L’un est né dans la Vienne et vit dans les Pyrénées-Orientales, l’autre est charentais et réside à Saint-Georges-lès-Baillargeaux. Le temps d’une vidéo, nous avons réuni Valentin Ferron et Victorie Guilman. Les deux coureurs ont rejoint Cofidis pour deux saisons. Entretien croisé.
Leur nouvelle équipe
Vous connaissez-vous ?
Valentin Ferron (VF) : « Les premiers souvenirs sont minimes vers les années 2010. J’ai eu l’occasion de courir avec Victorie car elle était un peu plus âgée. Elle m’a battu plusieurs fois. »
Victorie Guilman (VG) : « Je suis d’Angoulême et j’ai couru dans tout le Poitou. Je me souviens d’une course à Colombiers. »
VF : « Depuis, chacun a suivi son propre chemin. Je l’ai recroisé lors des sélections Poitou-Charentes. Et je suis ami avec le compagnon de Victorie, Étienne. Mais je ne l’ai pas vu depuis un moment. »
Vous avez signé chez Cofidis. Pour quoi ?
VG : « Ce n’était pas prévu de changer d’équipe. En juin, Saint-Michel – Auber 93 n’était pas sûr de redémarrer. Il fallait prendre une décision et l’équipe ne m’a pas bloqué. En parallèle, Cofidis m’avait contacté depuis mars. J’ai d’abord refusé, avant que cela ne se fasse naturellement après les difficultés de Saint-Michel. »
VF : « C’est un peu le contraire de Victorie. J’étais dans l’équipe de Jean-René Bernaudeau depuis 2017. J’ai passé trois ans à Vendée U et cinq ans chez TotalEnergies. Je sors d’une saison compliquée. J’avais envie de changer d’air, de sortir de ma zone de confort et de participer à d’autres courses, le calendrier étant plus dense. Cela s’est fait tout naturellement et très tôt. »
Victorie Guilman, 28 ans
Cours : DN Poitou Charentes (2015), FDJ-Suez (2015-2023), Saint-Michel Auber (2024), Cofidis (until 2026).
Palmarès : Chambéry Grand Prix (2023).
Ses meilleurs résultats en 2024 : 6e vous faites une tournée aux antipodes, 2e of the Pays de la Loire Region, 6e from La Classique Morbihan, 7e de la première étape du Tour de Bretagne.
Participations : Tour de France (2024), Giro (2019, 2023), Vuelta (2021).
Pouvez-vous raconter l’histoire de votre arrivée ?
VG : « Je voulais vraiment rester en France. Il existe peu d’options pour avoir une équipe structurée. J’ai tout de suite fait confiance à Cofidis, la deuxième équipe française. »
VF : « Cofidis m’a très vite manifesté son intérêt. Je voulais rester en France pour la simplicité de la langue. Je ne me voyais pas partir à l’étranger. C’était une étape trop importante et je ne sais même pas si les équipes étaient intéressées. »
Avant de signer, qu’est-ce qui vous a inspiré dans cette équipe créée en 1996 ?
VF : « C’est une équipe mythique, une des plus anciennes du peloton. Cela me fait penser à Sylvain Chavanel que j’admirais. Il a porté le maillot pendant plusieurs années (2005 à 2008). »
VG : « J’ai l’image du maillot sur la Grande Boucle lors des échappées ou lors de la victoire de Sylvain sur le Tour (2008). C’est vraiment légendaire. Et un sponsor qui dure aussi longtemps, c’est magnifique. »
Quelles seront vos ambitions ?
VG : « J’aimerais participer au Tour de France, notamment avec son passage à Poitiers. Ce serait vraiment un événement à ne pas manquer. J’espère que je pourrai bien faire. Il y a aussi le championnat de France, l’un des moments forts d’une saison. J’espère obtenir un résultat (6e en 2023, 2e en 2019). J’aurai un peu moins de ma carte Cofidis, je devrai accompagner un peu plus les jeunes mais ça pourrait être bénéfique. »
VF : « J’aimerais découvrir le Giro. C’est une balade formidable et attrayante. Je veux le faire au moins une fois. Et puis, je ne suis pas difficile. Je veux reprendre le chemin de la victoire. »
Chez Cofidis, des ponts existent-ils entre les deux équipes ?
VG : « Les parcours seront au même endroit comme le premier à Calpe en Espagne, certaines courses aussi. La présentation début décembre sera également commune. Les deux équipes sont cependant différentes. »
Jouer en équipe mixte est-il intéressant dans la vision globale du cyclisme ?
V.F. : «Ça va être une découverte. Il y a de plus en plus de femmes, ce qui est très bien. Le cyclisme est un environnement machiste basique. En termes de résultats, cela peut aussi créer une bonne dynamique. »
VG : « À Saint-Michel, c’était le cas. Et franchement, j’ai beaucoup aimé. Toute l’année, on est entre filles, alors que là, il y a une vision différente quand on est avec des hommes. Les approches sont différentes comme les mentalités. C’est aussi bien d’avoir d’autres échanges. »
Avec ce changement d’équipe, avez-vous gardé votre coach ?
VG : « Cela fait cinq ans que je travaille avec Sébastien Chavanel. Ça se passe bien, je ne me voyais pas en sortir. »
VF : « Pour moi, c’est le contraire. J’avais un coach employé par TotalEnergies. Je travaille désormais avec Mathieu Defontaine. J’aurai également un directeur sportif de référence pour que les informations circulent comme le calendrier des courses, mes envies, mes attentes et vice versa… »
Connaissiez-vous des membres de Cofidis ?
VF : « Non, j’ai côtoyé quelques coureurs français dans les courses. Je ne viens pas seul, je viens avec Paul Ourselin. »
VG : « Je connais un peu Victoire Berteau et je viens aussi avec Marion Borras. »
Valentin Ferron, 26 ans
Cours : Vendée U (2017-2020), TotalEnergies (2020-2024), Cofidis (until 2026).
Palmarès : stage 4 of the Tour du Rwanda (2021), stage 6 of the Critérium du Dauphiné (2022), Paris-Camembert (2023)
Ses meilleurs résultats en 2024 : 11e of the Grand Prix du Morbihan, 4e des Boucles de l’Aulne.
Participations : Vuelta (2020), Tour de France (2023).
Leur avis sur l’autre, la vision de leur discipline
Comment voyez-vous les carrières de chacun ?
V. F. : « C’est drôle de se retrouver chez Cofidis après avoir commencé le vélo ensemble. Elle, comme moi, a eu une progression linéaire. »
VG : « En Poitou-Charentes, il y a peu de coureurs professionnels. Être deux de la même époque à ce niveau, c’est plutôt cool. »
Suivez-vous le cyclisme féminin ?
VF : « Nous ne pouvons que nous réjouir de son évolution. Finalement, c’est arrivé un peu en même temps que mon arrivée chez les pros. Les courses sont télévisées, certains parcours sont similaires, c’est positif. Les filles sont loin d’être ridicules et font aussi bien que les hommes. »
Et masculin ?
VG : «Je le suis, j’aime regarder la télévision. Étienne, mon compagnon, regarde tout le temps. Je suis un peu forcé (rires) même si j’aime ça aussi. »
Regardez-vous votre discipline ?
VF : « Je ne regarde pas toutes les courses mais je fais attention aux résultats. »
VG : « Pour choisir, je préfère regarder les filles car je les connais. Cela m’attire davantage. »
VF : « Je rejoins également Victorie. Quand je ne suis pas sur le vélo, c’est bien de regarder mes adversaires. »
Pouvez-vous encore le couper ?
VF : « De plus en plus, j’essaie de débrancher. Le vélo prend beaucoup de place. Si je vais rouler le matin et regarder les courses l’après-midi, ce n’est pas très relaxant et amusant. »
VG : ” Je suis d’accord. En ce moment, c’est du cyclo-cross. C’est diffusé à la maison et ça m’énerve un peu (rires). »
Comment parvenez-vous à le faire ? Avez-vous des passions ?
VF : « Comme une personne moyenne, j’aime faire des choses simples comme les activités manuelles et le bricolage. Il faut faire du bien à sa tête et à son corps. »
VG : « J’aime beaucoup cuisiner, je jardine aussi. L’après-midi, il y a souvent des promenades avec mes deux chiens, le Spitz nain (appelé aussi Loulou de Poméranie). »
Parles-tu anglais?
VG : « À la FDJ, c’était une obligation. Tout était en anglais. Briefings et casque. Chez Cofidis, il y a aussi beaucoup d’étrangers qui ne parlent pas un mot de français donc il faut s’y habituer. »
Est-ce surprenant de parler une autre langue dans une équipe française ?
VG : « J’ai l’impression que les hommes font plus d’efforts. Chez Groupama, ils ont été obligés d’apprendre. Là, certains sont là depuis trois ans et ne parlent pas du tout. C’est assez étrange. »
VF : « Les équipes françaises s’internationalisent. Chez Total, l’arrivée de Peter Sagan en 2022 a tout changé. Tout le monde a pris l’habitude de parler anglais. C’est aussi normal que chacun puisse travailler en symbiose. Mais je n’en suis pas encore au point de mon côté (rires). Il va falloir que je progresse car il y a beaucoup d’étrangers chez Cofidis (17 sur 30). Je serai assidu. »
Rattachement à Vienne, itinéraires de formation, FDJ-Suez
Que pensez-vous de FDJ-Suez, la formation basée à Vienne ?
VG : « Je les connais très bien après huit ans avec eux. Cette année déjà, il y a eu beaucoup de changements. FDJ-Suez atteint le plus haut niveau. L’année prochaine, ce sera l’une des meilleures équipes du monde. En deux ans, Stephen (Delcourt) a vraiment fait un gros effort de recrutement tant au niveau du staff que des filles. C’est formidable de voir cette évolution. À mon retour en 2015, l’équipe était loin de ce niveau. C’est bien d’avoir une telle équipe à Vienne. »
VF : « Je suis fier et j’admire le travail de Stephen. Avoir une équipe de ce niveau ancrée en territoire poitevin, c’est très beau. Comme l’a dit Victorie, la montée en puissance de l’équipe est tout à fait admirable. »
Avez-vous des regrets de les avoir quittés ?
VG : « Non, pas du tout (rires). C’était l’une de mes meilleures décisions l’année dernière. Cette année, j’ai réalisé une de mes meilleures saisons. J’ai beaucoup de regrets de quitter Saint-Michel mais ce n’était pas vraiment ma décision. »
Vous êtes rattaché au département de la Vienne ?
VF : « Évidemment, j’ai grandi ici. Je garde toujours un œil sur ce qui se passe. Je me sens évidemment poitevin. »
VG : « Pour être honnête, je me considère plus charentaise mais j’y suis vraiment attaché car ce sont mes parcours de formation. Je défends ma terre. Et il y a beaucoup de courses ici. »
Les routes ne sont-elles pas un peu plates compte tenu de vos caractéristiques de puncheur-grimpeur ?
VG : « Ce n’est pas facile. Je fais beaucoup de tours de circuit et plusieurs fois la même bosse. Pour rouler, il y a peu de collines. Ce n’est pas idéal mais je ne me vois pas bouger. »
Quelles bosses pourraient vous convenir ?
VG : « Il y a la Côte du Fou (à la sortie de Vouneuil-sur-Vienne), c’est ma côte de référence. Je devrais peut-être le faire dix fois à l’entraînement, c’est un peu ennuyeux mais il n’y a pas beaucoup de choix. »
Valentin, tu la connais bien ?
VF : « Oui, je l’ai roulé plusieurs fois mais je n’ai pas encore le Kom (1). » (rires)
(1) Roi de la montagne, meilleur temps sur un segment précis.