Visiblement, vous avez aimé les posts d’ambiance de Marc Fayetdonc on remet ça pour 2024 et on termine évidemment cette saison avec Les carnets secrets de Marc Fayet ! Vous avez pu le découvrir et le lire Cyclisme’Actuavec sa chronique ou plutôt sa rubrique”Les cahiers secrets« . Pour rappel, Marc Fayetné en 1961, est un homme de théâtre et de scène. Acteur et réalisateur, mais aussi passionné de cyclisme, Marc s’est toujours impliqué : il écrit, commente, agit autant qu’il peut dans le cyclisme, notamment sur Tour of Finistère dont il est aujourd’hui et depuis 2021, le président du comité d’organisation. Marc Fayet et “son” cahiers secretson le retrouve désormais régulièrement sur Cyclisme’Actu.
Vidéo – L’ombre du dopage sur un peloton surmédicalisé… L’Enquête
“Il s’agissait très probablement de Bernard Sainz, alias Docteur Mabuse”
C’est rue de Londres dans le 9ème arrondissement de Paris le mercredi 27 novembre 2024 vers 13h30 que sur le trottoir un homme sur une monture très modeste se dirigeait dans ma direction : Cadre fin, assez ancien, de couleur jaunâtre, droit guidon VTC mais avec roues de petite section. Cet homme d’un certain âge qui se dirigeait vers la place de l’Europe me paraissait un visage familier. Ce n’est que quelques secondes après son passage que mon cerveau m’a soudain dit qu’il s’agissait très probablement de Bernard Sainz, alias Docteur Mabuse. N’en ayant aucune preuve, car cette vision était trop fugace, j’avais néanmoins le sentiment que c’était bien cet individu au fameux pseudonyme, qui au fil du temps était devenu plus célèbre que le personnage dont on lui avait attribué le nom. .
J’éprouvais une sorte de satisfaction et de malaise à la fois parce que je me demandais ce qu’il pouvait bien faire dans le quartier, et ça faisait longtemps qu’il ne faisait plus la Une des journaux sur la légalisation du vélo. Et alors ? Veux-tu me le dire ? Allait-il commettre d’autres crimes ? Et pourquoi pas ? Pour les éléments de suspicion, rappelons que lors de l’édifiante enquête d’Elise Lucet qui avait mis notre sorcier au cœur de l’actualité, le bon docteur fixait ses rendez-vous dans une brasserie située dans le quartier de Villiers, tout droit, à 200 mètres de la direction prise par le vieux cycliste que je venais de dépasser. C’est dans ce lieu, rappelons-le, qu’une caméra cachée nous avait permis de découvrir les conseils avisés qu’il donnait à un cycliste complice venu chercher quelques recettes ou produits lui permettant d’augmenter ses performances en raison d’une période de doute et d’incrédulité.
« À l’heure où les rumeurs sur les machines à monoxyde de carbone, cétones et autres sont courantes… »
Mon esprit, ainsi que mon imagination, m’ont immédiatement amené à visualiser un coin de ce grand café où, assis sur l’un des fauteuils, un coureur en plein doute attendait cette visite comme l’un de ses derniers espoirs de répéter une autre saison. avec la bonne forme et non avec ses ennuis passés. Et puis mi-novembre, c’était la période idéale, celle de la pause où chaque cycliste fait le point sur l’année écoulée et prépare les objectifs pour la suivante. Période de réflexion, de préparation et parfois de perdition. Pourtant, à l’heure où les rumeurs sur les appareils à monoxyde de carbone, cétones et autres microdoses sont courantes, les prescriptions douteuses du médecin, consistant en douches froides sur les testicules et prise de gouttes à 100 euros contenant de l’eau et de la caféine, semblaient bien anachroniques.
Et pourtant ? De quoi retenir un homme qui a tourmenté des générations de coureurs des années 80 aux années 2010 et au-delà. On imagine facilement que rien ne peut arrêter ce type de personnage qui a su se rendre indispensable, incontournable, incontestable, indétectable ! Grâce à son influence psychologique, il a quelque chose de serpent et son regard rappelle celui du Python Kaa du Livre de la Jungle, lorsqu’il hypnotisait ses proies pour diffuser leurs pires pensées.
“Coureurs, vous aurez toujours le pouvoir de mettre tous les autres serpents hors de danger”
Alors la combinaison de mon imagination, de ma fantaisie, de mes peurs, de mes inquiétudes, de mon goût du scandale et des mystères, m’a entraîné dans ce scénario soudain et fulgurant faisant revivre pendant quelques lignes tout un pan de la grisaille de notre histoire qui se situe exactement entre les plus grands scandales de nos turpitudes passées et les charlatanismes les plus loufoques de nos errances formelles. S’il s’avère que le vieux cycliste que nous avons rencontré n’était pas notre Mabuse, c’était seulement un homme qui lui ressemblait qui, circulant sur le trottoir, a connu un gain marginal, celui qui lui a permis de rouler sur l’asphalte lisse du trottoir, de gagner vitesse et économie musculaire en évitant les pavés de la rue de Londres.
Mais une fois arrivé place de l’Europe et continué vers la place de Villiers, iriez-vous directement à la célèbre Brasserie ? Ou tournerait-il à gauche vers la rue du Rocher ? Là où est situé le Théâtre Tristan Bernard, grand passionné de cyclisme qui dirigea le vélodrome de Buffalo et qui suivit le Tour 1934 pour la presse et qui rendit cet hommage à la grâce des coureurs : «Ce qui frappe aussi, c’est la grâce et l’habileté de ces cyclistes : par exemple, lorsqu’ils dépassent une voiture de ravitaillement, ils lâchent leur guidon, retirent le boyau usé qu’ils ont autour des épaules et le remplacent par un boyau neuf qu’ils enroulent autour. leur torse… De loin, ils ressemblent à des charmeurs de serpents.»
Alors rappelez-vous, chers coureurs, que si vous n’avez plus les tripes enroulées autour de votre poitrine, vous n’avez rien perdu de votre charme envoûtant et que vous aurez toujours le pouvoir de mettre hors de danger tous les autres serpents, qu’ils viennent du rues de Londres ou simplement depuis l’ombre des rues.