La voiture électrique européenne ou les enjeux d’un marché encore en maturation

Au Mondial de l’Automobile de Paris, le salon du genre le plus fréquenté au monde, un thème s’impose. Kiosque après kiosque, les constructeurs mettent en avant leurs derniers modèles de véhicules électriques.

Lundi dernier, Renault a même profité de l’ouverture du salon pour lancer la version électrique de son mythique modèle R5.

Ça s’assemble, ça se produit, mais la batterie est aussi fabriquée en . Il y a cinq ans, nous n’avions pas d’usine de batteries dans notre pays. Aujourd’hui, nous les développons» a déclaré le président Emmanuel Macron pour saluer cette innovation.

Car à environ 200 kilomètres au nord de Paris, toute une industrie se met en place dans la région Hauts-de-France. En plus des constructeurs automobiles déjà établis, quatre grandes usines de production de batteries, appelées « gigafactories », sont inaugurés ou en cours d’inauguration. A terme, on estime que ce secteur emploiera 18 000 personnes dans la région.

Pour répondre aux besoins de l’industrie, un centre de formation financé à la fois par des fonds publics et privés a ouvert ses portes il y a quelques années à Douvrin, à proximité d’une de ces grandes usines.

La pratique est au cœur des formations proposées aux futurs ouvriers du secteur des batteries à Douvrin, dans le nord de la France.

Photo: Radio-Canada / Raphaël Bouvier-Auclair

Le coût d’un véhicule est lié à 40% à la batterie. Quand on travaille sur une batterie de voiture électrique, cela veut dire qu’il était stratégique de pouvoir à terme maîtriser la fabrication d’une batterie pour pouvoir maîtriser le coût d’un véhicule et conserver notre autonomie industrielle.

Une citation de Nadine Guérin Roquel, du cabinet de conseil LHH, qui a contribué à la mise en place de la formation

Durant leurs quelques semaines de formation, les apprentis du secteur batteries déambulent entre les salles de classe et la grande salle déshumidifiée qui recrée à petite échelle l’environnement dans lequel ils seront appelés à faire carrière.

Notre site fermera dans quelques années. Alors ils nous ont donné l’opportunité de faire une transition, une reconversionexplique Laurent, employé de longue date chez le géant Stellantis. Après quatre semaines de formation, puis sept semaines d’intégration en usine, il devra obtenir une certification pour devenir officiellement ouvrier du secteur des batteries.

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Après plusieurs années travaillées dans le secteur automobile, Laurent entreprend une reconversion vers l’industrie des batteries.

Photo: Radio-Canada / Raphaël Bouvier-Auclair

Son collègue Grégory admet que le passage du thermique à l’électrique nécessite une adaptation, notamment en ce qui concerne les équipements de sécurité que doivent porter les salariés. Nous n’y sommes pas habituésdit-il.

Depuis la mise en place de la formation, des centaines de personnes, dont la moitié ont plus de 50 ans, ont déjà été formées.

Nadine Guérin Roquel, du cabinet de conseil LHH, qui a contribué à la création de cette formation, reconnaît que dans tout ce processus de transition, le plus compliqué c’est d’anticiper.

Si aujourd’hui nous avons des gens qui se forment pour faire la partie véhicule électrique, il nous reste la fabrication de moteurs thermiques. Cela veut donc dire que vous dites à une industrie qu’il faut anticiper la transformation des compétences.explique-t-elle.

Un enjeu majeur de prévisibilité, d’autant qu’en Europe, ce marché n’est pas encore totalement matureestime Emmanuel Hache, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).

Baisse des ventes et de la concurrence

Alors qu’elles sont en augmentation ces dernières années, les ventes de voitures électriques connaissent un déclin depuis début 2024 sur le continent européen, où elles représentent 12,5% des ventes de véhicules neufs.

La baisse a été particulièrement marquée en Allemagne, où, pour des raisons budgétaires, le gouvernement a supprimé les incitations financières à l’achat d’une nouvelle voiture électrique.

Nous avons des phénomènes quelque peu cycliques. Nous avons constaté l’année dernière une accélération des ventes de véhicules électriques à l’échelle mondiale. Ces derniers mois, nous avons assisté à un ralentissement de la progression des véhicules électriques. Il y a moins de ventes.

Une citation de Emmanuel Hache, directeur de recherche àIRIS
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L’entreprise chinoise BYD propose des véhicules électriques à des prix avantageux sur le marché européen.

Photo: Radio-Canada / Raphaël Bouvier-Auclair

Cette récente baisse des ventes s’accompagne d’une concurrence féroce de la part de la Chine. Certains constructeurs chinois, dont XPeng et BYD, ont profité du Mondial de Paris pour lancer de nouveaux modèles sur le marché européen, parfois à des prix très avantageux.

Ainsi, l’un des VUS électriques de BYD présenté à Paris se vend autour de 55 000 $ CAD, un prix bien inférieur à celui d’un modèle européen comparable.

Nous sommes français, nous sommes chauvins» confie Florent, qui vient de jeter un œil au véhicule en question et affiche sa préférence pour les voitures européennes. Il estime néanmoins que la concurrence chinoise présente des avantages, notamment en termes d’innovation.

Mais pour l’Union européenne, cette concurrence n’est pas équitable, compte tenu des subventions que reçoivent les constructeurs chinois et qui leur permettent d’inonder les marchés de produits à bas prix.

Les véhicules électriques chinois étaient déjà soumis à des droits de douane de 10 % et, récemment, après des discussions qui ont divisé les membres duUEBruxelles a obtenu le feu vert pour imposer une surtaxe qui pourrait aller jusqu’à 35 %.

Quand on a des subventions sur certains fabricants en Chine, c’est normal qu’on mette des droits de douane pour les compenser, sinon on ne joue pas avec des règles équitables a déclaré Emmanuel Macron lors de sa visite au Mondial de l’Automobile de Paris.

Mais le chercheur Emmanuel Hache, duIRISdes questions se posent sur cette stratégie européenne.

Je ne suis pas sûr que la réponse européenne, en taxant les véhicules, apporte réellement une garantie de marché aux constructeurs européens. Mais ce qui est sûr, c’est que cela augmentera le coût de la transition bas carbone pour les consommateurs.déclare-t-il.

>>Un véhicule Renault dans un showroom.>>

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Les constructeurs européens, comme Renault, ont profité du Mondial de l’Automobile de Paris pour présenter des modèles électriques.

Photo: Radio-Canada / Raphaël Bouvier-Auclair

L’expert se demande si, faute de subventions, il n’est pas déjà trop tard pour certains modèles de véhicules abordables, et si les constructeurs européens ne devraient pas se concentrer sur des produits plus haut de gamme.

Malgré les nouveaux modèles et innovations mises en avant cette semaine lors du grand rendez-vous de l’industrie, l’incertitude demeure quant à l’ampleur du virage électrique en Europe et l’impact qu’il aura sur les secteurs qui y sont liés. , comme celui de la batterie.

Malgré cette incertitude, nous savons que nous devons y allerassure Nadine Guérin Roquel, dont le bureau a contribué à la formation des ouvriers batterie.

Ce que nous ne savons pas exactement, c’est à quelle vitesse nous allons devoir y aller. Mais quoi qu’il arrive, la partie thermique doit évoluer vers la partie électrique. Après, il faut que les infrastructures suivent, donc il faut s’y préparer quoi qu’il arrive. C’est une certitudedit-elle.

 
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