News Day FR

« Profitons de la vie, plutôt que de nous demander quelle est la suite »

Quelle est la première réaction des gens lorsque vous dites que vous êtes médecin légiste ?

cela variait selon les époques. Au début, ils se disaient « ce n’est pas possible », « il est malade », « il n’est pas normal », « il a un problème »… Mais depuis 15/20 ans, c’est différent. Les gens sont heureux de me rencontrer ; ils commencent à parler et souvent ils me racontent leurs histoires, ce qui les a dérangés lorsque leurs proches sont morts. C’est peut-être parce que je vieillis. Les gens que je rencontre aujourd’hui ont mon âge, ils ont vécu des choses. Aujourd’hui, les gens me disent que ce que je fais est génial. Alors qu’avant, les gens changeaient de place lorsqu’ils mangeaient devant moi.

Votre propre rapport à la mort a-t-il changé avec votre travail ?



Non, il est toujours le même. Nous savons que nous allons mourir ; Cela ne sert à rien d’avoir un problème avec la mort. Je trouve ça inutile. Soyons pratiques ! Être choqué par la mort n’est qu’une évasion. Quoi qu’il en soit, la mort va nous rattraper, alors autant l’accepter et avancer. Ne pas accepter que l’on va mourir, c’est avoir, toute sa vie, un poids énorme sur le dos par rapport à quelque chose qui va arriver de toute façon.

Pour vous, qu’y a-t-il après la mort ?

Rien, c’est comme un interrupteur qu’on éteint : jour/nuit… On ne souffrira pas parce qu’on ne saura pas. Ce sont des questions existentielles, j’en conviens. Beaucoup de gens cherchent des réponses. Mais la vraie question existentielle est : pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Nous n’avons pas les moyens de répondre à une telle question. Profitons de la vie au lieu de nous demander quelle est la suite.

Comment expliquez-vous le succès de vos livres ? Curiosité morbide ?

Cela peut être vrai pour certains lecteurs, mais ce n’est pas le cas de la majorité. Parce qu’il n’y a rien de morbide dans mes livres. Ou alors tout est morbide… Tout dépend de la façon dont on les lit. Quand je demande aux gens pourquoi ils me lisent, ils répondent d’abord que c’est parce qu’ils y trouvent des histoires vraies d’un point de vue médico-légal. Ce sont de vrais crimes, de vrais suicides. Ensuite, pour la façon dont je leur dis. Je ne suis pas écrivain : je raconte mes histoires comme je les raconte oralement. Enfin parce que ce sont des histoires courtes. Vous pouvez arrêter de le lire et le reprendre 3 mois plus tard sans que cela ne pose de problème.

Quelles limites vous fixez-vous dans les histoires que vous racontez ?

Je n’ai pas de limites, c’est naturel : je ne ris pas des morts, je ris de la mort. Je pense qu’il vaut mieux en rire. Ceux qui ont envie d’en pleurer, c’est leur problème, s’ils aiment autant les neuroleptiques et les antidépresseurs, surtout s’ils y vont, les industries en profiteront ! En revanche, je m’abstiens de parler des catastrophes que j’ai vécues dans la région liégeoise, des autopsies de petites filles tuées par des pédophiles, et des grandes histoires qui ont frappé la population parce qu’elles étaient dans la presse.

Dr. Philippe Boxho signing in Pont-Sainte-Maxence.

Vous êtes-vous encore surpris lors d’une autopsie ?

Oh oui! Je viens d’avoir un gars qui a tué sa femme. On pense qu’il l’a fait avec un stylo à bille qui a pénétré dans la poitrine et touché le cœur. La dame est morte. Je n’avais jamais vu ça.

Allez-vous écrire plus de livres ?

Je me suis promis d’en faire un maximum de 5. Mais il n’y en aura peut-être pas un 5ème. Parce que si je n’y trouve plus de plaisir, j’arrêterai d’abord. Ce que je voulais, c’était faire connaître mon métier. Je visais la Belgique, pas la France ! En Belgique, les médecins légistes sont complètement négligés par le gouvernement. J’espère que les livres sensibiliseront parce que nous sommes en train de mourir ! Nous étions 42 en 2000, nous sommes 24 aujourd’hui. Dont la moitié sont en formation, sans certitude de rester. Ce qui fait 12 permanents… Mais il y aura un 4ème livre, oui. Dans tous mes livres, j’inclus des chapitres qui ont trait à l’histoire : la mort du roi Albert Ier, celle du Christ, la guillotine, Napoléon… Cette fois, je souhaite écrire un chapitre sur le plafond de la Chapelle Sixtine qui est très particulier. Je vais montrer qu’il existe un cerveau, peint par Michel-Ange. Et ce n’est pas une blague ! Je veux aussi écrire sur le Suaire de Turin qui est une superbe scène de crime.

La mort en face

« Mort en face », Dr Philippe Boxho, Kennes les 3 As, 240 pages, 19,90 €

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

Related News :