Le 7 novembre, l’Opéra de Dijon ouvrait le bal L’homme femmeopéra-comique de Baldassarre Galuppi (1706-1785) que l’on croyait perdu jusqu’à ce qu’il soit retrouvé (à l’exception de trois airs manquants) en 2006, en parfait état de conservation, dans la bibliothèque du palais Ajuda, à Lisbonne. L’œuvre n’a pas été montée en scène depuis sa création au Teatro San Moisè de Venise, en 1762. Reste que son sujet a de quoi séduire, qui imagine une inversion des sexes, est en réalité plus prétexte à une comédie de situation qu’à une réflexion sur les stéréotypes de genre , dont le XXIe siècle en a fait l’une de ses préoccupations majeures.
Deux naufragés débarquent sur une île entièrement méditerranéenne, où règne un ordre matriarcal qui confère aux femmes, avec les pleins pouvoirs, les caractéristiques masculines de virilité et de jouissance du corps masculin. Soumises, fragiles et frivoles, elles sont au contraire frappées de futilité, soucieuses avant tout de leur apparence (coiffure, maquillage, bijoux, garde-robe) et de leur séduction. Une situation qui étonne évidemment nos survivants bergamasques, sauvés in extremis par les confidentes de la princesse Crétidea, souveraine aussi intrépide en guerre qu’en amour. “Tout objet projeté par les vagues” être « destiné au trésor royal »sans honte, la souveraine se vante d’avoir mis dans son lit le rebelle Roberto, au grand désarroi de Cassandra, tombée amoureuse du chevalier au premier regard, tandis que Ramira a jeté son dévolu sur son valet de chambre, Giannino.
Ensemble, ils rassemblent les ingrédients de la discorde, qui mènent à la colère, à la rivalité, à la trahison et au drame, le tout exacerbé par la jalousie de la favorite de la reine, Jasmine, qui craint à juste titre d’être supplantée. Un dernier rebondissement qui révélera que Roberto et Cassandra sont en réalité frère et sœur apportera la paix, tandis que la reine, pour épouser Roberto, se soumet à la loi patriarcale de l’étranger. L’inversion des sexes n’a fait que renforcer la suprématie masculine, au terme d’une crise qui marque la défaite des femmes. Et leur retour à la vie domestique et à l’accouchement.
Un casting musical de premier plan
Un sujet en potentielle résonance avec notre modernité, une distribution musicale de premier plan, une directrice d’opéra qui livre son deuxième opéra : L’homme femme coche a priori toutes les cases. C’est compter sans la longueur d’une partition dont les quelques presciences mozartiennes (on lève les oreilles) sont noyées dans des océans de notes et des zones d’ennui (on la repose). Ce n’est pas la faute des artistes. Dans la fosse, la mise en scène de Vincent Dumestre tire à plein régime, anime les rythmes de la danse, jongle avec les timbres, ose les sonorités poétiques, comme ces deux morceaux pleins de suspens accompagnés de la mandoline, dont on peut espérer qu’ils aient inspiré la célèbre sérénade de fenêtre. de Don Giovanni de Mozart.
Il vous reste 46,83% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.