Cette IA qui veut votre bien dans « Coded Dreams »

Cette IA qui veut votre bien dans « Coded Dreams »
Cette IA qui veut votre bien dans « Coded Dreams »

En entrant dans une petite pièce sombre, vous êtes plongé dans un décor des années 1980. Sur l’écran d’un ordinateur rétro, des lettres vertes fluo vous invitent à répondre à une série de questions très personnelles. À quoi ressemblait votre chambre d’enfant ? Que veux-tu accomplir dans ta vie ? La machine tente de connaître vos souvenirs et vos aspirations, afin de mieux vous captiver par la suite.

Ceci est le préambule de l’ouvrage Tulpamancienprésenté au Centre Phi dans le cadre de l’exposition Rêves codés à partir de mercredi. Les visiteurs sont ensuite invités à enfiler un casque de réalité virtuelle. Ils sont entraînés dans une histoire sur mesure créée en temps réel par l’intelligence artificielle (IA). Le résultat est un voyage onirique – et légèrement psychédélique – en trois dimensions, guidé par une sorte d’apôtre de la croissance personnelle. “Sachez que l’univers se déploie avec des possibilités, conspirant pour créer les conditions parfaites lorsque le destin le désire”, raconta la voix douce de la machine, nommée Tulpaà notre journaliste.

Matthew Niederhauser, l’un des deux artistes new-yorkais à l’origine de l’œuvre, admet que l’expérience peut prêter à confusion. C’est même intentionnel. « Il y a des gens qui sortent en larmes parce qu’ils étaient tellement émus. D’autres personnes se sentent mal à l’aise. Quand ça fait bizarre, on s’interroge sur les raisons de ce mal-être », rapporte-t-il.

Susciter des conversations et des réflexions sur le fonctionnement de l’intelligence artificielle, c’est ce que souhaitent avant tout M. Niederhauser et son collègue Marc Da Costa. L’IA apparaît ainsi avec ses atouts et ses défauts, maladroite malgré ses intentions bienveillantes. Cela ne passerait certainement pas le test de Turing. Autrement dit, la machine aurait beaucoup de mal à nous convaincre qu’elle est humaine. Mais l’ouvrage donne un aperçu de ce qui pourrait nous attendre avec l’utilisation raffinée et généralisée de ce type de technologie imitant le comportement humain.

De la gentillesse à la manipulation

Il y a bien sûr un champ utile pour l’IA… et même thérapeutique ! «Notre travail ne remplace pas une thérapie», plaisante M. Niederhauser. Mais il y a des gens qui s’ouvrent davantage à une IA qu’à un humain, car ils ne se sentent pas jugés. »

Les créateurs ont expliqué à l’intelligence artificielle d’OpenAI, la société à l’origine de ChatGPT, comment interpréter les réponses des téléspectateurs et communiquer avec eux. Puisqu’ils voulaient que l’expérience soit positive, ils l’ont entraînée à générer un contenu agréable et spirituel à partir de leurs paroles.

“Mais on pourrait aussi lui dire d’être méchante et de vous insulter”, ajoute M. Niederhauser. Les citoyens doivent donc comprendre comment l’IA peut être utilisée contre eux, estime-t-il. « Cela peut être très manipulateur. »

« Ce qui est fou, c’est que des entreprises comme Meta, Alphabet (Google) et Amazon ont beaucoup d’informations sur vous, bien plus que six questions. Bientôt, vous pourrez disposer d’un assistant personnel qui connaît vos dix années d’historique de messagerie», affirme celui qui a toujours été fasciné par les technologies numériques. Il démontait des ordinateurs à huit ans et programmait l’intelligence artificielle il y a 25 ans. Il a ensuite travaillé comme artiste dans les domaines de la photographie, de la vidéo, de la réalité virtuelle et des arts interactifs.

Mythes déformés

En plus de l’expérience intime de TulpamancienMM. Niederhauser et Da Costa proposent un ouvrage collectif intitulé La clé d’or. Des images fantaisistes sont projetées sur trois grands écrans, accompagnées d’une narration en français. Pour créer ces histoires infiniment liées, l’IA puise dans un répertoire de dizaines de milliers de contes et d’illustrations provenant de multiples pays et époques.

Les téléspectateurs sont invités à contribuer à l’histoire en suggérant leurs propres thèmes et expressions au conteur numérique. En passant le Devoirleurs ajouts donnaient lieu à des scènes amusantes, comme des bagels géants flottant dans un lac devant un village médiéval censé représenter Montréal. En prêtant attention à la narration, on remarque aussi que les histoires sont farfelues et difficiles à suivre. Là aussi, les limites de l’IA sont loin d’être cachées.

Il s’agit d’une première canadienne pour ces deux œuvres. Ils avaient déjà été présentés au festival South by Southwest au Texas en 2024, où La clé d’or a remporté un prix du jury. Tulpamancien a également été sélectionné au Festival international du film de Venise en 2023.

Rêves codés

Au Centre PHI, jusqu’au 12 janvier 2025.

A voir en vidéo

 
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