C’est l’événement culturel majeur de l’année prochaine à Aix-en-Provence. Près de 120 ans après sa mort, Paul Cézanne sera honoré d’une manière inédite dans sa ville natale. Pendant 100 jours, de fin juin à mi-octobre, les lieux de vie et de création de l’artiste seront ouverts au public et une grande exposition internationale sera présentée au musée Granet.
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« Nous sommes à fleur de peau par rapport à l’organisation elle-même, notamment par rapport au recrutement du personnel, et également par rapport à la gestion des questions de sécurité et d’assurance des conseils d’administration ». A sept mois du lancement de « Cézanne 2025 », le directeur du musée Granet commence à sentir monter la pression organisationnelle. Concernant le contenu de l’exposition cependant, Bruno Ely apparaît serein, mais surtout satisfait et fier du travail réalisé. Du 28 juin au 12 octobre, son musée accueillera près de 130 œuvres de l’artiste venues du monde entier, prêtées par des musées prestigieux et des collectionneurs privés. « Organiser une exposition Cézanne est toujours une performance. Obtenir des prêts de tableaux de Cézanne devient de plus en plus difficile car les collectionneurs, les grandes institutions, comme le Metropolitan Museum of Art de New York, la National Gallery de Washington ou le Nakata Museum de Tokyo par exemple, sont des musées qui conservent leurs œuvres et il est donc toujours très difficile pour eux, et même pour un collectionneur, de se séparer temporairement de leurs tableaux.
Parmi les tableaux qu’il est ravi de recevoir figurent « Les Joueurs de cartes » exposés à Paris au musée d’Orsay, deux « Sainte Victoire », des natures mortes peintes au Jas de Bouffan ou encore des peintures réalisées directement sur les murs du Jas de Bouffan. Bouffan, alors détaché et conservé dans le monde entier, mais que le musée a réussi à se procurer.
Outre cette exposition majeure, l’année Cézanne sera également l’occasion pour le public de découvrir les lieux de vie, de création et d’inspiration de l’artiste. A commencer par la bastide du Jas de Bouffan. Cette maison familiale, achetée par son père en 1859, restera son point d’ancrage à Aix pendant 40 ans. C’est là qu’il débute sa carrière. Il a peint ses neuf grands panneaux muraux directement sur les murs du grand salon. Une de ses œuvres émergeant d’un mur de plâtre a également été dévoilée en février dernier.
Grâce à son parc, ses bâtiments agricoles et sa vue sur la montagne Sainte-Victoire, la bastide devient également l’une des inspirations des peintures de Cézanne. Le public sera amené à découvrir les lieux à travers une déambulation allant du Grand séjour en passant par la cuisine, la chambre décorée sur le thème de Léda et le cygne et l’atelier du peintre au deuxième étage. Actuellement en cours de rénovation, la bastide, rachetée par la ville en 2018, rouvrira en parallèle de l’exposition du musée Granet, puis sera de nouveau fermée pour travaux.
Autre site emblématique : l’atelier des Lauves où il peint durant les quatre dernières années de sa vie entre 1902 et 1906. Cet atelier a été construit en 1901 sur les plans de l’artiste, sur la colline des Lauves, au-dessus de la ville d’Aix-en-Provence. . Transformé en musée depuis 1954, il a été restauré ces deux dernières années et proposera, dès fin juin, une immersion dans l’univers du maître provençal grâce notamment à une visite immersive et à la réhabilitation authentique de son jardin.
Enfin, les carrières de Bibémus réaménagées depuis 2022 par la ville d’Aix-en-Provence et autre motif cher au peintre, feront également partie des lieux patrimoniaux mis en valeur lors de l’événement.
« Le fil conducteur de l’exposition est « Cézanne chez lui » », explique Sophie Joissains, la maire d’Aix-en-Provence. Mais la démarche va bien au-delà de la simple intention d’exposition. Ramener toutes ces œuvres de Cézanne à Aix, et réhabiliter ses lieux de vie et de création, est un hommage d’une ville à son peintre. La plus belle preuve de reconnaissance pour l’enfant du pays, et pour son génie resté trop longtemps négligé par sa ville. Considéré comme le père de l’art moderne, il était en avance sur son temps et était décrié dans sa ville, à tel point que le conservateur du musée Granet se serait exclamé vers 1900 : « Tant que je serai en vie, aucun Cézanne n’entrera dans le monde ». musée” . Sa technique picturale innovante était incomprise dans les milieux aixois encore très académiques. Ce qui explique que peu de ses œuvres furent acquises par Aix et se retrouvèrent dispersées à travers le monde chez des collectionneurs ou dans des musées plus ouverts à l’avant-gardisme. Il faudra attendre 1984 pour voir huit tableaux du peintre aixois, qui n’en possédait alors aucun, entrer au musée Granet. Quarante ans plus tard, avec cette opération d’envergure, c’est un peu comme si les dégâts étaient réparés, et Aix-en-Provence passait du berceau de l’artiste à celui de sa ville musée.
C’est en ce sens que « Cézanne 2025 » est vécu comme une issue pour l’arrière-petit-fils du peintre.« C’est des décennies de travail pour pouvoir comprendre tout l’intérêt du peintre et tout l’éclat que cela peut apporter à une ville. On arrive à une sorte de finalisation avec notamment la restauration du Jas de Bouffan qui fut son cocon »explique Philippe Cézanne, présent à la présentation de l’événement à la mairie d’Aix-en-Provence ce lundi 25 novembre. Le descendant du peintre raconte aussi combien son grand-père a souffert du manque de considération d’Aix pour son père Paul Cézanne : «A la mort de Cézanne, son fils, mon grand-père, a vidé l’appartement et l’atelier a dit : « comme les Aixois n’aiment pas mon père, je ne reviendrai jamais ». Aujourd’hui c’est le début d’une grande aventure. Je trouve cela fascinant à vivre.
Pendant trois mois, Aix vibrera aux couleurs de Cézanne. Outre le musée Granet, d’autres lieux seront proposés au public pour rendre encore plus puissante l’évocation du peintre aixois. Le Musée du Vieil Aix reviendra sur les liens entre Aix et Cézanne, le Musée du Pavillon de Vendôme nous ramènera aux expositions Cézanne de 1956 et 1961. Enfin, les enfants à partir de trois ans auront également leur exposition Cézanne sur mesure. avec l’ouverture de La Petite Galerie Cézanne conçue à hauteur des yeux des enfants à La Manufacture.
Avec ses lieux réhabilités, sa grande exposition au musée Granet, et d’autres initiatives à destination du public, l’année Cézanne, qui a nécessité quatre années de préparation, représente aussi un gros investissement pour la ville qui espère que les retombées touristiques seront à la hauteur. de l’événement. L’office de tourisme voyage déjà à l’international pour en faire la promotion. Le budget s’élève à près de 12 millions d’euros. Amorti par les subventions publiques, mais aussi par les mécènes. Une partie sera également absorbée par la billetterie qui ouvrira en décembre 2024. Au moins 350 000 visiteurs sont attendus.