Une hausse de la fiscalité des dividendes affecterait-elle des millions d’actionnaires salariés, comme le suggère Bruno Le Maire ? – Libération – .

Une hausse de la fiscalité des dividendes affecterait-elle des millions d’actionnaires salariés, comme le suggère Bruno Le Maire ? – Libération – .
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Même si la France est le champion européen en matière d’actionnariat salarié, la part du capital détenue par les salariés reste extrêmement minoritaire. Il est important de noter que les dividendes sont déjà exonérés d’impôt sur le revenu.

Les finances publiques sont en mauvais état. Rendu public mardi 26 mars par l’Insee, le déficit de l’administration publique en France a atteint 5,5% du PIB en 2023, contre 4,9% attendu jusqu’ici. Une dégradation due en partie à un ralentissement des revenus, qui n’ont augmenté que de 2% l’an dernier, contre +7,4% en 2022.

Où trouver l’argent manquant ? Invité sur RTL dans la foulée de cette publication, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a été interrogé sur d’éventuelles hausses d’impôts, notamment sur les dividendes : « Les dividendes ? Ils sont imposés à 30%, expliqua Le Maire. Et je vous rappelle qu’il y a plus de 3 millions de salariés en France qui possèdent des actions, et lorsqu’ils les cèdent, ils sont imposés. Quand on augmente l’impôt sur les dividendes, ça fait du bien parce qu’on a l’impression qu’on frappe les riches… [Mais] vous frappez les actionnaires salariés ! Alors soyons très prudents. »

2,7 millions d’actionnaires salariés

Les actionnaires salariés, plus que les « riches », seraient les vrais perdants en cas de hausse de la fiscalité des dividendes, comme le suggère Bruno Le Maire ? Même si la France est le pays d’Europe qui compte le plus grand nombre d’actionnaires salariés, ceux-ci restent extrêmement minoritaires parmi les bénéficiaires des dividendes distribués chaque année. Selon le rapport 2022 de la Fédération européenne de l’actionnariat salarié (FEAS), la France comptait, parmi ses plus grandes entreprises, 2,7 millions d’actionnaires salariés en 2022, soit 40 % de l’ensemble des actionnaires salariés en Europe.

Mais parmi les salariés – au sens large – des entreprises, la manne n’est pas vraiment équitablement répartie. Ainsi, et toujours selon la FEAS, au sein des 271 principales entreprises françaises regroupant 2,6 millions d’actionnaires salariés, les 588 principaux dirigeants (« top managers ») détiennent, en moyenne, 74 millions d’euros de capital chacun, quand les « salariés ordinaires » il faut se contenter d’un peu plus de 32 600 euros par personne. Soit, sur la base d’un rendement moyen de 3% en 2022 pour le CAC 40, un dividende annuel moyen, pour les salariés actionnaires, d’un peu plus de 1 000 euros. Surtout, les quelque 84 milliards d’euros détenus au total par ces « salariés ordinaires » ne représentent, en réalité, que 3,5 % du capital de ces entreprises. Autrement dit, 96,5 % du capital est détenu par des personnes autres que les salariés actionnaires.

Déjà exonéré

D’une manière générale, la distribution de dividendes en France reste très concentrée. Selon France Stratégie, pour les dividendes éligibles à la déduction forfaitaire obligatoire, 98,6 % des ménages percevant des dividendes en 2020 ont bénéficié d’un maximum de 1 000 euros, captant ainsi seulement 2 % de l’ensemble des dividendes distribués cette année-là. A l’inverse, les 0,65% des ménages les plus choyés (percevant plus de 10 000 euros de dividendes) ont perçu 93% de l’ensemble des dividendes. Et parmi eux, 0,11% des ménages ont perçu plus de 100.000 euros de dividendes, bénéficiant ainsi de 64% des gains distribués. Avec la perspective d’une hausse de la fiscalité des dividendes, les « riches » seront donc bien plus impactés que les salariés actionnaires.

Le message de Jean-Christophe Féraud

En fait, ces derniers ne seraient même pas affectés en cas de fiscalité plus élevée, dans la mesure où aujourd’hui, les dividendes liés à l’actionnariat salarié, dans le cadre d’un plan d’épargne entreprise, l’outil le plus répandu de ce système, sont déjà exonérées d’impôt sur le revenu et ne paient que des cotisations de sécurité sociale. Même chose pour les plus-values, contrairement, là aussi, à ce qu’affirme Le Maire lorsqu’il dit que lorsque “[les salariés actionnaires] vendez, ils sont taxés.

Pour Mathieu Chauvin, président d’Eres, gestionnaire de l’épargne salariale, “En cas d’augmentation de la fiscalité sur les dividendes pour tous les actionnaires, les entreprises pourraient toutefois décider de répartir différemment les revenus, et priver ainsi les salariés actionnaires des dividendes dont ils bénéficiaient auparavant”. Tout en pénalisant, de la même manière, les autres actionnaires.

 
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