Mazarine Pingeot et Abdellah Taïa libérés des fantômes du passé

Mazarine Pingeot et Abdellah Taïa libérés des fantômes du passé
Mazarine Pingeot et Abdellah Taïa libérés des fantômes du passé

jeécrire comme moyen de consolation. Deux textes sur le seul chemin qui vaut le coup : celui de l’amour, ensoleillé et rédempteur. Ce samedi après midi à 37e Festival de littérature européenne de Cognac (LEC), deux beaux livres pour la rentrée ont trouvé une résonance sensible : « 11, quai Branly », une histoire intimiste de l’auteur et professeur de philosophie Mazarine Pingeot (Éditions Flammarion), et « Le Bastion des larmes », roman autobiographique de l’écrivain marocain Abdellah Taïa (Editions Julliard, prix décembre 2024).

Ces auteurs ont le même âge, une cinquantaine d’années. Pendant longtemps, ils ont dû cacher des pans essentiels de leur vie. Ils osent enfin rompre avec les secrets de l’enfance et les meurtrissures de l’adolescence.

Un débat touchant


Mazarine Pingeot il 16 novembre 2024 a Cognac.

Anne Lacaud

Mazarine Pingeot retourne là où elle vit presque recluse, dans le confort froid d’une résidence républicaine. « Je suis resté là 24 heures, pour les besoins du livre […]. C’était une expérience presque psychanalytique. Les sièges étaient vides mais le passé était là, suspendu, prêt à être saisi au moindre bruit de clé, au moindre craquement du bâtiment”, a-t-il déclaré samedi après-midi, lors d’un émouvant discours devant plus de 250 spectateurs. . .

A ses côtés se trouvait Abdellah Taïa, d’abord attentif et réfléchi, puis bavard et fougueux, dans un débat qui a duré une heure qui restera l’un des plus touchants de ce 37.e édition. Avec “Le Bastion des Larmes”, il explore avec force son passé d’enfant pauvre et maltraité, dans une famille nombreuse et dans un pays où l’homosexualité est encore interdite. Certes, les 213 pages sont écrites comme une fiction. » Mais ce Youssef qui doit retourner à Salé, près de Rabat, pour vendre l’appartement familial après le décès de sa mère ; ce Youssef qui retrouve ses six sœurs, se promène dans son ancien quartier et va régler ses comptes, c’est un peu moi”, dit l’auteur.

« La naissance d’un livre »


Abdellah Taïa le 16 novembre 2024 à Cognac.

Anne Lacaud

Comment retranscrire ici les échanges les plus forts ? On pourrait multiplier les anecdotes. Il cite Mazarine Pingeot qui explique que le 11 quai Branly était « une adresse qui n’existait pas » et où « elle n’aurait pas dû exister », prisonnière d’une « vie monastique où l’extérieur n’entrait pas ». On raconte qu’Abdellah Taïa a eu l’idée de ce roman sur les remparts en ruine, avec l’envie féroce de “renégocier l’amour”, de “pleurer puis rire sans oublier le drame”…

On fera plutôt écho à ce moment lumineux, où l’écrivain a déclaré que le témoignage de Mazarine Pingeot lui avait fait penser à un paradis familial perdu, El-Jadida, ville portuaire à une centaine de kilomètres au sud de Casablanca. «Je n’habitais pas là-bas. C’est là que mes parents se sont installés bien avant ma naissance. J’ai grandi dans la mythologie de ce bonheur inconnu, de cette ville d’abondance ! La mémoire des autres vous possède. C’est la première fois que j’en parle. »

Mazarine Pingeot sourit et s’adresse à l’assistance : « Peut-être assistez-vous à la naissance d’un livre ! » Une histoire libérée des fantômes du passé ?

 
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