Alors que Nicolas Sarkozy vient d’être condamné à trois ans de prison, dont un an de « détention à domicile sous surveillance électronique », plusieurs internautes s’indignent des photos de voyage partagées par sa fille Giulia.
Paris Match, Gala, Public… Presque toute la presse people s’en fait l’écho : partie en vacances aux Seychelles avec ses parents, Giulia Sarkozy a partagé des photos paradisiaques sur TikTok. Suivie, à seulement 13 ans, par plus de 23 000 abonnés sur le réseau social, la fille de Nicolas Sarkozy et Carla Bruni-Sarkozy a publié diverses images de leur voyage, dont certaines ne sont plus visibles depuis (car mises en « story » et donc supprimée au bout de vingt-quatre heures). Les photos vont du trajet en avion devant un écran affichant «Seychelles Mahé» comme destination finale, des noix de coco percées d’une paille et posées face à l’océan Indien… dont un selfie avec « papa » en fond de conversation téléphonique. La présence de Nicolas Sarkozy aux Seychelles a été largement remarquée et commentée alors que l’ex-président vient d’être définitivement condamné pour corruption et trafic d’influence, dans l’affaire des écoutes téléphoniques (dite « affaire Bismuth »).
Le 18 décembre, la Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la cour d’appel de Paris, le condamnant à trois ans d’emprisonnement, dont un an de prison et deux avec sursis, avec un aménagement de peine pour la partie forfaitaire. . Nicolas Sarkozy bénéficie d’un « détention à domicile sous surveillance électronique »terme technique pour bracelet électronique. Dans ces conditions, a-t-il le droit de passer les vacances de fin d’année à plus de 7 000 kilomètres du continent ?
« Le bracelet électronique de Sarkozy part aux Seychelles »ironiquement, il désigne X comme étant le compte « Marcel », en référence à un article de Madame Figaro. « Logiquement lorsqu’on est condamné à de la prison avec un bracelet électronique, il faut rester chez soi ou à proximité. Mais quand tu es Sarkozy, tu peux aller passer Noël aux Seychelles »publie sur le même réseau social un autre compte très populaire, au nom de Philippe Duval, qui fait quant à lui référence à des contenus de Des gens purs.
Bracelet installé dans les quatre mois
Mais si Nicolas Sarkozy peut profiter des plages des Seychelles, c’est parce qu’il ne porte pas encore de bracelet électronique. Pour cause, cette mesure ne deviendra effective que lorsqu’un juge de l’application des peines (JAP) en aura arrêté les modalités. Comme expliqué Libération en décembre, la JAP doit convoquer le condamné, examiner ses justificatifs, puis rendre une ordonnance fixant notamment les horaires auxquels les sorties sont autorisées. Une fois contactée par le parquet, la JAP dispose d’un délai maximum de vingt jours pour procéder à cette convocation (auparavant trente jours, le délai a été abaissé à compter du 30 septembre 2024). Dans le cas de Nicolas Sarkozy, si le parquet a immédiatement contacté le JAP, cela signifie que la convocation doit avoir lieu d’ici le mardi 7 janvier. Sauf que, de fait, le délai est rarement respecté, soulignent les avocats interrogés par VérifiezActualités. « En la matière, il s’agit d’une règle théorique dans la mesure où les tribunaux qui administrent les peines sont surchargés et continuent d’incarcérer »confirme Olivier Cahn, maître de conférences à l’université Paris-Nanterre. Qui note également qu’ici, « La personnalité de Nicolas Sarkozy joue en sa faveur » : « Nous avons affaire à quelqu’un qui offre toutes les garanties de représentation, puisqu’il est facile de savoir où il se trouve et ce qu’il fait. C’est donc moins prioritaire par rapport à une personne qui serait à la rue par exemple.
Même une fois la convocation passée, il faudra peut-être attendre un certain temps avant que Nicolas Sarkozy soit obligé de porter son bracelet. En effet, le juge qui prononce la peine doit rendre l’ordonnance fixant les modalités d’exécution de la détention à domicile sous surveillance électronique dans un délai de quatre mois. La pose du bracelet électronique peut donc intervenir plusieurs mois après que la condamnation soit devenue définitive. La loi fixe quand même une limite : « A défaut de décision du juge qui a prononcé la peine dans un délai de six mois »le code de procédure pénale autorise le parquet à exécuter lui-même la peine.
« Question plus morale que juridique »
En attendant, Nicolas Sarkozy est libre de se déplacer comme il l’entend. « Sa condamnation ne s’accompagne d’aucune mesure restreignant sa liberté de mouvement, tant qu’elle n’est pas mise à exécution.remarque Olivier Cahn. Nous n’avons pas retiré préventivement ses documents de voyage. L’interdiction de sortie du territoire (IST), dans tous les cas, ne peut être mise en œuvre que dans des cas particuliers : par le ministre de l’Intérieur lorsqu’un Français est soupçonné de participation à des activités terroristes, ou par un juge à la demande d’un parent. qui craint que son enfant mineur quitte le territoire seul ou avec l’autre parent. Un seul scénario aurait permis de limiter les déplacements de Nicolas Sarkozy : si sa peine de prison était, outre l’aménagement de la partie ferme, accompagnée de ce qu’on appelle une « sursis probatoire ». Au lieu de placer le condamné en détention, le juge le soumet alors à un certain nombre d’interdictions et d’obligations, qui peuvent être “l’obligation de prévenir le juge de toute sortie du territoire”indique Maître Antoine Ory, qui exerce le droit pénal au barreau de Paris.
Finalement, Nicolas Sarkozy n’a violé aucune restriction en s’envolant pour les Seychelles. « La question est finalement plus morale que juridiqueconclut Olivier Cahn de l’Université Paris-Nanterre. Il peut paraître gênant de partir en voyage à l’étranger alors qu’on vient d’être condamné et qu’on a lutté tout au long de sa carrière politique en faveur d’une plus grande sévérité dans l’application des peines. »
Une fois son bracelet électronique à la cheville, l’ancien président de la République ne sera plus libre de voyager à l’étranger comme il le souhaite, puisqu’il sera tenu de demander une autorisation préalable au JAP. Et conformément au code pénal, il ne peut être autorisé à s’absenter de son domicile. « uniquement pendant le temps nécessaire pour exercer une activité professionnelle, suivre une éducation, un stage, une formation ou un traitement médical, rechercher un emploi, participer à la vie familiale ou à tout projet d’intégration ou de réintégration ». A moins qu’il ne parvienne à échapper à la détention à domicile en utilisant une possibilité réservée aux condamnés de plus de 70 ans (Sarkozy les aura le 28 janvier), qui lui permet de demander une libération conditionnelle quelle qu’en soit la durée. de la phrase restante.