Emily à Paris : la femme sandwich ?

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L'actrice britanno-américaine Lily Collins assiste à la première de la saison 4, partie 1 de « Emily in Paris » de Netflix, au Théâtre égyptien de Los Angeles, le 14 août 2024. (Valerie Macon)

Lidl, AMI, Samsung, Jacquemus, Vestiaire Collective, LVMH, Google : la dernière saison de la série à succès de Netflix « Emily in Paris » a porté l'intégration des marques à l'écran à un niveau supérieur, propulsant le placement de produit, encore plus que les personnages, au cœur de l'intrigue.

La plateforme s'est par exemple associée à Google pour permettre, via son outil Lens, de photographier son écran et d'être redirigé vers la page web qui vend l'un des vêtements ou accessoires portés par les protagonistes. Le référencement monte en flèche et les commissions affluent pour « cette forme d'engagement qui atteint un nouveau niveau », répond Netflix dans un communiqué.

Dans une mise en abîme vertigineuse, ces intégrations commerciales suivent les ambitions du personnage.

Emily Cooper est ainsi chargée, dans son agence de marketing de luxe fictive « Savoir », d’inventer des partenariats innovants pour toutes sortes de marques bien réelles.

En France, la réglementation en vigueur sur le placement de produit et la publicité clandestine interdit ces pratiques dans la production télévisuelle. Mais rien ne s'applique aux contenus des plateformes.

“Cette façon de travailler est nouvelle pour nous Français, mais elle est courante sur les marchés américains où les marques sont intégrées très en amont, dès l'écriture du scénario, et où les annonceurs s'engagent sur des montants très importants”, explique à l'AFP Jean Dominique Bourgeois, directeur de l'agence française spécialisée dans le placement de produits, Place to Be Media.

« Avec un budget compris entre 500 000 et un million d'euros pour un placement scénarisé, c'est une bonne affaire pour les marques qui devraient dépenser beaucoup plus pour une campagne multi-pays », explique l'expert, dont l'agence a développé le partenariat entre Emily et McDonald's dans la saison 3 et placé trois autres clients dans la saison 4.

En savoir plus

– Nouveaux clients –

La plateforme de mode de luxe d'occasion Vestiaire Collective s'est offert un rôle pendant quelques minutes lorsqu'une Mindy fauchée fait appel à son service, filmée en détail, pour vendre sa garde-robe de créateurs.

Interrogée par l'AFP, l'entreprise française n'a pas donné le montant de cette opération mais a indiqué avoir ciblé « la notoriété de sa marque », notamment « le développement sur le marché américain, qui représente aujourd'hui 20% des ventes ».

L'entreprise de mode, qui propose également 900 styles inspirés de la garde-robe d'Emily, affirme avoir constaté une « augmentation » du nombre de nouveaux clients, tant acheteurs que vendeurs.

Les tenues d'Emily, de plus en plus improbables de saison en saison, font vendre. Dès la saison 1, le public avait conservé le carré Kangol, enterré depuis 1998. En saison 2, c'était l'avalanche de looks jaune poussin, jusqu'au béret. La saison 4 a déjà donné lieu à une combinaison rayée portée au bal masqué et à une chapka bleue portée par Mindy.

– « Faire saigner les yeux » –

La costumière de la série, Marilyn Fitoussi, qui affirme « faire saigner les yeux » avec ses choix vestimentaires audacieux, a fait de la garde-robe de l'Américaine un personnage à part entière.

« Je suis régulièrement contactée par des marques qui ont une légère baisse de visibilité ou qui cherchent à toucher une clientèle plus jeune et différente », confirme-t-elle au journal économique Les Échos.

« Je ne suis pas payée par les marques et je ne veux pas l'être », explique la costumière, rappelant que pour la saison 1, faute de budget, elle avait habillé Emily entièrement de vêtements d'occasion et vintage.

Depuis, chaque tenue est décortiquée par autant de magazines de mode que lors d'un défilé. La visibilité d'un logo LV sur une boucle de ceinture ou de la marque choisie pour le jogging de l'héroïne est immédiate et semble, jusque dans les clichés choisis, calculée.

« Regarder la série donne l’impression troublante de déambuler au milieu d’un immense centre commercial », commente le journaliste de GQ Adam Sanchez.

Le spécialiste de la culture et du cinéma constate que cette pratique « a pris de l'ampleur de manière folle » dans la 4e saison, avec quatre placements de produits dans les premières minutes du premier épisode. Et les spectateurs, assure-t-il à l'AFP, savent « à quoi s'attendre ». Et ils en redemandent.

« C'est une expérience de visionnement particulière. On ne vient pas tant pour l'intrigue, qui est minimale, mais pour ce qu'Emily consomme et porte », résume-t-il.

dar/mch/

 
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