élevés – les personnes à faibles revenus devraient bénéficier de ce changement.

L’indignation à droite a été forte : le Centre, le PLR ​​et l’UDC se sont opposés au ministre des Finances, qualifiant le projet de « contraire à la bonne foi » et de « tromperie ». La conseillère nationale thurgovienne UDC, Diana Gutjahr, a même lancé dans les colonnes de 20 minutes:

« Bien gagner sa vie devient de plus en plus désavantageux »

Voici de quoi il s’agit

La modification législative envisagée concerne la taxe sur les retraits de capital. Il s’agit de l’impôt que vous devez payer lorsque vous décidez de retirer votre avoir de retraite. accumulés dans les deuxième et troisième piliers sous forme de capital plutôt que sous forme de rente. Selon l’Office fédéral de la statistique, 56% des nouveaux retraités optent pour un versement total ou partiel de leur capital auprès de la LPP. Pour le troisième pilier 3a, seul le retrait du capital est possible, il n’y a pas de rente.

Jusqu’à présent, les bénéficiaires de retraits de capital étaient avantagés par rapport aux rentiers, notamment lorsqu’ils possédaient plusieurs comptes du pilier 3a et retiraient leur épargne par étapes, car l’impôt sur les retraits de capital était progressif. En revanche, la rente doit être imposée comme un revenu à un taux plus élevé. Le Conseil fédéral veut désormais éliminer cette «inégalité»: En faisant dépendre l’impôt sur les retraits de capital du revenu, davantage de personnes tomberaient dans une tranche d’imposition plus élevée. Ils devraient donc payer davantage d’impôts.

Le Journal du dimanche j’ai fait le calcul : les hauts revenus devraient payer jusqu’à quatre fois plus d’impôts, et la classe moyenne environ deux fois plus. En revanche, les personnes à faible revenu en bénéficieraient légèrement. Mais qu’y a-t-il de mal à déclarer que le Conseil fédéral veut «supprimer les avantages fiscaux du 3e pilier et des caisses de pension»?

Tous les avantages ne sont pas supprimés

Il est faux de croire que « les avantages fiscaux seront éliminés » – du moins pas tous. Même après la modification législative, le pilier 3a continuerait à offrir une réduction d’impôt annuelle sur le capital versé – selon les cantons, cela représente une réduction allant jusqu’à 20%.

Prenons un exemple : une femme gagne un revenu brut de 100 000 francs. Elle vit à Zurich, est célibataire, sans religion et sans enfants. Elle verse le montant annuel maximum de 7’056 francs dans son pilier 3a, ce qui lui permet d’économiser 1’836 francs d’impôts par an. Si elle gagnait 250 000 francs, cette économie atteindrait même 2 786 francs. Sachant qu’un pilier 3a peut se constituer sur une longue période allant jusqu’à 47 ans – jusqu’à la retraite – les avantages fiscaux peuvent permettre d’économiser des dizaines de milliers de francs. Les avantages fiscaux liés aux versements dans le pilier 3a restent donc maintenus.

Il est toutefois important de prendre en compte un élément, souligne Karl Flubacher, expert en matière de retraite au VZ Vermögenszentrum :

« Le changement législatif discuté concerne l’impôt fédéral. On oublie souvent qu’au moment de la retraite, les rentes des caisses de pension sont également imposées à vie par les cantons et les communes comme revenus. En outre, les capitaux du pilier 3a et de la caisse de pension sont soumis à l’impôt sur la fortune, également à vie.»

Ainsi, seuls les retraits de capital du pilier 3a et du capital des caisses de pension – et non des rentes – verraient leurs « avantages fiscaux réduits ».

Il n’est pas prouvé que les économies réalisées grâce aux versements dans le pilier 3a seront supérieures à l’impact de la nouvelle pratique envisagée pour les retraits de capital, qui entraînerait une augmentation des impôts. Flubacher commente ceci :

« Il est difficile de dire aujourd’hui quel sera l’effet global. Car les impôts dépendent de plusieurs facteurs. Le montant de l’épargne retirée, le montant des revenus de l’année de référence et le lieu de résidence sont des éléments déterminants.

« Une attaque contre la classe moyenne » ?

Au vu de ces éléments, il est difficile de comprendre à Berne l’agitation suscitée par la modification législative proposée. Pascal Hollenstein, responsable de la communication du Département fédéral des finances (DFF), déclare à Watson :

«J’ai trouvé les gros titres un peu excessifs, car ils ne mentionnent pas les avantages fiscaux qu’offrent les cotisations au troisième pilier.»

Le porte-parole précise également qu’il ne s’agit pas d’une « attaque de Karin Keller-Sutter contre la classe moyenne et les revenus élevés ».

La mesure a été proposée par un groupe d’experts dirigé par Serge Gaillard, qui a analysé les finances fédérales pour le compte du Conseil fédéral, présentant de nombreuses suggestions d’économies ainsi que trois propositions pour augmenter les recettes.

«Le Conseil fédéral a décidé de poursuivre cette mesure avec la modification de l’impôt sur les sorties de capital et de la soumettre à la consultation. Ainsi, toutes les parties intéressées pourront s’exprimer.

Pascal Hollenstein, responsable de la communication du Département fédéral des finances

L’objectif est d’atteindre un équilibre entre les mesures d’économie et celles visant à générer des revenus, afin de prendre en compte toutes les forces politiques.

Selon Pascal Hollenstein, la modification législative prévue, avec des recettes supplémentaires estimées à 220 millions de francs pour la Confédération et 60 millions de francs pour les cantons, constitue également une « mesure relativement modeste » par rapport aux mesures d’allègement totalisant 4 milliards de francs.

Aucune chance au Parlement

Il n’est pas certain que le changement de loi soit un jour mis en œuvre. Après la consultation, il doit d’abord passer par le Parlement, dominé par les partis de droite. Selon la conseillère nationale PS Jacqueline Badran, cela pourrait bien signifier la fin du projet :

« La droite fera couler le projet »

Le PS ne souhaite pas opposer les personnes aux revenus les plus faibles et aux salaires les plus élevés. Le conseiller national attire plutôt l’attention sur l’opposition entre travail et capital.

«Les particuliers qui vivent de leur travail et de leur retraite ont été pénalisés fiscalement dans le passé par plusieurs augmentations de TVA et de taxes dans les cantons. D’un autre côté, les propriétaires du capital – c’est-à-dire les grands actionnaires – ont été inutilement subventionnés à plusieurs reprises, à hauteur de milliards. C’est inacceptable »

Jacqueline Badran

Rarement d’accord sur la politique financière: la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter et la conseillère nationale Jacqueline Badran.Image : clé de voûte

Plutôt que de revenir sur les avantages fiscaux liés à l’épargne dans le troisième pilier, Jacqueline Badran réclame la suppression des « subventions fiscales accordées au capital », comme la réduction du droit de timbre.

Traduit et adapté par Noëline Flippe

 
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