Pour la première fois, Charles, alias Ours, et Pierre Souchon partent en tournée avec leur père Alain Souchon. Avant les deux soirées au Corum, à Montpellier, samedi 2 et dimanche 3 novembre, les frères évoquent cette grande aventure artistique et familiale.
D’où est venue l’idée de cette tournée familiale ? Aurait-il été comme ses amis Chedid ?
Ours : Non, ce n’était pas pour être comme des amis. Il se trouve qu’il y a quelques temps, on nous avait proposé de chanter ensemble tous les trois, c’était pour les Étoiles du sport, à La Plagne, en 2016. L’idée était d’accompagner notre père simplement avec nos guitares, quelque chose de très sobre. Alors rien que pour cet événement, nous avons accepté et nous nous sommes bien amusés. Il y avait vraiment un peu de magie. Cela nous a incité à recommencer de temps en temps, pour aider les associations. Nous l’avons également fait dans les maisons de retraite. Mais toujours à l’heure, jamais avec un plan de tournée officiel, chacun étant occupé avec ses propres projets. Et puis chacun de nous a voulu préserver son petit chemin. Mais beaucoup de ceux qui avaient assisté à ces petits concerts nous en ont parlé. Il a semé une petite graine et on s’est dit : pourquoi pas un jour ? Et puis on a fini par se dire que ce serait dommage de ne pas le faire.
Y a-t-il eu un événement déclencheur qui vous a convaincu de franchir le pas ?
Ours : On le raconte souvent, mais c’est une histoire vraie : après sa dernière tournée de trois ans, mon père, qui se sentait un peu étourdi, est allé chez le médecin qui lui a prescrit de la vitamine C et sur la ligne ci-dessous elle lui a écrit « va en tournée avec vos deux enfants ». C’est drôle mais c’est effectivement écrit sur la recette ! C’était une manière de le ramener dans la dynamique d’une gymnastique qu’il affectionne beaucoup : le spinning. Depuis que nous avons eu l’idée de ne nous laisser que tous les trois en famille, nous nous sommes dit que le moment était venu.
Diriez-vous que vous faites cette tournée pour votre père ou pour vous trois ?
Pierre Souchon : On le fait pour être ensemble, en fait, et on est très heureux d’être ensemble ! Nous faisons le même travail mais nous avons tous notre propre vie. Donc rarement l’occasion d’être ensemble. C’est juste qu’à un certain moment de la vie… Eh bien, mon père avait 80 ans, j’en avais 50, chacun de nous suivait son propre chemin. Tout était prêt pour se retrouver, alors nous avons tout officialisé !
Alors, comment ça marche… dans la vraie vie ?
Ours : Ça se passe très très bien, c’est un bonheur ! Confirme ce que nous voulions. Nous avons tendance à nous entendre et à nous amuser. Nous sommes une petite équipe sur les routes, l’entente est également très bonne avec les techniciens. Sur scène la formule s’affine, juste moi, mon père et mon père.
Comment répartissez-vous les rôles sur scène ?
Ours : Comme les Zavattas : je suis au trapèze, mon père est à l’accueil et Pierre est au trampoline ! Plus sérieusement, Pierre est souvent au piano, mais aussi à la guitare, je suis plutôt à la guitare. C’est en fait un concert de mon père, on fait juste une chanson de Pierre et une de moi, en un clin d’oeil, qu’on chante avec mon père, tout ça se passe de manière très naturelle. Mais nous accompagnons mon père avec une formule très simple, piano-guitare-voix, avec parfois quelques rythmes qui soutiennent les mélodies. Du coup on se retrouve dans quelque chose de très intime. Nous entendons clairement les paroles de mon père et percevons donc peut-être de nouvelles subtilités dans les vers. C’est beau.
Comment avez-vous choisi les chansons du récital ? Et qui les a choisis de toute façon ?
Pierre Souchon : C’est Charles et moi qui avons constitué le line-up. Bien sûr nous étions conscients qu’il allait devoir chanter des chansons essentielles mais comme toutes ses chansons font partie de notre vie, nous voulions qu’il interprète certaines qu’il n’avait pas chanté depuis longtemps mais aussi des chansons d’albums qu’il n’avait pas chantées depuis longtemps. nécessairement bénéficié d’une grande visibilité. Pour ceux qui suivent mon père depuis longtemps, ils auront des petits phares qui se rallument, des petites madeleines de Proust… Je pense à des chansons comme Non c’ero, L’amore in fuga (pour le film de Truffaut) ou encore Les Grands Noms.
Comment a-t-il perçu votre démarche ?
Pierre Souchon : Nous avons toujours travaillé ensemble mais il nous a fait confiance. Il sort d’une tournée de trois ans avec vingt-huit chansons à son répertoire. Il était donc très heureux de nous voir choisir. Il nous a dit qu’il chanterait ce que nous voulions. Il était très ouvert. C’est une réunion de famille dans un mélange de nostalgie et de transmission. Il a été bon avec nous. Mais nous l’avons quand même fait collectivement car pour certains il pouvait y avoir quelque chose qui les dérangeait…
Orso : C’est vrai qu’il a été très souple là-dessus, il avait confiance, il s’est laissé guider. Je pense que ça l’amusait d’avoir l’avis de gens qui ont un peu de distance. Oui, il s’est laissé emporter !
Nous devons donc vous poser une question : comment trouvez-vous votre père en ce moment ?
Ours : Nous pensons que c’est très bon pour lui. Pourtant il a 80 ans et on le voit chanter et gesticuler tous les soirs. Même si c’est une version assez calme, sans batterie ni basse, elle a une de ces pêches ! C’est ce que tout le monde dit. On le regarde et on se dit quelle chance on a d’être avec lui, de le voir aussi bien interpréter ses chansons. Il a la bonne voix, l’énergie. Franchement, ce que nous vivons est extraordinaire.
Pierre Souchon : En effet, c’est l’inactivité qui l’engourdissait un peu. Quand on a passé toute sa vie comme lui, en déplacement, dans la rue, à faire des albums, des concerts, des films, etc. S’arrêter d’un coup, c’est comme le dimanche soir d’un week-end qui s’est super bien passé, ça donne un petit coup de mou. Il fallait qu’il se remette en action et vous voyez à quel point cela lui fait du bien !