Automobile. Rover SD1 inspiré de Ferrari, moulé par les Anglais

Durant les années 1960, Rover connaît un grand succès avec sa berline P6. Une voiture idéalement positionnée, plus grande et plus luxueuse que la Ford ou la Morris du père, mais pas aussi premium que la Daimler du réalisateur.

À la fin de la décennie, on commença à parler de son remplacement. Heureusement, Rover et Triumph ont ensuite fusionné au sein du groupe Leyland Cars. Automotive England est de retour, et plein d’ambition !

Caractéristiques

La nouvelle berline remplacera à la fois la Rover P6 et la Triumph 2500, les deux marques étant regroupées sous la bannière Leyland Cars.

En effet, les deux marques font toujours une comptabilité séparée, une recherche et développement séparée et disposent chacune de leur propre bureau de design, le design s’annonçant épique. Mais en mars 1969, le projet P10 est lancé.

Les travaux ne commencèrent qu’en mars 1970, une fois le lancement du Range Rover assuré.

Les spécifications sont transmises au bureau d’études, la nouvelle Rover sera une berline à moteur avant et à propulsion arrière, utilisant une version améliorée du moteur V8 en alliage léger existant.


Adieu la berline classique

Pour la conception, nous mettrons en compétition deux équipes. D’un côté le bureau d’études Triumph à Canley et en face, leurs rivaux Rover à Solihull.

Le projet Triumph « Puma » sera jugé beaucoup trop conventionnel par le conseil d’administration. La nouvelle voiture, qui sera commercialisée sous le nom de Rover, aura des lignes modernes, avec un hayon arrière.

Mais David Bache, son designer, a une obsession. Il souhaite absolument équiper la future Rover SD1 de portes papillon ! Contre l’avis de tous, et des dirigeants de British Leyland, il alla même jusqu’à créer un modèle grandeur nature avec ces portes.

Inspiré de la Ferrari Daytona

Lorsqu’on découvre la Rover SD1 pour la première fois, difficile de ne pas trouver un air de ressemblance avec la Ferrari 365GTB/4 « Daytona ».

Une inspiration assumée par le designer David Bache, dans une interview au magazine « Car » en 1982. Difficile de le cacher en effet, le profil de la SD1 affiche le même pli de carrosserie, tandis que l’avant, y compris les phares et les clignotants, semble totalement repris de la Ferrari.

Au printemps 1971, Jaguar, Rover et Triumph sont réunis sous la bannière de la « Division Spécialisée », le projet prend un nouveau nom : SD1.


Du diesel au V8

Côté motorisations, le V8 Rover de 3,5 litres de 193 ch est épaulé par un quatre cylindres en ligne de 2,0 litres de 101 ch ainsi qu’un six en ligne de 119 ou 123 ch. Une version diesel de 94 ch complète l’offre.

Sur le papier, tout semble bien, mais pour éviter de perdre de l’argent sur le projet, British Leyland engage un nouveau directeur financier, John Barber.

Anciennement chez Ford, il exporte sa méthode de gestion de projet chez Rover. Chaque pièce est référencée, chiffrée, par rapport à la concurrence, pour atteindre un objectif de prix et donc de rentabilité. Pour les Anglais, c’est une révolution.

Des solutions modernes

Le SD1 bénéficiera de nombreuses solutions intelligentes et rares pour l’époque. Nous commençons par un tableau de bord symétrique pour faciliter le montage des voitures avec conduite à gauche et à droite.

Ce Rover peut également se vanter d’offrir une colonne de direction réglable, de nombreux espaces de rangement, des sièges rabattables, une plage arrière amovible et même des rétroviseurs réglables de l’intérieur.

Le tableau de bord est symétrique pour faciliter le montage des versions avec conduite à droite ou à gauche. photo Rover.

Le tableau de bord est symétrique pour faciliter le montage des versions avec conduite à droite ou à gauche. photo Rover.

Beaucoup de temps perdu

En décembre 1971, le style du SD1 est fixé. Il faudra cependant attendre 18 mois pour qu’il soit approuvé par les dirigeants de British Leyland.

Le reste du projet continue au même rythme. En 1971, il fallait en moyenne 30 mois entre le gel de la conception et le démarrage de la production.

Pour le Rover SD1, cette phase prendra 54 mois supplémentaires. On estime que le Rover SD1 aurait pu arriver sur le marché trois ans et demi plus tôt, avec l’impact qu’on imagine.

Un optimisme à toute épreuve

Chez British Leyland, nous y croyons. Les prévisions de ventes du réseau de distribution sont telles que Rover obtient le financement, en novembre 1972, d’une toute nouvelle usine sur le site de Solihull dédiée à cette nouvelle voiture.

L’objectif initial de ventes est doublé et porté à 3 000 ventes par semaine, soit 150 000 voitures par an. Pourtant, rien ne se passera comme prévu.

Le hayon était encore rare à l’époque sur les voitures familiales. Photo Rover.

Le hayon était encore rare à l’époque sur les voitures familiales. Photo Rover.

Des grèves répétées

Face à ces objectifs ambitieux, la direction de l’usine demande beaucoup à ses ouvriers. Pour adoucir la pilule de l’augmentation de la production quotidienne, Rover organise un tirage au sort au sein de l’usine pour faire gagner aux employés des Rover SD1.

Les syndicats s’opposent à ce tirage au sort. Une grève éclate, ce sera la première d’une longue série. Lors de son lancement le 30 juin 1976, l’usine était déjà à l’arrêt.

Résultat, seulement la moitié des concessionnaires disposent d’un véhicule de démonstration dès la première semaine de commercialisation du SD1.

Dans un premier temps, cette relative rareté profitera aux revendeurs qui vendent les premiers exemplaires jusqu’à 600 livres de plus que le prix officiel.

Mais en attendant, les mouvements sociaux continuent. Une semaine après le lancement, une nouvelle grève a impliqué 1 770 travailleurs se plaignant de la chaleur excessive dans l’usine.

Lorsqu’un travailleur en retard au travail est puni, 400 autres travailleurs débrayent. Les mois passent et l’usine ultramoderne de Solihull est plus souvent à l’arrêt qu’au travail.

Qualité discutable

Malgré le titre de voiture de l’année en 1977 et les éloges des premiers journalistes qui ont testé la voiture, la Rover SD1 fait plus souvent parler d’elle pour sa frappe d’usine que pour ses qualités.

En parlant de qualité, le magazine Car inspecte une SD1 après 30 000 km. Le constat est sévère : « La finition ressemble plus à un bricolage qu’à quelque chose provenant de l’usine automobile la plus moderne de Grande-Bretagne » ou encore : « La pièce en plastique sous le siège conducteur vient de tomber. morceaux, comme tous les plastiques de cette voiture.

Les problèmes de qualité décourageront rapidement les acheteurs. Photo Rover

Les problèmes de qualité décourageront rapidement les acheteurs. Photo Rover

Voitures neuves rouillées

Les journalistes s’attardent longuement sur la qualité désastreuse de la peinture, des assemblages et des matériaux.

Mais le mal était déjà fait, avec les retours désastreux des premiers clients. Les concessionnaires réduisent rapidement les valeurs de reprise du SD1.

Bientôt, les stocks de voitures neuves s’accumulent dans les parkings des usines. Le constat est clair, les Anglais ne veulent plus de cette voiture.

Problème, avec leur traitement anticorrosion approximatif, les voitures neuves finalement livrées chez les concessionnaires arrivent le plus souvent rouillées, après quelques semaines de stationnement devant l’usine.

Le mal est fait

Cette Rover SD1, bien que désirable, aura toutes les difficultés du monde à dépasser les 300 000 exemplaires produits en dix ans, de 1976 à 1986.

Bien loin des 150 000 exemplaires prévus chaque année par British Leyland. La berline entraîne tout le groupe anglais dont les autres modèles ne sont ni plus fiables ni triomphants.

La suite ne sera qu’une lente agonie. Partiellement nationalisé en 1975, le groupe est rebaptisé British Leyland Limited, puis Austin Rover Group, puis enfin Rover Group en 1986.

En 1988, le gouvernement britannique vend l’entité à British Aerospace. Passée brièvement aux mains de BMW, rebaptisée MG Rover, elle fait faillite en 2005.

 
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