« Un musicien doit écouter les autres et s’écouter lui-même. » Walter Salles dit avoir répété à maintes reprises cette phrase du jazzman Duke Ellington lorsqu’il a décidé d’abandonner son projet de film sur un escroc se faisant passer pour un membre de la famille Rockefeller. Le cinéaste brésilien se lance alors dans deux projets autrement intimistes. Une mini-série sur l’un de ses plus illustres compatriotes, le médecin et footballeur Socrate (1954-2011), en cours de montage. Et je suis toujours làl’adaptation du livre de Marcelo Paiva sur la disparition de son père, l’ingénieur et ancien député de gauche Rubens Paiva (1929-1971), sous la dictature militaire. Succès phénoménal au Brésil, collectionnant les récompenses depuis sa présentation à Venise en septembre 2024, le film figure parmi les favoris aux Oscars. Sollicité de toutes parts, le réalisateur de 68 ans en a été réduit, lors de notre entretien à Paris, fin décembre, à nous répondre une banane à la main, histoire de reprendre quelques forces.
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-” Je suis toujours Est-ce que cela s’appuie sur votre histoire personnelle ?
Dans ma jeunesse, j’ai connu la famille Paiva. L’idée de raconter son destin exceptionnel me trottait dans la tête depuis longtemps. je suis toujours làL’histoire de Marcelo sur l’enlèvement de son père Rubens, publiée en 2015, a servi de déclic. J’ai rencontré les Paiva en 1969, à Rio de Janeiro, j’avais 13 ans. Au moment du coup d’État militaire de 1964, Rubens s’était exilé en Europe, mon père [le diplomate et banquier Walther Moreira Salles] aussi, nous l’avons suivi en France avec ma mère et mes frères. À mon retour, je n’ai pas reconnu mon pays. J’avais quitté une démocratie, j’ai trouvé une dictature. Je partageais ce sentiment de non-appartenance avec les Paiva. Ils habitaient à Leblon, à dix minutes de chez moi, nous passions nos week-ends ensemble.
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