La Chambre des Métiers et de l’Artisanat de Nouvelle-Aquitaine a organisé, ce jeudi 5 décembre 2024, la première édition des Trajectoires Exceptionnelles, à la fois récompense pour certains de ses acteurs et vitrine promotionnelle pour la filière. Parmi les différents prix, un Coup de Cœur décerné à Tiphanie Le Gal, réparatrice et luthière d’instruments à vent à Limoges (Haute-Vienne).
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« Être récompensé pour son travail, c’est toujours agréable. » A quelques heures d’avoir été désignée favorite par la Chambre des métiers et de l’artisanat de Nouvelle-Aquitaine, ce jeudi 5 décembre 2024, Tiphanie Le Gal n’a pas caché sa satisfaction. Si ce prix, et les autres des Trajectoires d’Exception, marque l’ambition de l’établissement consulaire de récompenser les meilleurs de ses représentants et de créer LE rendez-vous annuel du secteur, c’est pour la jeune Limougeaude la reconnaissance d’un parcours débuté presque il y a quinze ans.
Saxophoniste depuis l’âge de huit ans, Tiphanie Le Gal ne se voyait pas devenir musicienne professionnelle. Jouer dans un groupe, faire des concerts, oui, mais seulement pour le plaisir. Pour autant, elle ne se voyait pas s’éloigner du monde de la musique, qui reste toujours sa passion. Et c’est à l’Université qu’elle découvre sa vocation.
« Je voulais trouver un métier en lien avec ma passion. Et j’ai découvert la réparation d’instruments quand j’étais à l’université. Il n’existe qu’une seule école pour apprendre le métier en France, l’Institut européen technologique des métiers de la musique. (FIN), qui est au Mans (72). Alors je me suis lancé dedans. »
Tiphanie trouve un maître d’apprentissage et obtient deux diplômes, un CAP de réparatrice d’instruments à vent et un BMA (brevet des métiers d’art) de facture d’instruments à vent. Sa formation terminée, elle s’installe à Limoges il y a douze ans, créant sa marque Un vent de Passion.
« Nous ne sommes pas nombreux en France, une centaine, c’est vraiment un petit créneau, mais il y a beaucoup de musiciens. Et surtout, les gens ne s’en rendent pas du tout compte, mais les instruments à vent ont besoin de beaucoup d’entretien, au moins une fois par an. Il y a beaucoup de pièces d’usure, il y a beaucoup de réglages à faire. Et puis, il y a aussi des instruments qui subissent des chocs, donc on est là pour ça. réparation et nous effectuons également la restauration d’instruments anciens.
Derrière la boutique aux instruments rutilants, l’atelier de Tiphanie montre bien les deux aspects presque antagonistes du métier.
D’un côté, les plans de travail, alignés avec une multitude d’outils, tournevis, pinces et autres. Comme tout bon artisan, la plupart ont été retravaillés et remodelés pour répondre aux exigences du métier. C’est le monde de la petitesse et de la précision. “Pour tout ce qui est en bois, pour les petites pièces, la petite mécanique, il faut beaucoup de souci du détail. Et bons yeux !
De l’autre côté, on trouve des tours, des étaux et surtout des formes impressionnantes et lourdes pour bosseler et redresser le laiton. C’est le domaine de la force. “C“C’est le côté, disons le plus robuste, où l’on fait les soudures, le débosselage, où l’on remet le laiton en forme.”
Et que préfère Tiphanie ? ? « J’aime le petit détail, mais parfois ça fait du bien de se défouler et de redresser un peu de cuivre… [rires] « .
La famille des instruments à vent est sans doute la plus nombreuse de l’orchestre. Bois et cuivres, flûtes, bassons, hautbois, clarinettes, trompettes, saxophones, cors… La liste n’est pas infinie, mais presque. Et le réparateur, notamment le facteur, doit tous les maîtriser.
« Il existe des normes de réparation, mais chaque instrument est vraiment différent, et nous nous adaptons à chaque fois. En fait, nous découvrons et apprenons de nouvelles choses chaque jour.
Et plus encore, il faut aussi savoir jouer de ces instruments, ou apprendre. Comme nous l’avons dit, Tiphanie est saxophoniste. Mais si nécessaire, la flûte traversière ou le hautbois peuvent, le - d’un essai, passer entre ses doigts et sous son souffle.
« Nous savons entretenir ou réparer les instruments. Mais une fois les opérations effectuées, à la fin, pour être sûr que tout fonctionne, il ne reste plus qu’à essayer l’instrument. Alors petit à petit, oui, on apprend à jouer de tout le monde. Mais parfois, pour être bien sûr, on fait appel à un collègue, ou à un ami musicien. Ici, dans mon atelier, je suis avec deux salariés. Chacun a ses spécialités. »
Et c’est sans compter les pièces rares, voire de collections, que les clients apportent.
“Nous avons la chance en France de compter parmi les meilleurs fabricants d’instruments à vent au monde, si ce n’est les meilleurs. Alors de - en - on voit de très très belles pièces récentes. Mais on voit aussi passer par l’atelier des pièces très anciennes, issues de collections, parfois presque issues de musées. On avait des saxophones magnifiques, très vieux, Adolphe Sax [NDLA : l’inventeur du saxophone] ! Nous avons aussi la chance d’avoir un collectionneur de flûtes très anciennes, que nous restaurons petit à petit.
Nous l’avons dit, le métier est rare en France, même si Limoges compte deux enseignes. “Oui, mais je suis le seul facteur», souligne Tiphanie, sans vanité, mais avec fierté. “Mais je le dis rarement, car les gens pensent que je travaille à la Poste« . Son expérience et son savoir-faire attirent donc de nombreux clients, bien au-delà de la seule capitale Limousine.
« Nous avons tout type de clientèle : des musiciens de l’Opéra, du conservatoire bien sûr, des écoles de musique. Nous avons aussi beaucoup d’orchestres, d’harmonies, de groupes. Nous travaillons aussi presque comme des médecins urgentistes, lorsque des musiciens ont des problèmes juste avant un concert. Cela aurait pu m’arriver au festival Éclats d’Émail par exemple. Et puis il y a des particuliers, qui viennent des trois départements du Limousin et même de la Dordogne, de la Vienne ou encore. des Charentes. Comme nous sommes très peu nombreux, nous avons un secteur très important.
Un savoir-faire reconnu donc, et désormais récompensé par un coup de coeur de la Chambre des Métiers et de l’Artisanat de Nouvelle-Aquitaine.
« Cela récompense le fait que nous sommes toujours là, douze ans plus tard, et que nous continuons à grandir. Et d’évoluer. Avant, j’avais deux salariés, mais l’un d’entre eux vient de partir voler seul au Pays Basque. Alors pour la première fois, nous avons un garçon à l’atelier ! Et comme moi, ils sont tous passés par ITEMM. J’espère aussi que ce prix fera découvrir notre métier. Je ne réalise pas que les instruments nécessitent autant d’entretien, et donc cela permet d’ouvrir un peu les portes de l’atelier.
Où, enfin, savoir qu’on répare en musique. Une musique où il n’y a pas forcément d’instruments à vent. Mais si, poussé par un vent de passion, vous franchissez les portes de l’atelier, n’hésitez pas à fredonner du funk ou de la salsa. Et Tiphanie sourira plus que d’habitude. Parce qu’avant d’être facteur, elle est musicienne, et ce sont les airs qu’elle préfère jouer !
durée de la vidéo : 00h01mn34s
La Chambre des Métiers et de l’Artisanat de Nouvelle Aquitaine a organisé ce jeudi 5 décembre 2024 la première édition des Trajectoires Exceptionnelles, à la fois récompenses pour certains de ses acteurs, et vitrine promotionnelle de la filière. Parmi les différents prix, un Coup de Coeur Limougeau de Tiphanie Le Gal, réparatrice et luthière d’instruments à vent. Intervenante : Tiphanie Le Gal, luthière d’instruments à vent. Equipe : JM Jonquard, JM Arnal, A Dos Santos
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