L’EDITORIAL DE RAPHAËL LEGENDRE. Avec un déficit de 156,3 milliards d’euros en 2024, plus d’un tiers des dépenses de l’Etat (35,7%) est financé par la dette. Ce qui n’empêche pas l’Elysée de se féliciter de « la maîtrise des dépenses (…) ainsi qu’un niveau de recettes supérieur aux dernières prévisions ». Lunaire.
Si le déficit de l’Etat en 2024 est un peu moins grave que prévu (-6,4 milliards par rapport à la fin de la loi gestion), il reste à un niveau absolument stratosphérique de 156,3 milliards d’euros. Calculé non pas en points de PIB comme il est d’usage, mais en pourcentage comme tout déficit privé, le déficit de l’Etat atteint 35,7%.
Un niveau anormalement élevé, très inquiétant. Mais plus inquiétant encore est le discours parfaitement lunaire de la classe politique qui l’accompagne.
Un écart de revenus de 42 milliards d’euros
C’est bien simple : tout le monde ment. A commencer par l’Elysée qui écrit dans le rapport du Conseil des ministres ce mercredi que “les résultats de l’exécution du budget 2024 témoignent de la maîtrise des dépenses de l’Etat ainsi que d’un niveau de recettes supérieur aux dernières prévisions”. Vous pourriez tomber de votre chaise.
Depuis la crise du Covid, on a maintenu un niveau keynésien de dépenses en stéroïdes et les recettes ont montré un écart de 42 milliards en 2024, après plus de 20 milliards en 2023, et on parle de « maîtrise des dépenses » et de recettes « supérieures aux prévisions ». ». C’est une blague.
Et malheureusement c’est comme ça partout sur les bancs de la classe politique. La France insoumise dénonce la pseudo-austérité alors que les prestations sociales ont augmenté de 100 milliards en quatre ans.
Au PS, le Graal politique serait de revenir à 62 ans pour les retraites, la plus grosse dépense du pays, alors que tous les pays européens repoussent l’âge de la retraite.
-Le bloc central est évidemment responsable de cette situation financière catastrophique que nous devrons payer pendant des années.
Et la droite n’est pas plus sérieuse avec un double discours coupable sur les finances publiques. D’un côté, elle prône le sérieux budgétaire, de l’autre, elle refuse que l’Assemblée vote une réforme des retraites que leurs sénateurs soutiennent depuis des années, elle refuse le gel des retraites, vante les chèques énergie, le gel des prix à la pompe qui coûte une fortune… Et l’extrême droite n’est pas plus cohérente en matière de finances publiques.
Insouciance généralisée
Et tout cela va continuer car, pour l’instant, aucune corde de rappel ne fonctionne. Ni l’Europe car nos voisins européens ont validé à l’unanimité cette semaine la nouvelle trajectoire dégradée de la France.
Ni les marchés. En effet, il y a deux jours, les marchés ont proposé 130 milliards d’euros pour la dernière adjudication du Trésor, qui n’en demandait que 10 milliards. Ni une opinion publique qui n’y comprend rien et qui, globalement, s’en fiche.
Preuve que la dérive va se poursuivre : le déficit de la Sécurité sociale devait être réduit de 18 à 16 milliards en 2025, a-t-on appris ce matin dans Les Echos qu’il sera probablement de 25 milliards en réalité. La mauvaise gestion continue. Tout le monde s’en fiche, mais tout cela finira par payer cher un jour.
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