Dans un article publié dans le British Medical Journal (BMJ), le directeur général adjoint de la revue alerte sur le danger d’un retour du tabagisme dans la pop culture au Royaume-Uni, sous couvert de nostalgie des années 90.[1].
Banalisation du tabagisme et baisse des financements des campagnes antitabac
Associée à l’imaginaire des années 90, la consommation de tabac tend à être renormalisée et glorifiée par le monde de la culture. Ainsi, la chanteuse pop Charli XCX, à l’origine de la tendance « gosse d’été », et qui compte plus de 30 millions d’auditeurs par mois sur la seule plateforme de streaming Spotify, résumait son esthétique comme « un paquet de cigarettes, un briquet BIC et un haut blanc sans soutien-gorge ». En fait, une telle affirmation associe le tabagisme à un esprit de rébellion et d’émancipation féminine. De la même manière, des mannequins des créateurs Christian Cowan et LaQuan Smith ont défilé sur les podiums en fumant des cigarettes lors de la Fashion Week de New York début 2024. Cette banalisation du tabac se développe également à travers les influenceurs et les réseaux sociaux, par exemple un compte Instagram. exclusivement dédié à la diffusion de célébrités fumant, et suivi par des dizaines de milliers de personnes. Compte tenu du potentiel normatif de l’industrie de la culture et du divertissement, un tel retour pourrait s’avérer particulièrement dangereux, notamment pour les jeunes générations. Ce retour des représentations glorifiantes du tabagisme est lié à la baisse considérable des financements publics accordés aux campagnes médiatiques anti-tabac. En effet, entre 2008/2009 et 2020/2021, ces financements ont diminué de 95 %, passant de 27,6 à 1,56 millions d’euros.
L’exposition aux représentations du tabac, un risque sanitaire pour les jeunes générations
En effet, les années 1990 ont été caractérisées par une augmentation de la prévalence du tabagisme chez les jeunes : en Angleterre, 12 % des adolescents âgés de 11 à 15 ans se déclaraient fumeurs quotidiens. Cette augmentation s’explique en partie par les stratégies publicitaires des fabricants, augmentant également les pratiques de sponsoring sportif ou les offres promotionnelles sur les produits du tabac, ou encore travaillant sur la représentation du tabac dans les médias, pour faire de la cigarette un symbole. de la jeunesse, de la mode et de l’émancipation. Depuis, le Royaume-Uni a mis en place un arsenal de mesures avant-gardistes pour réduire la consommation de tabac, parmi lesquelles des politiques fiscales particulièrement dissuasives, diverses interdictions de fumer ou encore l’introduction du packaging neutre. , ou l’interdiction des étalages de produits du tabac (interdiction d’affichage). Ces politiques de santé publique ont porté leurs fruits, notamment auprès des jeunes, puisque seuls 3 % des 11-15 ans sont désormais fumeurs. Toutefois, les progrès réalisés dans la lutte contre le tabagisme ne sont jamais définitifs, en raison de la stratégie de renormalisation de la consommation de tabac et de nicotine, entreprise par les industriels depuis plusieurs années. L’article souligne ainsi la nécessité de redoubler de vigilance face au retour du tabagisme dans les productions culturelles. La littérature scientifique démontre que la représentation du tabac dans les médias est un élément déterminant dans les attitudes des adolescents à l’égard du tabac et des comportements de consommation. Les audiences permises par les réseaux sociaux constituent une menace sérieuse pour la santé publique des jeunes générations, car le degré d’influence de la représentation est associé à la dose. Autrement dit, plus un adolescent est exposé à une image de fumeur, plus il risque de se mettre à fumer.
©Génération sans tabac
-FT
[1] Cerny C. Le renouveau de la culture pop du tabagisme est un retour en arrière malvenu pour la santé publique BMJ 2025 ; 388 :q2883 est ce que je:10.1136/bmj.q2883
Comité national contre le tabagisme |